mercredi 9 septembre 2009

Les traders se rebiffent

Un peu sonnés par la crise, les stars de la finance se réveillent. Ils en ont marre de jouer les boucs émissaires, et vont même parfois en justice pour réclamer le paiement de leurs bonus. Et tant pis pour le politiquement correct.
Voilà une cause difficile à défendre auprès de l'opinion publique. Mais les traders s'en fichent. A la City, soixante-douze d'entre eux viennent de porter plainte contre la Dresdner Kleinwort et la Commerzbank pour des bonus impayés. Leurs avocats défendent le caractère contractuel de ce type de rémunération. Au total, quelques 40 millions d'euros, promis en 2008 par Allianz, l'ancien propriétaire de la Dresdner Kleinwort, qui a revendu la banque à Commerzbank. Quatre traders ont déjà gagné un procés semblable le mois dernier, et ils seront de plus en plus nombreux à tenter leur chance. Dans les semaines qui arrivent, on s'attend à ce que 25 à 30 anciens employés de la Dresdner Bank, licenciés, déposent des plaintes similaires. Bref, les traders ne sont pas décidés à se laisser faire. Et ce d'autant moins qu'ils se considèrent comme les boucs émissaires de la crise. Matthieu Guiliani, un manager parisien cité par leWall Street Journal explique ainsi que "la petite quantité de traders qui gagnent des hauts salaires - et ils sont moins de 50 en France - ne peut raisonnablement pas porter l'entière responsabilité de la crise".

Pour eux, l'opinion se trompe de cible en s'attaquant aux traders. Les patrons des plus grandes banques internationales rassemblés cette semaine à Frankfort s'offusquent d'une étude selon laquelle 81% des Allemands pensent qu'aucune leçon n'a été tirée de la crise bancaire. Et Josef Ackerman, patron de la Deutsche Bank, d'expliquer que "la performance des banques n'est nullement corrélée à la quantité de bonus qu'elle distribue". Il affirme qu' une bonne gestion du risque et des liquidités est beaucoup plus important pour éviter les excès du système financier. Bref, la crise, c'est les autres, au premier rang desquels les pouvoirs publics et les banques centrales.

"C'est la faiblesse des taux d'intérêt pratiqués sur les marchés interbancaires qui est à l'origine du crédit crunch, pas les bonus des traders", déclare ainsi à l'International Herald Tribune Luc Sitbon, un trader qui a vécu à Londres pendant 13 ans. Des taux d'intérêt trop bas, surtout en Grande Bretagne, aux Etats Unis, en Espagne et en Irlande, auraient ainsi incité la majorité des acteurs économiques à s'endetter plus et à dépenser plus. Et les Etats se sont eux aussi endettés massivement. L'investissement déraisonné des assureurs et des fonds de pension dans des actifs très risqués s'expliquerait lui aussi par la quasi-gratuité de l'argent sur les marchés financiers.

Du coup, certains cèdent à une sorte de théorie du complot. Urs Rohner, chef opérationnel à Crédit Suisse, cité par le New York Times, estime ainsi que la tentative des gouvernements de réguler les bonus est "une tactique pour ne pas porter la responsabilité de la crise". Il faut dire que les Etats donnent parfois le bâton pour se faire battre. Selon le New York Times, Citigroup et RBS, qui sont maintenant presque entièrement sous tutelle publique, comptent parmi les employeurs les plus généreux sur le marché actuel. Ces banques promettent des bonus élevés pour attirer les cerveaux les plus talentueux, espérant ensuite pouvoir rembourser les aides gouvernementales au plus vite...
Source: www.lexpansion.com

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