jeudi 2 mai 2013

La liberté d'expression aux Etats-Unis

La Déclaration universelle des droits de l'homme (DUDH) et le Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP), dont les États-Unis sont signataires, stipulent tous deux le droit des individus à la liberté d'expression. Ce droit comprend la liberté de chercher, de recevoir et de répandre les informations et les idées de tous genres.
Les États-Unis garantissent ce droit par le Premier Amendement à la Constitution des États-Unis, qui affirme que « le Congrès ne fera aucune loi qui touche l'établissement ou interdise le libre exercice d'une religion, ni qui restreigne la liberté de la parole ou de la presse, ou le droit qu’a le peuple de s'assembler paisiblement et d'adresser des pétitions au gouvernement pour la réparation des torts dont il a à se plaindre ».
La Constitution des États-Unis protège même les discours les plus injurieux et controversés de toute répression de la part du gouvernement, et ne permet la réglementation du discours que dans certaines circonstances précises et limitées. Le système des États-Unis préconise l'idée que l'échange libre et ouvert d'idées encourage la compréhension, fait avancer la recherche de la vérité et permet la réfutation des mensonges. Les États-Unis sont convaincus, et l'expérience l'a démontré, que la meilleure façon de contrer tout discours offensant n'est pas la réglementation, mais davantage d’expression.
Fondements de la liberté d'expression
La protection du droit à la liberté d'expression, accordée par la Constitution des États-Unis, repose sur le principe que la capacité individuelle à s'exprimer librement - sans crainte de représailles de la part du gouvernement - produit l'autonomie et la liberté qui favorisent un meilleur gouvernement. Permettre aux citoyens de discuter ouvertement de sujets d'intérêt public entraîne l’établissement d’un gouvernement plus transparent et représentatif, des idées plus tolérantes et une société plus stable.
L'histoire a montré que restreindre la liberté d'expression en interdisant tout discours ne fait pas avancer la démocratie. Les rédacteurs de la Constitution des États-Unis ont reconnu que lorsque les gouvernements interdisent aux citoyens de parler de certains sujets, ils les poussent souvent à en discuter secrètement. En permettant aux individus d'exprimer leurs opinions - peu importe si le gouvernement et d'autres citoyens sont en désaccord avec eux - le Premier Amendement favorise la transparence et la stabilité sociale. Ce débat public entièrement ouvert impose également des idées sur le marché intellectuel, où elles doivent rivaliser avec les idées librement exprimées par d'autres individus. [1] Cette concurrence idéologique a pour effet que les idées inférieures ou insultantes font place à de meilleures idées.
Exceptions étroitement définies
Alors que le Premier Amendement protège la liberté d'expression aux États-Unis, celle-ci n'est pas absolue. En règle générale, le gouvernement dispose d'une marge de manœuvre plus grande pour imposer des restrictions qui n’affectent pas le contenu que pour imposer des limitations fondées sur le contenu.
DES RESTRICTIONS QUI NE SONT PAS FONDÉES SUR LE CONTENU
Le gouvernement peut généralement imposer des restrictions à l'exercice de la liberté d'expression quant à l'horaire, le lieu et la manière, pourvu que les restrictions ne soient pas basées sur le contenu du discours ou sur le point de vue de l'orateur. Ces restrictions doivent 1) être neutres, 2) être strictement adaptées pour servir un intérêt gouvernemental important et 3) laisser ouverts d'autres canaux de communication.[2]
Par exemple, le gouvernement peut imposer des règlements raisonnables concernant le volume des haut-parleurs utilisés dans un quartier d'affaires du centre-ville, imposer des limites raisonnables sur les manifestations dans les quartiers résidentiels au milieu de la nuit ou exiger un permis pour des défilés et des manifestations organisées, afin de s'assurer qu'elles ne créent pas de risques pour la sécurité publique, sous réserve que ces restrictions s'appliquent à tous les intervenants, sans tenir compte du contenu ou du point de vue spécifique du discours.
DES RESTRICTIONS FONDÉES SUR LE CONTENU
Alors que les restrictions fondées sur le contenu sont généralement inadmissibles, il existe quelques exceptions bien précises. L'incitation à la violence imminente, les menaces concrètes, les discours diffamatoires et les obscénités figurent parmi les catégories d'expression particulière pouvant être limitées en vertu du Premier Amendement.
Incitations à la violence imminente
La parole d'un individu pourrait être limitée si 1) elle vise à inciter ou à accomplir un acte illégal, 2) est susceptible d'inciter un tel acte et 3) l'acte est susceptible d'être produit de façon imminente. Il s'agit de normes très strictes, et les tribunaux ont rarement trouvé qu’elles s’appliquaient. Les appels à la violence en général, comme écrire sur un site web que la révolution violente est le seul remède aux problèmes de la société, ne constitue pas une incitation à la violence imminente.
En 1969, par exemple, un membre du Ku Klux Klan a prononcé un discours dans l'Ohio, au cours duquel il préconisait des « revanches » [sic] contre les juifs et les Américains d'origine africaine. [3] La Cour suprême a rejeté une loi interdisant son discours, car elle incriminait des propos « ne visant pas à inciter ou à favoriser un acte illégal imminent » et n'étant pas « susceptibles d'inciter ou de produire cette action. »[4]
De même, si une personne brûle un drapeau américain lors d'une manifestation contre la politique d'immigration du gouvernement des États-Unis, et un contre-manifestant s'emporte et s'attaque physiquement à une personne qui semble être un immigrant, l'acte du brûleur de drapeau sera probablement protégé par le Premier Amendement parce qu'il ne visait pas à inciter à la violence.
En revanche, si un orateur appartenant à un groupe ethnique spécifique appelle une foule en colère à attaquer physiquement et expressément un individu d'un groupe ethnique différent, pour prouver la supériorité de son groupe, et une personne de cette foule s'attaque immédiatement physiquement à une personne de ce groupe ethnique différent, le discours de l'orateur ne sera probablement pas protégé par le Premier Amendement, parce qu'il visait à inciter à la violence imminente et était susceptible d'inciter une telle violence.
Menaces concrètes
Le discours peut également être limité concernant son contenu, s'il relève de la catégorie restreinte de « menaces concrètes » de violence. Une menace concrète est une déclaration qu’un destinataire raisonnable comprendrait comme signifiant que l’orateur a l’intention, ou des personnes travaillant avec l’orateur ont l’intention, de commettre un acte d’agression physique envers le destinataire. À titre d’exemple, une femme à Philadelphie a été condamnée à huit mois d'emprisonnement, pour avoir déposé une lettre de menaces sur la chaise d’un collègue.
Diffamations
Aux États-Unis, des propos diffamatoires sont de fausses déclarations concernant des faits portant atteinte à la moralité, à la renommée ou à la réputation d'un individu. Cela doit être une fausse déclaration de faits, l’expression d’une opinion, aussi insultante soit-elle, ne peut relever de la diffamation en vertu de la loi des États-Unis.
Les normes s’appliquant aux agents publics et aux particuliers sont différentes, conformément à la loi sur la diffamation. Les orateurs bénéficient d'une meilleure protection lorsqu'ils formulent des remarques au sujet d'un agent public, par opposition à un simple citoyen. En 1964, la Cour suprême des États Unis a décrété que les agents publics pourraient poursuivre un orateur pour diffamation seulement s'ils pouvaient démontrer « l'intention effective de nuire », à savoir, que l'orateur savait que sa déclaration était fausse ou qu'il avait agi « délibérément sans se soucier de la fausseté ou de la véracité de ses propos ».[5]
Cette décision a été étendue par la suite jusqu’aux « personnalités publiques », en plus des agents publics. [6] La norme à remplir pour prouver la diffamation reste cependant plus faible, concernant les intérêts privés des particuliers. [7] La diffamation des particuliers peut être établie si les déclarations formulées étaient fausses et ont porté atteinte à la réputation de la personne sans l'intention effective de nuire. Seuls les particuliers et non les groupes peuvent être diffamés.
Même dans les cas où les tribunaux jugent coupable de diffamation, aucune sanction pénale n'est affligée. En revanche, les tribunaux peuvent exiger que l'orateur publie une correction de ses propos diffamatoires et/ou compense financièrement la victime.
Obscénités
L'obscénité peut être limitée conformément au Premier Amendement, mais il y a eu un long débat à propos de ce qui constitue l'obscénité et comment cette dernière devrait être régie. La Cour suprême des États-Unis a défini, en 1973, l’obscénité comme étant, pour une personne normale et selon les normes contemporaines de la société, 1) un appel à la luxure, 2) représentant ou décrivant, d'une façon manifestement offensante, un comportement sexuel, et 3) qui pris dans son ensemble, manque d'une valeur littéraire, artistique, politique ou scientifique sérieuse.
Un tribunal examine chaque élément individuellement et ne classifiera pas les propos comme obscènes, à moins que tous les facteurs précités existent. Par exemple, si un livre utilise un langage grossier et dépeint une conduite sexuelle mais, pris dans son ensemble, ne fait pas appel à la luxure ou a une valeur littéraire, il n'est pas considéré obscène. [9] Compte tenu de ces normes élevées, il est rare que la justice considère des propos obscènes.
Discours haineux
Les discours haineux - généralement définis comme des propos nuisant à une personne ou à un groupe de personnes, dirigés contre toute race et origine ethnique, le genre, la religion, l'orientation sexuelle ou un handicap - bénéficie de la pleine protection du Premier Amendement. Tout discours visant à inciter à la violence imminente ou menaçant de façon crédible des individus, peut être cependant restreint comme indiqué ci-dessus.
Alors que les États-Unis ne limitent pas les discours haineux, ils estiment que l'arme la plus efficace de lutte contre les discours haineux n'est pas la suppression, mais un contre-discours tolérant, sincère et intelligent.
L'interdiction de discours intolérants ou injurieux peut être contreproductive, rehaussant la dimension des propos offensants et entraînant la propagation dangereuse, et parfois cachée, d'idéologies haineuses. La solution est la persuasion et non la réglementation.
Les fortes protections constitutionnelles aux États-Unis en matière de liberté d'expression ne signifient pas que le pays reste assis sans rien faire pendant que les individus et groupes cherchent à répandre des propos haineux toxiques. Au contraire, les États-Unis déploient un ensemble de politiques visant à atteindre les communautés affectées, à fournir des services de règlement des différends et à renforcer le dialogue.
L'INTERVENTION DU GOUVERNEMENT PAR OPPOSITION À L'INTERVENTION PRIVÉE
Le Premier Amendement protège les citoyens contre les restrictions gouvernementales à la liberté d'expression. Il ne s'applique pas aux situations où un particulier limite la liberté d'expression. Un employeur du secteur privé, par exemple, peut interdire à ses employés de divulguer les secrets commerciaux de l'entreprise. Néanmoins, ces employés bénéficient de la protection du Premier Amendement en ce qui concerne les activités du gouvernement.

[1]Voir Hustler Magazine, Inc. v. Falwell, 485 U.S. 46, 50 (citing Abrams v. United States, 250 U.S. 616, 630 (1919) (Holmes, J., dissenting)).
[2] Perry Educ. Ass'n v. Perry Educators' Ass'n, 460 U.S. 37, 45 (1983).
[3] Brandenburg v. Ohio, 395 U.S. 444, 446 (1969).
[4] Id. at 447.
[5] New York Times Co. v. Sullivan, 376 U.S. 254, 279 80 (1964).
[6] Gertz v. Robert Welch, Inc., 418 U.S. 323 (1974).
[7] Dun & Bradstreet, Inc. v. Greenmoss Builders, Inc., 472 U.S. 749 (1985) (pluralité des opinions).
[8] Miller v. California, 413 U.S. 15 (1973).
[9] Voir United States v. One Book Called "Ulysses", 5 F. Supp. 182 (S.D.N.Y. 1933).


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