dimanche 29 mai 2011

Moyen-Orient et Afrique du Nord: Les femmes paient le prix des soulèvements du Printemps arabe

Les membres de l’IFEX ont célébré la semaine dernière la remise en liberté de deux femmes journalistes au Moyen-Orient et en Afrique du Nord. La journaliste d’Al Jazira Dorothy Parvaz, qui était détenue au secret depuis son arrivée le 29 avril en Syrie où elle s’était rendue pour couvrir les manifestations antigouvernementales, a été remise en liberté après avoir été déportée en Iran. Pour sa part, Clare Morgana Gillis, reporter américaine qui couvrait la Libye pour le site web du magazine « The Atlantic », a été libérée après plus d’un mois de détention. Petite victoire pour la libre expression. Mais cela illustre aussi les risques immenses que courent les femmes sorties du rang pour se porter à l’avant-garde des soulèvements du Printemps arabe, disent les membres de l’IFEX. Les femmes journalistes et les militantes qui ne travaillent pas pour les médias internationaux n’ont pas autant de chance.
À son retour, Parvaz a déclaré avoir vécu une « expérience terrifiante » pendant sa détention en Syrie. « J’ai été pendant trois jours dans un centre de détention en Syrie et tout ce que j’entendais, c’étaient des cris des gens qu’on tabassait sauvagement. Je ne sais pas ce que ces hommes ont fait », a-t-elle déclaré à Al Jazira. « J’ai été menottée de manière répétée, on m’a bandé les yeux, j’ai été emmenée dans la cour de la prison où on m’a laissée là pour que j’entende ces hommes se faire battre. »
Selon Human Rights Watch, la ville de Deraa a subi le plus gros de la violente répression des autorités syriennes, mais l’armée a aussi procédé à travers tout le pays à une vague d’arrestations de militants, d’avocats et de manifestants, dont beaucoup de femmes et d’enfants. Les forces de sécurité ont détenu 11 femmes à cause de leur participation le 30 avril à une manifestation de protestation silencieuse, où il n’y avait que des femmes, près du centre de Damas, selon ce que rapporte Human Rights Watch. Un témoin a déclaré que les forces de sécurité ont tabassé les femmes pour les disperser.
Nulle part peut-être les risques pour les militantes ne sont plus grands qu’à Bahreïn, où pour la première fois, une femme a été condamnée à quatre ans de prison pour son rôle dans les manifestations. Fadhila Moubarak Ahmed a été reconnue coupable la semaine dernière d’avoir offensé un fonctionnaire, d’incitation à la haine du système politique au pouvoir et d’avoir participé à des manifestations illégales, indique le Centre des droits de la personne de Bahreïn (Bahrain Center for Human Rights, BCHR).
Les femmes comme Ahmed se sont retrouvées en première ligne depuis les tout premiers jours des manifestations, en février. Elles ont fait partie de la première vague qui est descendue au square de la Perle à Manama, « assumant les rôles de gestion, se portant au secours - et traitant - les personnes blessées par... les forces de sécurité bahreïnies, et documentant les brutalités commises contre les manifestants », dit le BCHR.
Le BCHR dénonce avec vigueur la répression et la détention des femmes de Bahreïn, qu’il décrit comme le moyen par lequel les autorités forcent les femmes à abandonner leur rôle dans le mouvement de protestation. « C’est aussi un moyen d’ajouter de la pression sur l’opposition pour qu’elle retire ses demandes légitimes », dit le BCHR.
*Selon le BCHR, cependant, un nombre sans précédent de femmes ont été arrêtées par les forces de sécurité - plus de 100 depuis la proclamation de la loi martiale le 15 mars - et le tiers d’entre elles au moins sont toujours détenues. Un bon nombre d’entre elles sont médecins, infirmières et enseignantes. Des filles même sont détenues et priées d’identifier les dissidents dans leurs écoles. De plus, dit le BCHR, ce nombre ne comprend que celles qui se sont donné la peine de s’avancer.
Celles qui sortent de détention font état de mauvais traitements et de torture. La poète Ayat Qurmuzi a été torturée pour lui faire « avouer » devant les caméras des gestes qu’elle n’a pas commis. D’autres ont été contraintes de faire du « travail de femmes », comme de nettoyer les latrines et le mobilier du centre de détention, rapporte le BCHR.
Bien que Zainab al-Khawaja ait échappé à la détention, elle a été traînée au bas des escaliers et menacée de mort lorsque les forces de sécurité se sont présentées chez elle et ont arrêté son père, l’ancien président du BCHR Abdulhadi al-Khawaja, de même que son mari et son beau-frère. Dans les cas où les forces de sécurité ne peuvent trouver ceux qu’elles recherchent, les membres de leur famille, surtout l’épouse ou la mère, sont menacées ou même torturées jusqu’à ce qu’elles révèlent les allées et venues de leur mari ou de leur fils.

Pendant qu’il se trouvait en détention, al-Khawaja lui-même a été agressé sexuellement et s’est fait dire que ses filles Zainab et Maryam, une militante du BCHR qui avait été entendue récemment devant le congrès des États-Unis sur la situation à Bahreïn, seraient violées elles aussi, selon ce que rapporte le BCHR.
Et des centaines d’autres ont perdu leur emploi à cause de leurs opinions politiques. « Cela place un grand nombre de femmes dans une situation de crise financière, celles en particulier dont le mari a été arrêté, ce qui fait d’elles les pourvoyeuses de la famille et des enfants », dit le BCHR.
Selon le BCHR, ces attaques sans précédent contre les femmes ont fait de Bahreïn le pire pays de la région pour ce qui est des femmes arrêtées pour avoir exprimé des opinions politiques. Une femme a même été abattue par un tireur embusqué pendant les manifestations, dit le BCHR.
Malheureusement, Bahreïn est emblématique de ce qui se passe dans toute la région. Dans une affaire notoire survenue en Libye, une femme, Iman al-Obeidi, a rapporté avoir été violée par une quinzaine environ de miliciens pro-Kadhafi. On a rapporté un certain nombre de viols en Égypte pendant la révolution au square Tahrir - une journaliste sud-africaine qui travaille pour le réseau américain CBS, Lara Logan, est l’une des rares femmes qui ont révélé publiquement avoir subi une agression sexuelle.
Même en Égypte, après le changement de régime, les attaques se poursuivent. Nehad Abu-al-Qumsan, présidente du Centre égyptien de défense des droits des femmes (Égyptian Center for Women’s Rights) et épouse de Hafez Abou Seada, qui dirige l’Organisation égyptienne de défense des droits de la personne (Egyptian Organization for Human Rights, EOHR), a reçu une lettre la menaçant de mort si elle poursuit sa campagne en faveur des droits des femmes - une lettre écrite apparemment par des salafis, qui adhèrent à une version stricte de la charia. Les femmes qui ont manifesté le 8 mars pour la Journée internationale des Femmes ont été menacées et se sont fait dire de rentrer chez « et de faire la lessive », rapportent des blogueurs égyptiens.
En Arabie saoudite, qui jusqu’à maintenant a évité les manifestations de masse qui ont renversé ou menacé les autocrates des pays voisins, les femmes sont également attaquées parce qu’elles osent passer outre aux règles.
Poussée par les soulèvements, Manal al-Sharif est montée dans sa voiture et s’est rendue participer aux manifestations, défiant l’interdit des femmes au volant, en vigueur dans le royaume. Elle a affiché sur YouTube une séquence vidéo où on la voit au volant et décrivant les inconvénients pour les femmes qu’il y a à ne pas pouvoir conduire. Al-Sharif a été arrêtée le 22 mai et inculpée d’avoir entaché la réputation du royaume à l’étranger et d’ameuter l’opinion publique, indique Human Rights Watch.
D’après le Réseau arabe d’information sur les droits de la personne (Arabic Network for Humain Rights Information, ANHRI), le blogue de la blogueuse et activiste saoudienne Omaima Al Najjar a été bloqué après qu’elle eut affiché en ligne son appui à al-Sharif.
Mais au lieu d’être découragées par la répression de leurs homologues à Bahreïn et ailleurs, les Saoudiennes ont repris le flambeau. Elles ont entrepris une campagne intitulée « les femmes conduisent », pour conquérir le droit de conduire des voitures, et disent préparer pour le 17 juin une balade symbolique de protestation.
Les protestations du Printemps arabe « ont appris aux Saoudiennes à se serrer les coudes et à agir en équipe », a déclaré à Bloomberg News Wajeeha al-Howeider, une militante saoudienne des droits des femmes.
Le « moment est parfait », dit Noura Abdullah, qui a été arrêtée pour avoir défié publiquement en 1990 l’interdit de conduire visant les femmes. « L’élan est maintenant donné en Arabie saoudite et cela devrait aider. »
Source: Communiqué de l'IFEX

mardi 17 mai 2011

Le couple Obama célèbre la poésie à la Maison-Blanche

Washington - On le ressent au travers de ses discours électoraux ou au choix de ses lectures : le président Obama est sensible aux charmes de la poésie.
Le 11 mai, la Maison-Blanche a organisé une série de manifestations en hommage à la poésie américaine. Michelle Obama, l'épouse du président, avait notamment invité des groupes d'élèves à la Maison-Blanche pour qu'ils puissent lire leurs créations et recevoir des conseils de la part de poètes, au nombre desquels figuraient les poètes officiels Rita Dove et Billy Collins, et d'artistes de renom, tels Common et Aimee Mann. Dans la soirée, ces écrivains ont donné lecture de leurs poèmes en présence du président Obama.
« Un bon poème, a dit le président, résonne au plus profond de nous, il nous fait réfléchir et nous apprend quelque chose sur nous-mêmes et sur le monde dans lequel nous vivons. Les poètes ont toujours joué un rôle important dans la narration de l'histoire de notre pays. » Le président Obama a confié à son auditoire qu'il avait lui-même composé des vers pendant sa jeunesse et, non sans humour, il a dit à ses invités qu'il n'en ferait pas lecture ce soir-là.
Le goût du président pour cette forme d'expression fait le bonheur des poètes américains, qui n'ont pas oublié que Barack Obama avait émaillé des discours électoraux de vers tirés du poème de June Jordan « Poem for South African Women » ou que, juste après avoir été élu, il portait sur lui un recueil de Derek Walcott, « The Collected Poems ». La poète Elizabeth Alexander avait elle-même trouvé extraordinaire, comme elle l'avait confié à la Poetry Foundation, qu'à cette période tumultueuse de son existence « il prenait le temps de se recueillir en se tournant vers la poésie ».
« À chaque fois que notre pays s'est trouvé face à une tragédie », a dit le président en donnant le coup d'envoi de la soirée de la poésie à la Maison-Blanche, « que ce soit au moment de la disparition d'un dirigeant du mouvement des droits civiques, de l'équipage d'une navette spatiale ou de milliers d'Américains qui nous ont quittés un beau jour de septembre, nous nous sommes tournés vers la poésie quand les mots nous manquaient pour exprimer ce que nous ressentions ».
Par Mark Trainer
Rédacteur
(Les articles du site «IIP Digital» sont diffusés par le Bureau des programmes d'information internationale du département d'Etat. Site Internet : http://iipdigital.usembassy.gov/iipdigital-fr/index.html)

dimanche 15 mai 2011

Joe Biden : les relations sino-américaines marqueront le XXIe siècle

Washington - Alors que se déroulait à Washington le troisième Dialogue stratégique et économique annuel entre les États-Unis et la Chine, le vice-président Joe Biden a déclaré, le 9 mai, qu'en raison de l'importance extrême que revêtait la coopération entre les deux plus grandes économies mondiales sur les principaux enjeux planétaires - commerce extérieur, changements climatiques et sécurité notamment - leurs relations allaient sans aucun doute marquer l'histoire du XXIe siècle.
Lors d'un entretien avec le vice-premier ministre chinois Wang Qishan, le conseiller d'État chinois Dai Bingguo, la secrétaire d'État Hillary Clinton et le secrétaire au Trésor Timothy Geithner, M. Biden a tout d'abord souligné que les dialogues annuels entamés en 2009 visaient à « construire des relations dans tout l'éventail des activités de nos deux gouvernements » et à aborder « certains des problèmes déterminants de notre époque ».
« La façon dont nous coopérerons définira dans une mesure significative la manière dont nous ferons face aux défis qui se présentent au monde au début du XXIe siècle », a dit le vice-président.
Observant que les États-Unis et la Chine étaient les premiers producteurs et consommateurs mondiaux d'énergie, il a dit que ce fait soulevait des difficultés communes mais présentait également « une occasion extraordinaire de collaborer à la recherche de solutions axées sur l'énergie propre ».
Selon M. Biden, les deux pays ont besoin de s'entendre sur des modes de coopération là où leurs intérêts mutuels convergent, et ils doivent discuter pareillement des sujets où il existe des « désaccords sérieux », par exemple en matière de droits de l'homme.
Le gouvernement Obama est convaincu que la défense des droits fondamentaux et des libertés publiques - tels que les définissent les engagements internationaux pris par la Chine, notamment la Déclaration universelle des droits de l'homme, ainsi que la constitution même de la Chine - constitue « le meilleur moyen de promouvoir la stabilité et la prospérité à long terme de n'importe quelle société », a affirmé M. Biden.

Pour sa part, Mme Clinton a indiqué que les États-Unis continueraient d'aborder la question épineuse des droits de l'homme avec la Chine « de façon honnête et directe », comme il convient de le faire entre pays amis.
La secrétaire d'État s'est inquiétée des informations selon lesquelles des avocats de l'assistance publique judiciaire, des écrivains, des artistes et d'autres personnalités auraient disparu ou auraient été détenus par les autorités chinoises. Le gouvernement Obama, a-t-elle dit, est particulièrement préoccupé par les conséquences que pourraient avoir les pratiques chinoises en matière de droits de l'homme « sur notre politique intérieure et sur la politique et la stabilité de la Chine et de toute la région ».
« Nous savons, par la longue expérience de l'histoire humaine, que les sociétés qui s'efforcent de respecter les droits de la personne sont plus prospères, plus stables et plus dynamiques », a déclaré Mme Clinton.
Les deux pays doivent s'appliquer davantage à mieux se comprendre et à renforcer encore la confiance afin d'éliminer les craintes et les impressions erronées que certains de leurs citoyens ressentent les uns envers les autres.
« Certains, chez nous, voient les progrès de la Chine comme une menace pour les États-Unis. Certains, en Chine, se demandent si les États-Unis ne cherchent pas à restreindre la croissance chinoise. Ces deux points de vue, nous les rejetons. Nous avons beaucoup plus à gagner de la coopération que du conflit », a déclaré la secrétaire d'État.
Et d'ajouter : « Une Amérique prospère est dans l'intérêt de la Chine, et une Chine dynamique est dans l'intérêt de l'Amérique. Cependant, pour travailler ensemble, il nous faut mieux comprendre nos intentions et nos intérêts réciproques. Nous devons également démystifier nos plans et nos aspirations à long terme. »
Par Stephen Kaufman
Rédacteur
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jeudi 12 mai 2011

Michelle Bachelet : médecin, stratège militaire et chef d'État

C'est grâce à son courage et à sa détermination au moins autant qu'aux circonstances qu'une femme médecin reconvertie dans la politique est devenue la première présidente du Chili, avant d'agir aujourd'hui en faveur de l'égalité des sexes dans le monde.
Agnostique déclarée. Divorcée, mère de trois enfants. Chanteuse de musique folk à ses heures : dans un pays aussi religieux et conservateur que le Chili, le docteur Michelle Bachelet n'avait a priori rien du profil du politicien idéal.
Mais la première femme à avoir été élue démocratiquement à la tête d'un pays d'Amérique du Sud n'a jamais eu peur des contradictions. Elle a su au contraire les mettre à profit.
« Nous avons ouvert les portes et les fenêtres pour laisser entrer les citoyens ordinaires, pour les encourager à participer », a-t-elle déclaré au New York Times, à propos des diverses facettes de son passé qui l'ont finalement aidée à se faire élire présidente.
Ancienne prisonnière politique devenue membre du gouvernement, Mme Bachelet s'est employée, en qualité de ministre puis de présidente, à établir une démocratie stable pendant la transition qui a suivi la dictature militaire répressive du général Augusto Pinochet.
Médecin de formation - épidémiologiste et pédiatre - sa propension à soigner se double d'un talent de stratège militaire, peut-être encore plus prononcé. Elle a étudié les sciences militaires à l'Académie nationale d'études stratégiques et politiques du Chili et au Collège interaméricain de défense de Washington. Elle a remporté la course à la présidence dès sa première campagne.
Et à 59 ans, Mme Bachelet n'est pas près d'avoir fini sa carrière. Récemment nommée à la tête du nouvel organisme des Nations unies, ONU-Femmes, elle poursuit inlassablement son chemin - cette fois au premier rang de la lutte mondiale pour l'égalité des sexes.
« J'ai appris, dans ma famille, que tous les individus devraient avoir les mêmes chances et que la justice et la dignité étaient essentielles. C'est donc dans mes gènes de croire que les gens ont des droits et de penser que nous sommes tous différents et que c'est une très bonne chose car c'est ce qui fait que le monde est plus intéressant », a-t-elle expliqué dans un entretien avec Barbara Crossette publié dans la revue The Nation.
Ces idéaux ont été mis à rude épreuve en 1973 lorsque le président de l'époque, Salvador Allende, a été chassé du pouvoir par le militaire Pinochet. Le père de Mme Bachelet, un général de l'armée de l'air haut placé dans le gouvernement d'Allende, a été placé en détention militaire pour trahison. Il est mort d'une crise cardiaque après avoir été torturé.
Cela n'a en rien atténué l'engagement politique de Mme Bachelet. Elle s'est au contraire davantage investie dans le Mouvement de la jeunesse socialiste. Ce n'est que lorsque sa mère et elle ont quitté le pays pour l'Australie en 1975, après avoir été incarcérées dans des centres de torture du régime de Pinochet, qu'elle a réduit ses activités.

Malgré ce qu'elle a subi pendant ces premières années d'engagement politique, Mme Bachelet s'est par la suite délibérément employée à remédier aux inégalités de la société chilienne. Après avoir été nommée ministre de la Santé en 2000, sous la présidence de Richard Lagos, elle a amélioré l'accès de la population au système de santé public. En 2002, elle est devenue la première femme ministre de la Défense d'Amérique latine. Elle a alors activement favorisé la réconciliation de l'armée et de la société civile, en réformant et en modernisant l'armée chilienne.
« Parce que j'ai été victime de la haine, j'ai consacré ma vie à transformer la haine en compréhension, en tolérance et - pourquoi ne pas le dire - en amour », a-t-elle déclaré dans le discours qui a suivi sa victoire à l'élection présidentielle de 2006.
Bien qu'elle ait commencé sa carrière comme médecin, avant de rapidement monter en grade jusqu'à devenir ministre de la santé, Mme Bachelet a toujours été influencé par la carrière militaire de son père.
« J'ai remarqué que l'incompréhension entre le monde militaire et le monde civil était l'un des obstacles à une véritable démocratie. Ils parlaient différentes langues. Je voulais remédier à cette situation. Je pouvais servir d'intermédiaire entre ces deux mondes », a-t-elle déclaré au Guardian à propos des études postsecondaires qu'elle a entreprises dans le domaine des sciences militaires et qui l'ont conduite à devenir la première femme ministre de la Défense du Chili en 2002.
Malgré tous ses succès, Mme Bachelet n'a pas toujours fait l'unanimité. Elle a été abondamment critiquée pour la politique de son gouvernement en matière d'éducation, ainsi que pour l'échec d'un ambitieux projet de transports publics et une série de conflits du travail sans fin. Mais sa cote de popularité, qui dépassait 84 % lorsqu'elle a quitté ses fonctions en mars 2010, est la plus élevée de tous les présidents de l'histoire du Chili.
Ce succès n'a en rien entamé sa détermination à relever le prochain défi qui l'attend. En juillet 2010, le secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon l'a nommée à la tête du nouvel organisme des Nations unies, ONU Femmes.
Peu après sa nomination, Radio ONU a diffusé une interview dans laquelle Mme Bachelet n'hésitait pas à décrire les difficultés auxquelles elle faisait face dans son nouveau rôle. « Dans de nombreuses régions du monde, la situation des femmes est très difficile. Elles n'ont pas les mêmes possibilités que les hommes en ce qui concerne les droits les plus fondamentaux. Elles sont victimes de discrimination, leurs droits sont bafoués. Il existe encore des endroits où les femmes sont mutilées. Je suis convaincu que nous devons travailler sans relâche pour améliorer leur condition et je sais qu'il s'agit ... d'un travail très difficile ».

algré tous les honneurs qu'elle a reçus dans son rôle de femme chef d'État, Mme Bachelet ne s'est jamais départie de la vision d'un avenir meilleur qui l'animait lorsque, jeune et idéaliste, elle combattait le régime oppressif qui avait tué son père.
Comme elle l'a expliqué au New York Times, « Ce qui m'intéresse le plus, ce que je continue de privilégier, c'est moins de se pencher sur le passé que de créer un meilleur avenir ».
Par Karen Calabria
Karen Calabria est une journaliste indépendante basée à New York.
(Diffusé par le Bureau des programmes d'information internationale du département d'Etat. Site Internet : http://iipdigital.usembassy.gov/iipdigital-fr/index.html)

lundi 9 mai 2011

International / Journée mondiale de la liberté de la presse: Journée mondiale de la Liberté de la presse 2011 : Les médias du XXIe siècle - Nouvelles

Le mois dernier, le blogueur et activiste égyptien Maikel Nabil Sanad a été condamné à trois ans de prison pour avoir insulté l'armée et avoir publié de fausses nouvelles à son sujet. Son crime était d'avoir écrit récemment un blogue qui critiquait l'absence de transparence dans l'armée.
Ce mois-ci, plus de 800 participants de partout dans le monde convergent vers Washington afin d'explorer l'idée que, de la même manière que les nouveaux médias servent à promouvoir la liberté, certains régimes créent des moyens de supprimer les voix en ligne. L'occasion, c'est la Journée mondiale de la Liberté de la presse de l'UNESCO, qui se tient chaque année le 3 mai, dont le thème cette année est : Les médias du XXIe siècle : Nouvelles frontières. De nombreux groupes membres de l'IFEX comptent parmi ceux qui assistent à la fête.
« Grâce aux nouvelles technologies et aux nouveaux médias, nous bénéficions de possibilités d'expression sans précédent. De plus en plus de gens peuvent partager les informations et échanger leurs vues, à l'intérieur et au-delà des frontières nationales. C'est là un avantage pour la créativité, pour des sociétés en santé, pour inclure tout le monde dans de nouvelles formes de dialogue », disent le Secrétaire général des Nations Unies Ban Ki-moon, la Haut Commissaire des Nations Unies aux Droits de l'homme Navi Pillay, et Irina Bokova, Directrice générale de l'UNESCO, dans une déclaration commune.
Dans un nouveau rapport publié pour le 3 mai, ARTICLE 19 reprend le thème de l'UNESCO et nous donne des histoires sur la façon dont les obstacles s'écroulent quand il est question de liberté de parole et de circulation de l'information.
Par exemple, l'année 2010 a été l'année de WikiLeaks, qui a « révolutionné le lancement transnational d'alertes », dit ARTICLE 19. Oui, on s'est servi de Twitter pour organiser des manifestations de protestation en Tunisie et en Égypte, mais ARTICLE 19 attire aussi l'attention sur un groupe d'étudiants en journalisme dans une favela de Rio de Janeiro, au Brésil, qui s'est servi de Twitter pour dire au monde que 42 personnes ont perdu la vie récemment dans une descente liée à la drogue. Le site @vozdacomunidade a fourni le seul et unique reportage qui est parvenu de l'intérieur de la favela.

Grâce aux nouveaux médias, « l'outrage et la honte se répandent également, la corruption est amplifiée, le pouvoir populaire est amplifié, et les gouvernements tombent », dit ARTICLE 19.
Mais, en même temps, « de nombreux gouvernements, qui redoutent ce manque de contrôle, s'efforcent de restaurer ou de fortifier les obstacles afin de retracer, de bloquer, de cibler et de censurer ceux qui se font les champions de la vérité », indique ARTICLE 19. Le rapport du groupe met aussi en lumière des cas où des gouvernements répliquent, des autorités qui interdisent YouTube en Turquie jusqu'à la Corée du Nord qui contrôle la propriété des téléphones mobiles.
Dans un document spécial sur la Journée mondiale de la Liberté de la presse, le Comité pour la protection des journalistes (CPJ) a procédé à l'évaluation des 10 stratégies les plus utilisées pour la répression en ligne et désigné les pays qui battent la marche dans ce domaine. Les techniques vont bien au-delà de la censure du web. Il y a par exemple en Chine les courriels soutenus par l'État, conçus pour s'emparer des ordinateurs personnels des journalistes, la fermeture de la technologie de lutte contre la censure en Iran, le contrôle monopoliste de l'Internet en Éthiopie, et les cyber-attaques soigneusement planifiées contre les sites web de nouvelles au Bélarus.
Selon le CPJ, ce qui surprend le plus au sujet des 10 oppresseurs en ligne, ce n'est pas qui ils sont - ce sont tous des pays qui ont des dossiers effarants de répression - mais la rapidité avec laquelle ils ont adapté de vieilles stratégies au monde en ligne, comme la Syrie qui emprisonne les écrivains en ligne, et la violence avec laquelle on s'attaque aux blogueurs en Russie. Au 1er décembre, 69 journalistes dont le travail a paru surtout en ligne étaient en prison, ce qui représente près de la moitié de tous les journalistes en prison, rappelle le CPJ.

D'après Human Rights Watch, la peine de trois ans de prison infligée à Nabil pourrait constituer le pire coup porté à la libre expression en Égypte depuis que le gouvernement Moubarak avait incarcéré son premier blogueur, Kareem Amer, condamné en 2007 à quatre ans de prison. La sentence est non seulement sévère, mais elle a été infligée par un tribunal militaire au terme d'un procès inique.
Une nouvelle coalition de groupes de défense des droits en Égypte, comprenant le Réseau arabe d'information sur les droits de la personne (Arabic Network for Human Rights Information, ANHRI) et l'Institut du Caire pour les études sur les droits de la personne (Cairo Institute for Human Rights Studies, CIHRS), espère que le gouvernement de transition rompra avec ce genre de procès militaires et avec d'autres pratiques répressives du passé. La Coalition nationale de la liberté des médias profite de l'occasion de la Journée mondiale de la Liberté de la presse pour dévoiler une « Déclaration de la liberté des médias » - sa vision de la façon de développer et de libérer les médias égyptiens.
D'après le directeur général de Human Rights Watch, Kenneth Roth, préparer une défense constitue la seule bonne chose à faire, surtout au moment où nous jouissons des progrès réalisés récemment. « Pour le moment, les forces de la liberté ont le dessus. Mais la vigilance reste de mise avant l'inévitable réaction », dit-il.

Roth presse Facebook et Twitter de joindre les rangs de l'Initiative de Réseau mondial (Global Network Initiative), laquelle consiste en un code de conduite volontaire mis au point par Google, Yahoo! et Microsoft, conjointement avec Human Rights Watch et d'autres organisations non gouvernementales, dont le CPJ, Index on Censorship et le Comité mondial pour la liberté de la presse, qui sont membres de l'IFEX. Cette initiative facilite la résistance que les sociétés commerciales peuvent opposer aux exigences des gouvernements qui veulent qu'elles révèlent l'identité des utilisateurs anonymes ou qui veulent bloquer toute discussion de certains sujets.
Les gouvernements sympathiques à la cause de la liberté d'expression ont aussi un rôle à jouer. « Les entreprises de médias sociaux pourraient mieux résister aux exigences répressives si l'acquiescement était interdit par la loi », dit Roth. « Ces gouvernements devraient aussi financer une gamme étendue de technologies et d'initiatives visant à faire échouer la censure. »
« Les gouvernements pourraient en outre rechercher des moyens créatifs de combattre la censure, par exemple en incluant la liberté de l'Internet dans les ententes commerciales, comme c'est le cas actuellement pour les droits du travail », a-t-il ajouté.
À l'occasion de la Journée mondiale de la Liberté de la presse, « la révolution des médias suscite de nouveaux débats sur la liberté d'expression, sur la nature de la réglementation, sur l'équilibre entre l'expression et la responsabilité », dit l'ONU. « Nous ne devons pas hésiter à examiner ces questions sous tous les angles. Nous devons tous nous montrer à la hauteur de la situation et accepter la responsabilité du changement. »
Source: Communiqué de l'IFEX

Obama s'explique sur sa décision ne pas rendre publiques les photos de Ben Laden

La Maison-Blanche
Bureau du secrétaire de presse
Le 4 mai 2011
Conférence de presse du secrétaire de presse Jay Carney
(Extrait)
M. CARNEY : Mesdames et Messieurs, bonjour. Avant de répondre à vos questions, je voudrais vous faire savoir que le président a pris la décision de ne rendre publique aucune photographie de la dépouille mortelle d'Oussama Ben Laden. Et je souhaiterais vous citer les paroles mêmes du président lors de l'interview qu'il a accordée il y a une heure environ pour expliquer sa décision.
Il s'agit d'un entretien avec Steve Kroft pour l'émission « 60 minutes » de CBS. La discussion portait sur le moment où le corps de Ben Laden a été retiré du complexe, et M. Kroft a demandé au président comment on savait que c'était bien lui. Le président a répondu :
« Lorsqu'ils ont atterri, nous avions une confirmation très nette à ce moment-là que c'était lui. Des photographies avaient été prises. Une analyse faciale a indiqué que c'était réellement lui. Nous n'avions pas encore effectué les analyses d'ADN, mais déjà nous étions sûrs à 95 %.

Question - Avez-vous vu ces photographies ?
Le président - Oui.

Question - Quelle a été votre réaction quand vous les avez vues ?
Le président - C'était lui.

Question - Pourquoi ne les avez-vous pas rendues publiques ?
Le président - Nous en avons discuté entre nous. Comprenez bien que nous sommes absolument certains que c'était lui. Nous avons recueilli et analysé des échantillons d'ADN et il ne fait aucun doute que nous avons tué Oussama Ben Laden. Il est important, à notre avis, d'empêcher que des photos brutes d'une personne qui a été atteinte à la tête n'aillent flotter n'importe où, pour inciter à plus de violence ou servir d'outil de propagande. Cela ne cadre pas avec nos valeurs. Nous n'allons pas exhiber ce genre de chose comme trophée.
Le fait est qu'il s'agit de quelqu'un qui méritait la justice qu'il a reçue, et je pense que les Américains et les gens de par le monde sont contents qu'il ne soit plus là. Mais nous n'avons pas besoin d'enfoncer le clou. Et je pense que vu le caractère très cru de ces photos, cela pourrait créer un risque sur le plan de la sécurité nationale. J'en ai parlé à Bob Gates et à Hillary Clinton, qui sont tous deux d'accord.

Question - Il y a des gens au Pakistan, par exemple, qui disent que tout cela n'est qu'un tissu de mensonges, une nouvelle supercherie américaine. Oussama n'est pas mort.
Le président - La vérité est que nous guettions la réaction mondiale. Il ne fait aucun doute que Ben Laden est mort. Cela ne fait certainement aucun doute parmi les membres d'Al-Qaïda. Par conséquent, nous ne pensons pas qu'une photographie puisse, en soi, y changer quoi que ce soit. Il y a des gens qui vont le nier. Mais le fait est que vous ne verrez plus Ben Laden marcher encore sur cette terre. »
Ainsi se conclut cet extrait. Je pense qu'il présente de façon assez complète les raisons pour lesquelles le président a pris la décision qu'il a prise. Je suis prêt à répondre à vos questions.
(Diffusé par le Bureau des programmes d'information internationale du département d'Etat. Site Internet : http://iipdigital.usembassy.gov/iipdigital-fr/index.html)

jeudi 5 mai 2011

Libye: Les membres de l'IFEX rendent hommage aux photojournalistes qui ont perdu la vie la semaine dernière

Les photographes de guerre Chris Hondros et Tim Hetherington ont été tués la semaine dernière tandis qu'ils couvraient les combats entre les forces pro-Kadhafi et les rebelles pour le contrôle de la ville libyenne de Misrata. Deux autres journalistes, Guy Martin, un Anglais qui travaille pour l'agence de photos Panos, et Michael Christopher Brown, photojournaliste chez Corbis, ont été blessés gravement par le même tir de mortier. Les membres de l'IFEX ont rendu hommage aux journalistes et mettent régulièrement à jour les nouvelles sur la situation de la libre expression en Libye.
Hetherington a remporté plusieurs récompenses distinguées, dont le Prix mondial de la Photo en 2007 pour sa couverture des conflits au cours de la dernière décennie. Il a aussi co-réalisé « Restrepo », un documentaire mis en nomination pour un Oscar, qui traite des soldats des États-Unis en guerre en Afghanistan.
Au fil des ans, Human Rights Watch a travaillé avec Hetherington sur un certain nombre d'histoires portant sur les droits de la personne, notamment lors d'assignations au Darfour, au Tchad et au Sri Lanka. « Tim Hetherington était beaucoup plus qu’un correspondant de guerre », a dit Kenneth Roth, directeur général de Human Rights Watch, dans l'hommage qu'il lui a rendu. « Il avait un talent extraordinaire pour documenter, avec un style imagé et plein de compassion, les drames humains qui se cachent derrière les manchettes. »
« C'est une perte dévastatrice pour beaucoup d'entre nous sur le plan personnel », a déclaré Roth. « Mais c'est aussi une perte dévastatrice pour la communauté des droits de la personne. Son travail a rehaussé la visibilité de nombreux conflits oubliés dans le monde. Le legs que constituent ses photographies exceptionnelles saura inspirer ceux qui marcheront dans ses pas. »
Source: Communiqué de l'IFEX

mardi 3 mai 2011

Introduction du Rapport sur les droits de l'homme dans le monde en 2010

Département d'État des États-Unis
Bureau de la démocratie, des droits de l'homme et du travail
Rapport sur les droits de l'homme dans le monde en 2010
Le présent rapport fournit des détails très amples sur la situation des droits de l'homme dans plus de 190 pays au cours de l'année 2010. Toutefois, du fait que nous faisons paraître ce rapport trois mois après le début de l'année 2011, nos perspectives sur de nombreuses questions sont maintenant influencées par les changements considérables qui se produisent actuellement dans des pays du Moyen-Orient. À l'heure actuelle, nous ne pouvons pas prévoir le résultat de ces changements et nous n'en connaîtrons pas les effets durables pendant des années. Comme la dynamique interne de chacun de ces pays est différente, il ne convient pas de procéder à une analyse globale pour toute la région. Dans des pays tels que la Tunisie et l'Égypte, on observe que la population réclame une participation importante à la vie politique, des libertés fondamentales et de plus grandes possibilités économiques. Ces exigences sont profondes, de source locale et elles sont exprimées par de nouveaux militants, dont un grand nombre sont des jeunes. Ces citoyens cherchent à mettre en place dans leur pays une démocratie durable où les pouvoirs publics respectent les droits de l'homme universels de la population. S'ils y parviennent, la région du Moyen-Orient, ainsi que le reste du monde, connaîtra une amélioration.

Les États-Unis continuent de suivre de près la situation dans ces pays, tout en sachant que le passage à la démocratie n'est pas automatique, qu'il prendra du temps et qu'il exigera une grande attention. En Égypte, nous attendons que l'état d'urgence soit levé, comme le Conseil suprême des forces armées s'est engagé à le faire avant les élections législatives. En Tunisie, nous sommes encouragés par la création d'une commission chargée d'enquêter sur les violations des droits de l'homme qui ont eu lieu pendant le soulèvement.

Si nous abordons ces faits et d'autres répercussions à court terme, les historiens auront l'avantage de disposer de plus de temps et de perspectives plus longues pour nous aider à comprendre ce qui a déclenché ces mouvements populaires. Néanmoins, on peut dire que trois tendances ont nettement contribué à leur naissance et aux autres changements qui ont eu lieu dans le monde entier en 2010. La première est la croissance immense des organisations non gouvernementales qui défendent une vaste gamme de causes relatives à la démocratie et aux droits de l'homme. Il y a cinquante ans, au moment de la création de l'association Amnesty International, peu de pays en dehors de l'Amérique du Nord et de l'Europe de l'Ouest comptaient des associations locales de défense des droits de l'homme. De nos jours, il existe des organisations non gouvernementales (ONG) locales dans presque tous les pays du monde. La croissance de ces organisations a été considérable, et dans de nombreux pays ces organisations composées de citoyens ont été créées en dépit de grandes difficultés et seulement parce que des militants ont été disposés à assumer de grands risques pour eux-mêmes. La secrétaire d'État, Mme Clinton, a mis en évidence l'importance de ces organisations lors du discours qu'elle a prononcé en juillet 2010 à Cracovie (Pologne) devant des représentants de la Communauté des démocraties. Comme elle l'a dit, « les sociétés progressent lorsque les citoyens qui les composent disposent des moyens de transformer des intérêts communs en des actions prises en commun qui servent le bien commun ».

Dans des sociétés fermées, où les gouvernements répressifs cherchent à contrôler et à étouffer le débat sur des questions politiques et sociales délicates, les pouvoirs publics considèrent ces associations locales indépendantes comme une menace plutôt que comme une ressource, et les défenseurs de la démocratie et des droits de l'homme font l'objet d'un traitement particulièrement dur. Par exemple, en Biélorussie, plus de 700 militants de la cause de la démocratie, y compris 7 candidats à la présidence, ont été arrêtés lors de manifestations populaires après l'élection présidentielle de décembre 2010 qui a été entachée d'irrégularités. Dans les semaines qui ont suivi, les bureaux et les domiciles de représentants de la société civile, de journalistes indépendants et de militants politiques ont fait l'objet de perquisitions dans le cadre de mesures visant à empêcher les activités politiques indépendantes et la liberté d'expression.

Au cours des dernières années, plus de 90 États ont cherché à faire adopter des lois et une réglementation restrictives qui entravent la capacité des associations à se constituer, à fonctionner librement ou à recevoir des fonds de l'étranger. Un projet de loi relatif aux ONG déposé en décembre au Cambodge illustre ces démarches. Il prévoit d'appliquer aux ONG de lourdes formalités, de mettre en place des obstacles à la déclaration des ONG étrangères, d'exiger de ces dernières qu'elles collaborent avec les pouvoirs publics et d'interdire les ONG qui ne sont pas déclarées. En Éthiopie, une nouvelle loi sur les associations de la société civile est entrée en vigueur en février après une période de grâce d'un an. Elle interdit aux œuvres caritatives, aux sociétés et aux associations qui reçoivent plus de 10 % de leur financement de sources étrangères d'avoir des activités visant à promouvoir les droits de l'homme et la démocratie, les droits des enfants et des handicapés, l'égalité entre les États, les nationalités, les peuples, les sexes et les religions, le règlement des conflits ou la réconciliation ainsi que la justice. Pendant la période de grâce, les principaux organismes de défense des droits de l'homme de l'Éthiopie se sont adaptés en se déclarant soit comme œuvres caritatives locales, ce qui veut dire qu'ils ne pouvaient pas obtenir plus de 10 % de leur financement de bailleurs de fonds étrangers, soit en tant qu'œuvres caritatives « résidentes », ce qui les autorisait à recevoir des dons, mais leur interdisait de jouer un rôle actif dans les domaines énumérés ci-dessus. On comptait 3.522 associations déclarées avant l'adoption de la loi et seulement 1.655 après son adoption.

Mme Clinton a fait allusion à ces restrictions inquiétantes qui frappent la société civile dans son discours de Cracovie, lorsqu'elle a fait état d'un « groupe de pays où les murs se ferment sur les associations civiques » et déclaré que « lorsque les pouvoirs publics s'attaquent au droit des citoyens d'œuvrer de concert, comme ils l'ont fait tout au long de l'histoire, les sociétés connaissent la stagnation et la décadence ». Comme on peut l'observer au Moyen-Orient et ailleurs, les pouvoirs publics ne peuvent pas étouffer la société civile indéfiniment et ils ne peuvent jamais le faire légitimement.

La deuxième tendance importante est la croissance considérable de l'usage de l'Internet, des téléphones portables et d'autres technologies qui permettent d'entrer en communication instantanée avec des milliards de personnes à travers le monde. Comme Mme Clinton l'a fait remarquer dans un discours récent sur la liberté de l'Internet, l'Internet est devenu le lieu d'information du XXIe siècle. On a beaucoup dit et écrit au sujet des effets de ces techniques de communication qui ont permis à des Égyptiens et à des Tunisiens de se mobiliser dans les semaines et les mois précédant le début des manifestations. Si c'est le courage des meneurs qui a été la force déterminante, on ne peut pas nier que ces nouvelles technologies alliées au pouvoir des stations de télévision et de l'Internet de diffuser des vidéos obtenues de citoyens à l'aide de téléphones portables en ont amplifié les effets.

À l'heure actuelle, plus de 2 milliards de personnes réparties dans la plupart des pays du monde ont accès à l'Internet, et le nombre d'abonnements à des téléphones portables est d'environ 5 milliards. Ces chiffres devraient augmenter considérablement dans les quinze prochaines années. Par ailleurs, alors que de plus en plus de gens réussissent à avoir accès à ces technologies remarquables et qu'ils les utilisent tant pour recueillir des informations sur les droits de l'homme et les faire connaître que pour communiquer avec d'autres militants, un nombre croissant d'États consacrent plus de temps, d'argent et d'attention aux mesures destinées à réduire l'accès à ces nouveaux moyens de communication. Une quarantaine d'États appliquent maintenant un ensemble de limites réglementaires et de contrôles techniques à l'accès à l'Internet et ont recours à des technologies destinées à limiter la liberté d'expression et à porter atteinte à la vie privée de ceux qui se servent de ces technologies en évolution rapide.

En 2010, l'Arabie saoudite a restreint l'accès à l'Internet et porté atteinte à l'intimité d'internautes. Un organisme officiel, la Commission des technologies de la communication et de l'information, a surveillé de manière abusive le courrier électronique, les conversations sur l'Internet et a bloqué des sites dont certaines pages portaient sur l'hindouisme, le judaïsme, le christianisme et certaines formes de l'islam jugés incompatibles avec la charia et avec la réglementation nationale. Au Soudan, le gouvernement a surveillé les communications par Internet et bloqué, lors des élections, l'accès au site Sudan Vote Monitor. La Chine a contrôlé étroitement le contenu de l'Internet et son accès et a arrêté ceux qui exprimaient des opinions critiques du gouvernement ou de sa politique. Au Vietnam, le gouvernement a orchestré des attaques contre des sites Internet émettant des critiques et espionné les blogueurs dissidents. Vingt-cinq dissidents ont été arrêtés au cours de l'année, et la police est entrée de force dans le domicile d'un certain nombre d'autres pour s'emparer d'ordinateurs, de téléphones portables et d'autres appareils.

La troisième tendance, et c'est celle qui s'oriente dans une direction négative, est la montée incessante de la violence, des persécutions et de la discrimination officielle et sociétale envers les membres de groupes vulnérables, notamment de minorités raciales, religieuses ou ethniques ou de majorités sans moyens d'action. Dans de nombreux pays, ce genre de discrimination a touché les femmes, les enfants, les handicapés, les autochtones, les homosexuels, les lesbiennes, les bisexuels et les transsexuels et les membres d'autres groupes vulnérables qui n'ont pas le pouvoir politique nécessaire pour défendre leurs intérêts. Souvent des membres de ces groupes ont été privés de possibilités économiques ou de la capacité de suivre leurs traditions ou pratiques sociales ou culturelles ou encore ils ont fait l'objet de restrictions en ce qui concerne la liberté d'expression ou de réunion à des fins pacifiques ou le droit de constituer des associations ou des organisations.

Au Pakistan, les violations de la liberté religieuse ainsi que la violence et la discrimination envers les minorités religieuses se sont poursuivies. Les lois sur le blasphème ont servi à harceler des minorités religieuses ainsi que des musulmans vulnérables ou des musulmans dont les vues n'étaient pas conformes à celles de la majorité de leurs coreligionnaires. (Pendant les deux premiers mois de 2011, deux hauts responsables du gouvernement qui avaient critiqué publiquement ces lois ont été assassinés.) En Arabie saoudite, des restrictions ont sévèrement entravé la liberté religieuse, et la discrimination fondée sur la religion y était courante. En Chine, le gouvernement a continué de diaboliser le dalaï lama et a réprimé sévèrement les Ouighours musulmans au Xinjiang et les bouddhistes tibétains. On a signalé un accroissement des actes antisémites à travers le monde, dont la profanation de cimetières, des graffiti et des libelles sanguinaires, ainsi que la négation de l'holocauste, le révisionnisme et la glorification. Il y a également eu des épisodes marqués par l'expression de l'antisémitisme lors des manifestations au Moyen-Orient.

Des personnes à travers le monde continuent de faire l'objet de discrimination et d'intimidation à cause de leur orientation sexuelle ou de leur identité sexuelle. Le Honduras a observé un brusque accroissement de l'assassinat par des inconnus de membres de la communauté des homosexuels, des lesbiennes, des bisexuels et des transsexuels. Par ailleurs, dans un grand nombre de pays d'Afrique, du Moyen-Orient et des Caraïbes, les rapports sexuels entre personnes du même sexe demeurent un acte criminel, et, en appliquant de telles lois et d'autres mesures de ce genre, l'État renforce et encourage la discrimination et l'intolérance de la part de l'ensemble de la population. En Ouganda, par exemple, l'intimidation et le harcèlement de membres de cette communauté s'est aggravée au cours de l'année, et des responsables politiques et religieux ont proféré des menaces à leur égard.

L'exploitation des travailleurs a aussi constitué dans de nombreux pays un problème que les menaces dirigées contre les travailleurs désireux de se syndicaliser ont aggravé. De nouveau en 2010, l'État ouzbek a forcé des milliers d'adultes et d'enfants à travailler lors de la récolte annuelle du coton. Au Bangladesh, les mauvaises conditions de travail ont causé la mort de travailleurs qui aurait pu être évitée, notamment dans le secteur de l'habillement. Ce pays a aussi connu des manifestations fréquentes de mécontentement de travailleurs, qui ont parfois fait des victimes, en particulier dans le secteur du prêt-à-porter et dans les zones franches industrielles.

Ces tendances sont davantage illustrées ci-dessous par les brefs aperçus portant sur 27 pays (rangés alphabétiquement par zone géographique). La section sur les faits saillants dans divers pays offre des exemples qui illustrent les tendances de la situation des droits de l'homme en 2010. Dans certains de ces pays, il y a eu des faits négatifs ou le bilan des droits de l'homme a constitué un ensemble de faits positifs et négatifs. Dans d'autres pays cités ci-dessous, nous faisons état des tendances positives constatées en 2010. Les autres sections du rapport offrent un examen beaucoup plus détaillé de ces tendances dans 167 autres pays.

Le rapport de 2010 constitue la trente-cinquième édition annuelle de ce document du département d'État sur la situation des droits de l'homme dans le monde. Cette année, le rapport porte sur 194 pays. De simple réponse à la demande du Congrès, au milieu des années 1970, de dresser un rapport sur la situation des droits de l'homme dans les pays qui recevaient une aide des États-Unis, il est devenu une analyse détaillée du respect des droits de l'homme dans tous les États qui sont membres de l'Organisation des Nations unies. Le rapport donne un aperçu de la situation des droits de l'homme dans le monde entier en tant que moyen de sensibiliser l'opinion à cette situation, en particulier aux conditions qui ont des effets sur le bien-être des femmes, des enfants, des minorités raciales et religieuses, des victimes de la traite, des membres des groupes indigènes et des communautés ethniques, des handicapés, des minorités sexuelles, des réfugiés et des membres d'autres groupes vulnérables.

Tout comme l'ampleur du rapport du département d'État s'est accrue, l'usage des rapports par pays s'est étendu à travers le monde. Outre le fait qu'ils fournissent des données utiles au Congrès pour prendre des décisions en matière de financement et de politique, ils sont utilisés par tous les rouages de l'État fédéral et par de nombreux gouvernements étrangers. Fait aussi important, ils servent de plus en plus à des particuliers et à des organisations non gouvernementales de sources essentielles d'information sur ce qui se passe dans le monde. Ils sont traduits dans une cinquantaine de langues et diffusés sur l'Internet afin de faciliter la dissémination de ces informations.

Le gouvernement des États-Unis dresse le rapport sur les droits de l'homme parce qu'il estime indispensable que les pays, y compris les États-Unis, veillent à ce que le respect des droits de l'homme fasse partie intégrante de la politique étrangère. Il fournit ce rapport en tant que forme d'étude et d'analyse générales.

Le rapport ne porte pas sur la situation des droits de l'homme aux États-Unis, même si le gouvernement actuel s'est engagé à examiner de près et d'un œil critique les résultats du pays dans ce domaine alors même qu'il met en évidence les pratiques des autres pays. En novembre, les États-Unis ont soumis leur premier rapport sur les droits de l'homme dans leur territoire au Conseil des droits de l'homme de l'ONU à Genève, dans le cadre de l'examen périodique universel. Pour préparer ce rapport, nous avons eu des consultations approfondies avec divers organismes de la société civile américaine et avec des responsables amérindiens. Le mois dernier, nous avons assisté de nouveau à la réunion du Conseil des droits de l'homme à Genève pour présenter notre réponse aux recommandations que d'autres États nous avaient faites.

De même, nous fournissons sans cesse des renseignements sur notre situation des droits de l'homme conformément à nos obligations découlant de traités. En janvier 2010, nous avons soumis des rapports périodiques sur notre application des protocoles optionnels de la Convention sur les droits de l'enfant. En 2011, nous allons soumettre des rapports périodiques au sujet de l'application de la Convention internationale sur les droits civiques et politiques, de la Convention contre la torture et de la Convention sur l'élimination de la discrimination raciale. En 2010, le Rapport du département d'État sur la traite des personnes comportait, pour la première fois, une section sur les États-Unis, qui ont été classés en fonction des mêmes critères que ceux qu'ils appliquent aux autres pays.

Un dernier mot au sujet de la production de ces rapports. Les rapports portant sur 194 pays sont détaillés si ce n'est exhaustifs. Leur préparation constitue une tâche herculéenne qui exige des efforts extraordinaires de la part d'une équipe de responsables résolus dans les ambassades des États-Unis à travers le monde et de leurs homologues à Washington, notamment le personnel dévoué du Bureau de la démocratie, des droits de l'homme et du travail. Chaque équipe affectée à un pays recueille, analyse et synthétise les renseignements provenant de toute une variété de sources, dont des organismes nationaux et internationaux de défense des droits de l'homme, d'autres États, des organisations multilatérales et des membres de la société civile. Une fois les rapports élaborés, ils sont rigoureusement examinés, corrigés, et les faits cités sont vérifiés aux fins d'exactitude et d'objectivité.

Faits saillants dans quelques pays

En 2010, des gouvernements à travers le monde ont continué de commettre de graves violations des droits de l'homme. Les paragraphes ci-dessous décrivent la situation des droits de l'homme et les tendances principales dans des pays où ces violations ont été particulièrement graves. Nous faisons aussi état de l'Ukraine, où il y a eu en 2010 un retour en arrière après l'évolution positive de ces dernières années. La présente section commence par la mention de 3 pays, la Colombie, la Guinée, l'Indonésie, où des faits marquants positifs ont eu lieu en matière de droits de l'homme en 2010.

La Colombie est un pays qui a connu une amélioration notable de la situation des droits de l'homme en 2010. Peu de temps après être entré en fonction en août, le président Santos et son gouvernement ont renforcé les relations des pouvoirs publics avec la société civile et les défenseurs des droits de l'homme, en organisant des consultations de haut niveau, en exprimant publiquement leur soutien à ces défenseurs, en entamant un dialogue avec eux et en appuyant les efforts visant à accroître les sanctions contre ceux qui profèrent des menaces et qui commettent des actes de violence à l'encontre de militants des droits de l'homme. Le gouvernement a fait progresser l'adoption d'une loi destinée à restituer les terres confisquées et à offrir une indemnisation aux victimes. Les exécutions sommaires ont fortement diminué par rapport à 2008 et à 2009, et plusieurs hauts officiers des forces armées ont été condamnés pour avoir commis des violations des droits de l'homme. Certains abus ont cependant continué, comme les menaces dont ont fait l'objet des défenseurs des droits de l'homme et des syndicalistes. Le ministère de la défense a commencé de mettre en œuvre un accord avec les services du Haut-Commissariat des Nations unies pour les droits de l'homme visant à suivre les mesures prises par ce ministère pour améliorer le respect des droits de l'homme.

En décembre 2010, le premier président élu démocratiquement en Guinée depuis l'accession de ce pays à son indépendance en 1958 est entré en fonction. Le peuple a choisi M. Alpha Condé, qui était depuis longtemps à la tête de l'opposition et qui était le candidat du Rassemblement du peuple de Guinée, comme son président à l'issue de deux tours de scrutin. Même si l'on a observé des actes de violence à la suite du second tour de scrutin, on considère en général que l'élection a été libre et honnête.

En Indonésie, le respect des droits de l'homme a continué de s'accroître en 2010, douze ans après le passage de ce pays à la démocratie. Si les faiblesses de l'appareil judiciaire persistent, le président Susilo Bambang Yudhoyono, qui a été réélu d'une manière démocratique en juillet 2009, est resté un grand partisan de l'État de droit et de la responsabilisation, et la société civile et les médias figurent toujours parmi les plus dynamiques en Asie. La professionnalisation des forces armées s'est poursuivie, mais de graves violations des droits de l'homme ont été commises par des militaires, en particulier en Papouasie, et les peines, quand elles ont été appliquées, n'ont souvent pas été assorties aux crimes commis.

Afrique

La Côte d'Ivoire a terminé l'année 2010 dans une impasse pour ce qui est de la présidence, à la suite de l'élection d'octobre au cours de laquelle le président sortant, M. Laurent Gbagbo, qui était le candidat du Front populaire ivoirien (FPI), et le chef de l'opposition, M. Alassane Ouattara, qui était le candidat du Rassemblement des républicains de Côte d'Ivoire (RDR), s'opposaient lors du second tour de scrutin le 28 novembre. Le 2 décembre, la Commission électorale indépendante (CEI) a déclaré que M. Ouattara avait remporté l'élection avec 54,1 % des suffrages contre 45,9 % pour M. Gbagbo. L'élection a été déclarée libre et honnête par l'ONU et par des missions d'observateurs étrangers et ivoiriens. M. Gbagbo a refusé d'accepter les résultats de l'élection en faisant état de fraude et d'intimidation d'électeurs dans plusieurs régions. Aussi bien M. Ouattara que M. Gbagbo ont prêté le serment d'entrée en fonction le 3 décembre. À la fin de l'année, le président Ouattara dirigeait à Abidjan son gouvernement du Golf Hôtel qui faisait l'objet d'un blocus par les forces favorables à M. Gbagbo. Ce dernier retenait le contrôle des ressources de l'État, dont la station de télévision nationale, les forces de sécurité et le ministère des finances. Le 16 décembre, les forces de sécurité ont tiré sur des partisans du président Ouattara lors d'une manifestation. Au moins 20 personnes ont été tuées, de nombreuses autres blessées et des centaines arrêtées. Pendant la semaine du 15 au 22 décembre, la division des droits de l'homme de l'Opération des Nations unies en Côte d'Ivoire a signalé que 173 personnes avaient été tuées, 90 soumises à la torture et à des sévices, 471 arrêtées et détenues arbitrairement et que 24 personnes avaient disparu. La majorité écrasante de ces cas d'exécution sommaire, de torture, de détention et de disparition étaient dus aux forces de sécurité fidèles à M. Gbagbo. Le rapport de 2010 ne fait pas état des violations des droits de l'homme qui ont eu lieu après le 31 décembre.

En République démocratique du Congo (RDC), de graves violations des droits de l'homme se sont produites dans tout le pays, notamment dans les riches régions minières de l'Est et du Nord-Est en proie à un conflit, où l'autorité de l'État est demeurée inexistante ou extrêmement faible. Des défenseurs des droits de l'homme ont été intimidés, battus et, dans le cas d'un militant éminent, Floribert Chebeya, même assassinés. Des entités armées, dont des éléments des forces de sécurité de l'État, ont commis des violations des droits de l'homme en toute impunité et se sont adonnés à l'exploitation et au commerce illicites de richesses naturelles, notamment de minerais. Les recettes tirées du commerce illicite de minerais, dont certaines ont servi à financer le conflit armé, ont causé le maintien de l'insécurité dans l'est de la RDC et aggravé une situation des droits de l'homme qui était déjà précaire. Les groupes de rebelles et de miliciens dans l'est de la RDC ont continué à participer à des campagnes de viol et de pillage en vue d'exercer leur contrôle sur les populations habitant près des zones minières lucratives et à engranger les profits de l'exploitation minière qui contribuent à maintenir le conflit et les violations connexes. Des sources dignes de foi telles que le Groupe d'experts de l'ONU sur la RDC ont présenté des informations selon lesquelles les chaînes d'approvisionnement de certaines entreprises congolaises et étrangères provenaient de fournisseurs qui commerçaient avec des entités armées comprenant des éléments des forces de sécurité de l'État ayant commis de graves violations des droits de l'homme.

Le Nigeria a continué de connaître de graves violations des droits de l'homme tout au long de l'année. Le personnel des services de sécurité, dont des policiers, des militaires et des officiers du service de sécurité de l'État, ont exécuté, torturé, tabassé et maltraité des manifestants, des personnes soupçonnées d'avoir commis un crime, des détenus et des prisonniers condamnés. La Force opérationnelle interarmées, constituée en 2003 pour faire face à l'instabilité dans le delta du Niger et composée de militaires, de policiers et de membres des services de sécurité, a lancé des raids contre des groupes de militants et de personnes soupçonnées d'avoir commis un crime, faisant de nombreux morts et blessés parmi ces groupes. La corruption était généralisée à tous les niveaux du gouvernement et dans toutes les forces de sécurité. La violence d'origine ethno-religieuse a aussi fait des morts et causé le déplacement de populations pendant l'année. La ville de Jos et les terres agricoles environnantes ont été le site de deux grands affrontements en janvier et en mars. Près d'un millier de personnes, principalement des femmes, des enfants et des personnes âgées, ont été tuées, certaines à coups de machette ou de couteau et d'autres brûlées vives.

La violence s'est poursuivie au Soudan tout au long de l'année 2010. Les élections nationales qui ont eu lieu en avril n'ont pas été jugées libres et honnêtes par la communauté internationale, et les observateurs ont constaté de nombreux problèmes au cours ces élections. Au Darfour, les affrontements entre les forces gouvernementales, les milices alliées à ces forces, les groupes de rebelles et les groupes ethniques ont continué de tuer des civils, d'en blesser et de causer leur déplacement. Selon l'ONU, ils ont causé la mort de 2.321 personnes pendant l'année, ce qui constitue une augmentation par rapport aux 875 personnes qui avaient été tuées en 2009. Le gouvernement a continué de lancer des raids aériens. La violence d'ordre sexuel, le recours à des enfants soldats et l'obstruction d'organisations humanitaires et de la mission mixte Nations unies-Union africaine au Darfour ont continué d'être des problèmes. Les forces gouvernementales ont harcelé, arrêté et maltraité des membres de la société civile dans le Nord. Dans le Sud-Soudan, les affrontements entre ethnies et les attaques de l'Armée de résistance du seigneur ont continué de tuer des civils et de causer leur déplacement. Selon des estimations de l'ONU, la violence dans le Sud aurait causé la mort de 986 personnes et le déplacement de 223.708 personnes pendant l'année. L'inscription des électeurs pour le référendum sur l'autodétermination du Sud-Soudan en 2011 a eu lieu en novembre et en décembre. L'absence de progrès relatif à la préparation d'un référendum distinct sur la question de savoir si la région frontalière d'Abyei devrait faire partie du Nord ou du Sud a entraîné des actes sporadiques de violence et une montée des tensions dans la région.

Au Zimbabwé, les forces de sécurité, la police et des éléments du gouvernement dominés par la ZANU-PF (Union nationale africaine du Zimbabwe-Front patriotique) ont continué de commettre un grand nombre de graves violations des droits de l'homme en toute impunité, dont la torture, à l'encontre de militants politiques et de membres de partis politiques autres que la ZANU-PF, de responsables d'associations d'étudiants et de militants de la société civile. Le contrôle dominant de la ZANU-PF et sa manipulation de la vie politique au moyen de fausses accusations, d'arrestations arbitraires, d'actes d'intimidation et de la corruption ont privé en fait les citoyens de leur droit à changer de gouvernement. Bien qu'il y ait eu moins d'incidents que pendant la première moitié de 2010, les attentes relatives à l'organisation d'élections en 2011 ont entraîné un accroissement du nombre de cas de harcèlement et d'intimidation d'associations de la société civile et de membres des médias vers la fin de l'année. Le gouvernement a continué d'avoir recours à des lois répressives pour supprimer la liberté d'expression, notamment de membres de la presse, la liberté de réunion, la liberté d'association et la liberté de circulation. Les forces armées et d'autres agents du gouvernement ont aussi continué de commettre des violations des droits de l'homme dans les zones de gisements diamantifères de Marange.

Asie de l'Est et Pacifique

Malgré la libération de Mme Aung San Suu Kyi, la Birmanie comptait encore plus de 2.100 détenus politiques à la fin de 2010. De nombreux militants de la société civile étaient détenus pour une durée indéfinie et sans être inculpés. Des organismes financés par le gouvernement ont harcelé des militants de la cause de la démocratie et violé les droits de l'homme. Le gouvernement a porté fréquemment atteinte à la vie privée et limité les libertés d'expression, de la presse, de réunion, d'association, de religion et de circulation. Le gouvernement n'a pas permis aux associations locales de défense des droits de l'homme de fonctionner de façon indépendante, et les organisations non gouvernementales étrangères se sont heurtées à des conditions difficiles. Les élections qui ont eu lieu à l'automne 2010 n'ont été ni libres ni honnêtes. Le gouvernement a continué d'exercer un contrôle strict sur l'activité du clergé bouddhiste. Les forces armées birmanes ont continué de commettre des violations flagrantes des droits de l'homme à l'encontre de la population civile des régions où vivent des minorités ethniques. Ces violations comprennent le viol, la torture, le déplacement forcé et le travail forcé. La violence et la discrimination sociétale envers les femmes et les minorités religieuses se sont poursuivies tout comme le recrutement illicite d'enfants soldats et la traite de personnes, notamment de femmes et de jeunes filles. Les droits des travailleurs sont demeurés limités et le travail forcé, notamment celui des enfants, a également persisté.

Au Cambodge, des membres des forces de sécurité ont commis en toute impunité des exécutions sommaires. Les observateurs des droits de l'homme ont signalé des arrestations arbitraires accompagnées d'une détention prolongée avant tout procès, ce qui souligne la faiblesse de l'appareil judiciaire et l'absence du droit à un procès dans les règles. Des restrictions ont continué de peser sur la liberté de réunion et d'expression, notamment pour les membres de la presse, et le nombre de procès pour diffamation et désinformation visant des voix de l'opposition a augmenté de manière abusive. La société civile a exprimé une grande inquiétude au sujet du projet de loi sur les associations et les organisations non gouvernementales qui est susceptible, s'il est adopté, de limiter le fonctionnement des ONG. Diffusé en décembre, le projet de loi comprend des dispositions qui imposent aux ONG de lourdes formalités en matière de déclaration, qui empêchent les associations comptant moins de 21 membres (ce chiffre a été ensuite ramené à 11, ce qui est encore exagéré) d'avoir un statut légal, qui prévoient des conditions fortement restrictives en ce qui concerne la déclaration des ONG étrangères, qui exigent que ces dernières collaborent avec les pouvoirs publics et qui interdisent les ONG non déclarées. L'antisyndicalisme des employeurs et la faible application du droit du travail se sont poursuivis, et l'exploitation des enfants dans le secteur non structuré a continué d'être un problème.

En Chine, la tendance négative dans les principaux domaines des droits de l'homme s'est maintenue. Les pouvoirs publics ont accru en 2010 les restrictions pesant sur les avocats, les militants, les blogueurs et les journalistes, renforcé les mesures de contrôle sur la société civile et tenté de plus en plus de limiter la liberté d'expression et de contrôler la presse, l'Internet et l'accès à ce dernier. Ils ont aussi eu davantage recours aux mesures extralégales, dont les disparitions forcées, la mise en résidence surveillée, la détention arbitraire dans des prisons secrètes et d'autres formes de détention pour réduire au silence les voix indépendantes et pour punir les militants et les membres de leur famille. Le militant légal Chen Guangcheng, avec sa femme et son enfant, est demeuré en résidence surveillée, tout comme d'autres détenus politiques qui avaient été libérés. Des avocats défendant l'intérêt public, qui exerçaient leurs fonctions dans le cadre juridique de la Chine, ont été radiés de l'ordre des avocats ou tabassés ou ont « disparu » pour avoir assuré la défense de clients et de causes jugés constituer un domaine délicat par les autorités. Des blogueurs et des administrateurs de site ont été arrêtés et accusés de porter atteinte au pouvoir de l'État parce qu'ils avaient rediffusé une information sur le site de Twitter ou qu'ils avaient administré un site Internet où d'autres personnes avaient affiché des observations. Les pouvoirs publics ont également poursuivi leur forte répression culturelle et religieuse de minorités ethniques dans la région autonome des Ouïghours au Xinjiang et dans des régions du Tibet.

En Corée du Nord, la situation des droits de l'homme est demeurée sinistre. Pendant l'année, les pouvoirs publics ont maintenu un contrôle strict sur la circulation de l'information en provenance et à destination de l'étranger. Ils ont privé les habitants du droit à l'application régulière de la loi et arrêté et détenu arbitrairement des personnes accusées notamment d'avoir commis des crimes politiques. Des transfuges et des ONG ont indiqué que des violations des droits de l'homme graves et systématiques avaient lieu dans le grand ensemble de prisons et de centres de détention du pays. En outre, les pouvoirs publics ont continué d'exercer un contrôle strict sur les libertés d'expression, de la presse, de réunion, d'association, de religion, de circulation ainsi que sur les droits des travailleurs. Le pays ne compte aucune association indépendante locale de défense des droits de l'homme et il a refusé tout accès à son territoire à des organisations internationales et à des ONG étrangères, ce qui rend impossible d'évaluer correctement la véritable ampleur des violations des droits de l'homme qui y ont lieu ou de savoir si les informations obtenues sont dignes de foi.

Au Vietnam, les pouvoirs publics ont continué d'empêcher tout dissentiment, exercé un contrôle plus strict sur la presse et limité les libertés d'expression, de réunion, de circulation et d'association. Des personnes ont été détenues arbitrairement pour avoir eu des activités politiques et privées du droit d'avoir un procès équitable et rapide. Les autorités ont arrêté au moins 25 militants politiques, condamné 14 dissidents arrêtés en 2008, en 2009 et en 2010 et rejeté l'appel de 10 autres dissidents condamnés à la fin de 2009. Le fonctionnement de l'appareil judiciaire est fortement entravé par les influences politiques, par une corruption endémique et est inefficace. La liberté de religion a continué de faire l'objet d'une interprétation et d'une protection inégales, en particulier au niveau des provinces et des villages. La liberté d'Internet a été encore plus limitée du fait que les pouvoirs publics ont orchestré des attaques contre des sites émettant des critiques et espionné des dissidents blogueurs. Les autorités ont limité le droit des travailleurs de former des syndicats indépendants et d'y adhérer.

Europe

En Biélorussie, les autorités ont arbitrairement arrêté, détenu et incarcéré des militants de la cause de la démocratie, des journalistes et des représentants de la société civile. À la suite de l'élection présidentielle de décembre 2010 qui a été entachée d'irrégularités, les autorités ont pris des mesures énergiques contre les manifestants ; elles ont détenu près de 700 personnes et perquisitionné des bureaux et des appartements appartenant à des membres des médias indépendants, à des ONG et à l'opposition politique. Plus de 40 personnes, dont plusieurs candidats à la présidence, risquent maintenant d'être condamnées à quinze ans de prison. Du fait des arrestations et des procès, les autorités biélorusses augmentent sans cesse le nombre de détenus politiques. L'autorité judiciaire n'a pas fait preuve d'indépendance et a souffert de la corruption, de l'inefficacité et de l'ingérence à caractère politique ; l'issue des procès était prédéterminée, et de nombreux procès ont eu lieu à huis clos. La corruption officielle dans les rouages du gouvernement a continué d'être un problème.

En Russie, les pouvoirs publics ont empiété sur les libertés d'expression, de réunion et d'association ; elles ont détenu des manifestants et continué d'exercer des pressions sur certaines ONG, sur des médias indépendants, sur certaines minorités religieuses, sur des syndicats indépendants et sur l'opposition politique. Les attaques dirigées contre des journalistes et des militants ainsi que l'assassinat de certains d'entre eux ont persisté. On a signalé des sévices commis par la police, des décès dus au bizutage de recrues dans l'armée et les conditions dures dans les prisons. Les violations de l'État de droit et du respect de la légalité sont demeurées un problème, et la corruption des pouvoirs publics a été généralisée. Les attaques d'ordre xénophobe, racial et ethnique ainsi que les crimes motivés par la haine ont continué de constituer un problème important. Le conflit entre les forces gouvernementales et les insurgés, les militants islamistes et les forces criminelles dans le Caucase du Nord a entraîné de nombreuses violations des droits de l'homme par tous les intéressés, dont assassinat, torture, sévices, violence et enlèvements pour des raisons politiques.

En Ukraine, malgré une élection présidentielle libre et honnête en début d'année, la tendance globale pour 2010 a été négative du fait d'élections locales entachées d'irrégularités, de l'intimidation des médias et des poursuites contre certaines personnalités de l'opposition. Des observateurs étrangers et ukrainiens ont trouvé que les élections locales qui ont eu lieu en octobre n'avaient pas été conformes aux mêmes normes que l'élection présidentielle ; ils ont fait état de listes frauduleuses de candidats de l'opposition, des pressions exercées par les pouvoirs publics sur les observateurs des élections et sur les candidats et du fait que des responsables des bureaux de vote avaient rayé ou enlevé des bulletins de vote le nom de candidats, ce qui a créé des inquiétudes au sujet des prochaines mesures que le gouvernement envisage de prendre au titre de la réforme électorale. En outre, on a signalé à de multiples reprises que les autorités avaient tenté d'orienter le contenu des médias et d'intimider des journalistes. Bien que les pouvoirs publics aient pris des mesures en 2009 pour mieux combattre la corruption, la communauté internationale a déclaré craindre que ce soit la politique qui ait motivé l'enquête ouverte par le nouveau gouvernement en 2010 et portant sur 30 membres du gouvernement précédent qui seraient accusés de corruption ; plusieurs de ces personnes ont été détenues, puis inculpées.

Proche-Orient

Les tensions politiques se sont exacerbées au cours des semaines qui ont précédé les élections du mois d'octobre à Bahreïn. Les autorités ont arrêté plus de 200 chiites qu'elles ont accusés d'avoir incité à la violence dans les rues ou d'y avoir participé. Parmi les personnes arrêtées figuraient des dirigeants des mouvements Haq et Wafa, qui rejettent la monarchie et qui avaient prôné le boycott des élections. Le gouvernement a inculpé 23 de ces personnes de participation à un « réseau de la terreur » en vertu de la loi de répression du terrorisme adoptée en 2006. En outre, la décision des pouvoirs publics d'interdire le site Internet et les bulletins d'information des deux principaux partis d'opposition a jeté une ombre sur le processus électoral. Le gouvernement n'a pas permis à des observateurs étrangers de surveiller le déroulement des élections. Il a en outre maintenu ses restrictions sur la liberté de réunion et d'association. Les forces de sécurité sont intervenues dans des manifestations et elles ont limité et contrôlé les rassemblements politiques au cours de l'année écoulée. Les ONG et les groupes de la société civile ont été tenus de s'inscrire auprès des autorités et de fournir la liste de leurs adhérents. En septembre, le ministère du développement social a ordonné la dissolution du conseil d'administration de la ligue nationale des droits de l'homme, la BHRS (Bahrein Human Rights Society), et nommé à titre intérimaire un fonctionnaire du ministère à la tête de cette association, ce qui a eu pour effet en pratique de la mettre hors d'état de fonctionner.

Selon de multiples sources, le gouvernement iranien a procédé à l'exécution sommaire d'environ 312 personnes au cours de l'année écoulée, notamment à l'issue de procès tenus en secret ou en l'absence d'une procédure régulière. Dans de nombreux cas, les personnes qui auraient été exécutées pour des actes criminels tels que le trafic de stupéfiants étaient en fait des dissidents politiques. Les autorités ont détenu des prisonniers politiques et continué de prendre des mesures répressives contre les partisans des droits de la femme, les militants des droits des minorités ethniques, des militants étudiants et des minorités religieuses. L'autorité judiciaire a fait preuve de peu d'indépendance, et les procès publics et équitables ont été peu nombreux. Les pouvoirs publics ont fortement restreint le droit à l'intimité et aux libertés publiques, notamment les libertés d'expression, y compris pour les membres de la presse, de réunion, d'association et de circulation ainsi que la liberté de religion. Des justiciers ont continué d'attaquer des jeunes dont ils considéraient les vêtements ou les activités comme contraires à l'islam, d'envahir des domiciles, de maltraiter les couples non mariés et de perturber les concerts. La violence et la discrimination légale et sociétale envers les femmes, les enfants, les minorités ethniques et religieuses ainsi que les homosexuels, les lesbiennes, les bisexuels et les transsexuels ont persisté.

En Irak, si les élections législatives crédibles et légitimes qui ont eu lieu le 7 mars dans toutes les 18 provinces ont représenté une réalisation importante sur le plan des droits de l'homme, la violence des extrémistes, alliée aux faibles résultats des pouvoirs publics pour ce qui est de l'application de la loi, ont entraîné des violations multiples et graves des droits de l'homme dans le pays. Selon certaines informations, le gouvernement ou ses agents ont effectué de nombreuses exécutions sommaires ou illicites, des détentions arbitraires et des actes de torture liés à ses opérations de sécurité, souvent en toute impunité. Al-Qaïda en Irak et d'autres extrémistes ont continué leurs attaques contre les forces irakiennes de sécurité, des responsables du gouvernement, des civils, visant souvent des zones urbaines, des églises chrétiennes, des marchés et des mosquées chiites. Le 10 mai, l'explosion de bombes et des tirs coordonnés à travers l'Irak ont causé la mort d'au moins 119 personnes, dont des membres des forces irakiennes de sécurité et des policiers. Le 17 août, un kamikaze s'est fait sauter à Bagdad dans une foule de recrues de l'armée, causant la mort de 61 personnes. Au cours de l'année, 962 membres du personnel du ministère de l'intérieur ont été tués et 1.347 blessés. Des officiers de police étaient tout particulièrement visés.

En Libye, le colonel Kadhafi et ses proches collaborateurs ont monopolisé tous les aspects de la prise de décisions au sein du gouvernement. Les problèmes en matière de droits de l'homme ont continué d'être la torture, les arrestations arbitraires, l'impunité des agents publics et les mauvaises conditions dans les prisons. Un nombre important mais imprécis de personnes sont demeurées en détention ou en prison pour avoir participé à des activités politiques pacifiques ou pour avoir adhéré à une association politique illégale. Les pouvoirs publics ont considérablement restreint la liberté des médias et continué de restreindre la liberté d'expression et ils ont surveillé couramment les appels téléphoniques et l'usage de l'Internet, dont le courrier électronique avec des pays étrangers. Des militants politiques et des organisations étrangères ont fait l'objet d'une surveillance physique. L'État possède et contrôle pratiquement toute la presse écrite et l'audiovisuel, et ces médias n'ont publié ni diffusé des opinions qui n'étaient pas conformes à la politique officielle. L'Organisation de la sûreté intérieure a régulièrement harcelé les journalistes, et des dispositions beaucoup trop larges du code pénal ont servi de base à de fréquentes accusations de diffamation. Les pouvoirs publics ont restreint fortement la liberté de réunion et n'ont autorisé les rassemblements publics qu'après avoir donné leur consentement préalable. Ils ont restreint la liberté d'association et en général n'ont permis qu'aux institutions affiliées au gouvernement de fonctionner. Aucune organisation non gouvernementale n'a pu fonctionner dans le pays. Au début de 2011, des manifestations ont eu lieu en Libye. Comme elles se sont produites en dehors de la période couverte par le rapport, ce dernier n'en fait pas état.

En Syrie, les forces de sécurité ont commis des exécutions sommaires, détenu des militants politiques et des droits de l'homme, torturé et maltraité des prisonniers et des détenus en toute impunité. Les pouvoirs publics ont également incarcéré plusieurs membres éminents de la communauté des droits de l'homme et de la société civile, qui sont venus s'ajouter au nombre estimé de 2.500 à 3.000 détenus politiques. La longue période précédant les procès et la détention secrète continuent de constituer un grave problème, et les tribunaux ont utilisé systématiquement les « confessions » extraites sous la contrainte comme preuve. Les accusations de torture des défenseurs n'ont presque jamais fait l'objet d'une enquête. Les pouvoirs publics ont fortement restreint les libertés universelles d'expression, de réunion, d'association, de religion et de circulation.

Asie du Sud et Asie centrale

Une situation de plus en plus difficile sur le plan de la sécurité en Afghanistan a entraîné de nombreuses violations graves des droits de l'homme. La population civile a continué de souffrir de l'intensification du conflit armé : le nombre de morts causées par ce conflit a augmenté de 15 % par rapport à 2009. Les forces gouvernementales et les forces internationales alliées du gouvernement ont causé la mort de civils, plus précisément de 16 % de l'ensemble des civils qui ont péri. Selon l'association Human Rights Watch, on a constaté souvent l'absence d'enquêtes opportunes et transparentes ou de responsabilité des forces en cas d'actes répréhensibles lorsque des civils étaient blessés ou tués. Les attaques des talibans et des insurgés, notamment les tueries d'ordre politique, se sont accrues tant en nombre qu'en intensité. Au moins 30 personnes ont été tuées le 18 septembre, le jour des élections législatives, et les talibans ont revendiqué la responsabilité de l'assassinat de 3 candidats pendant la campagne électorale en juillet et en août. En août, 5 personnes participant à la campagne électorale de Fawzia Gilani à Hérat ont été enlevées puis tuées. Il y a également eu des attaques dirigées contre des responsables des élections. Les élections elles-mêmes ont été entachées de fraude et d'irrégularités généralisées, entre autres la mise en place d'un tribunal spécial chargé d'examiner les résultats des élections et des plaintes, la faible participation des électeurs et des conditions insatisfaisantes pour la participation des femmes. L'impunité et la corruption des agents publics ont sévi au sein des pouvoirs publics qui souvent ne mènent pas des enquêtes efficaces sur les violations des droits de l'homme commises par les forces locales de sécurité. Les arrestations et les détentions arbitraires sont demeurées un problème, et l'appareil judiciaire manque d'indépendance. La liberté de religion, dont le droit de changer de religion, était fortement limitée. Les femmes ont continué de faire l'objet de violations fréquentes des droits de la personne, ce qui comprend la violence, les attaques des insurgés contre l'enseignement réservée aux filles, l'accès limité à la justice et d'autres limitations de leurs droits.

Au Pakistan, plusieurs médias et ONG ont signalé des accusations portant sur des exécutions sommaires et sur la détention de civils par les forces de sécurité. Pendant l'année, il y a eu une augmentation importante du nombre total de cas signalés de torture et de viol de personnes en détention que l'on a signalés, soit près du double de 2009. La Société des droits de l'homme et de l'aide aux prisonniers (SHARP) a signalé la mort de 72 civils qui a suivi leur rencontre avec la police et de 168 prisonniers, ce qui constitue une augmentation par rapport à l'année précédente. L'explosion de bombes par des militants et des terroristes dans toutes les 4 provinces et dans les zones tribales administrées par l'État fédéral ont continué de faire des morts et des blessés. Selon le rapport, les attaques d'extrémistes et de terroristes et les opérations visant à lutter contre le terrorisme et l'extrémisme ont causé la mort de 7.400 personnes, dont près de 800 étaient des civils, plus de 450 des membres des forces de sécurité et plus de 5.100 des terroristes ou des insurgés. De nombreuses informations ont fait état de personnes qui ont été tuées pour des raisons politiques à Karachi et au Balouchistan. Selon une information parue sur le site Dawn, la violence politique a causé la mort de 1.981 personnes à Karachi, dont 748 avaient été visées tout particulièrement. D'après l'association Human Rights Watch, les assassinats et la disparition de responsables, de militants et de civils du Balouchistan ont augmenté en 2010. Les violations de la liberté de religion, la violence et la discrimination envers les minorités religieuses se sont poursuivies. Certaines personnes accusées de blasphème contre l'islam ont été condamnées à la réclusion à perpétuité ou à la peine de mort. L'une d'elle est Aasia Bibi, une chrétienne, qui a été condamnée à la peine de mort en novembre ; c'est la première Pakistanaise à faire l'objet d'une peine aussi dure pour cause de blasphème.

L'Ouzbékistan a continué d'incarcérer des personnes pour des raisons politiques. Si l'un des détenus politiques, le militant de la cause des droits de l'homme Farhad Mukhtarov, a été libéré au cours de l'année, on comptait encore 13 à 25 détenus politiques, et des membres de leur famille ont signalé qu'un grand nombre d'entre eux avaient été torturés. Des militants des droits de l'homme, des membres de leur famille et des membres de certains groupes religieux ont signalé des cas de harcèlement et des arrestations par la police et par d'autres membres des forces de sécurité. La liberté d'expression a été fortement limitée, et le harcèlement de journalistes s'est accru au cours de l'année écoulée. La police et des services de sécurité ont arrêté des journalistes de la presse écrite et de l'audiovisuel ; ils en ont intimidé d'autres, ont également usé de la violence et imposé des restrictions d'ordre bureaucratique à l'exercice de leur profession. Les codes pénal et administratif prévoient des amendes importantes en cas de diffamation, et les pouvoirs publics se sont servis d'accusations de diffamation verbale ou écrite pour punir des journalistes, des militants des droits de l'homme et d'autres personnes qui avaient critiqué le président ou les pouvoirs publics. La liberté d'association était aussi limitée. Les pouvoirs publics ont exercé un contrôle étroit sur les activités des ONG et sur les groupes religieux islamiques et minoritaires non réglementés et imposé des conditions juridiques strictes pour ce qui est de la création et de la déclaration de cette catégorie de groupes. Des adultes et des enfants ont été forcés de travailler pendant la récolte du coton.

Continent américain

Cuba a libéré en 2010 plus de 40 prisonniers politiques, dont de nombreux militants éminents des droits de l'homme arrêtés en 2003, mais la plupart ont été remis en liberté à condition qu'ils quittent le pays. Ce pays a continué de compter des dizaines de détenus politiques. Les pouvoirs publics ont restreint les droits de l'homme et les libertés fondamentales, dont les libertés d'expression, de la presse, de réunion, d'association, de circulation et de religion. Les groupes de défense des droits de l'homme ont observé une nette augmentation du recours aux détentions à court terme destinées à entraver le fonctionnement de la société civile et à harceler les militants. En outre, les pouvoirs publics ont continué d'organiser des rassemblements publics de manière à harceler et à maltraiter les militants et leur famille, en particulier les Damas de blanco (les dames en blanc). Bien qu'ils aient qualifié ces rassemblements de spontanés, les participants sont souvent arrivés dans des véhicules appartenant à l'État ou ont été recrutés par des responsables locaux du parti communiste dans des lieux de travail et des écoles proches. Dans des cas extrêmes, les manifestants organisés par les autorités se sont attaqués à ces personnes ou ont endommagé leur domicile ou leurs biens. Des membres des forces de sécurité ont surveillé, harcelé et parfois attaqué des militants en faveur des droits de l'homme et de la démocratie, des dissidents, des journalistes indépendants, des détenus et des prisonniers, et cela en toute impunité. Les pouvoirs publics n'admettent pas le journalisme indépendant et ils ont soumis des journalistes indépendants à diverses mesures dont interdiction de déplacement, détention, harcèlement, confiscation de matériel et menace d'incarcération. La réunion de plus de 3 personnes peut être sanctionnée d'une peine de prison de trois mois au maximum et d'une amende, bien qu'en général ces réunions aient été plus souvent interrompues que les participants poursuivis.

Au Nicaragua, le respect des droits de l'homme et des institutions démocratiques s'est amoindri au cours de l'année passée. Des membres de partis de l'opposition ont été privés de la liberté de réunion. Les élections régionales de mars 2010 le long de la côte caraïbe ont été entachées d'irrégularités généralisées, et des ONG nicaraguayennes dignes de confiance n'ont pas obtenu l'autorisation d'observer les élections. Parmi les autres problèmes figurent la politisation de l'appareil judiciaire et le fait que des groupes favorables au gouvernement peuvent s'adonner à des activités violentes. Les pouvoirs publics ont continué de critiquer les dignitaires religieux qui exprimaient leurs inquiétudes au sujet de l'action et de la politique du gouvernement entravant la participation de la population et les libertés démocratiques. Des responsables du gouvernement ont publiquement critiqué avec force des dignitaires de l'Église catholique qui avaient dénoncé les manipulations électorales.

Au Venezuela, les pouvoirs publics se sont servis de l'appareil judiciaire pour intimider et persécuter des personnes et des organismes qui critiquaient la politique ou l'action du gouvernement, notamment des manifestants pacifiques, des journalistes, un juge, des membres des partis de l'opposition, des ONG, des syndicalistes, des chefs d'entreprise et de simples particuliers. De hauts responsables du gouvernement ont aussi limité la liberté d'expression en harcelant et en intimidant des stations de télévision privées, des organes d'information et des journalistes au moyen de menaces, de confiscation de biens, d'une réglementation spécifique, d'enquêtes pénales et de poursuites en justice. À la fin de décembre, l'Assemblée nationale a adopté un ensemble de lois qui ont encore plus porté atteinte aux principes démocratiques et à leur application. C'est ainsi qu'une loi délègue l'autorité du pouvoir législatif à l'exécutif pour une période supérieure à celle du mandat des députés sortants, en violation des valeurs communes de la Charte démocratique interaméricaine et que d'autres lois imposent de nouvelles restrictions sur les médias indépendants, sur l'Internet, sur les partis politiques et sur les ONG.
(Diffusé par le Bureau des programmes d'information internationale du département d'Etat. Site Internet : http://iipdigital.usembassy.gov/iipdigital-fr/index.html)