mardi 26 avril 2011

Tunisie: Le pays est « pessi-optimiste » au sujet de la situation de la libre expression après Ben Ali, constate la mission du TMG de l'IFEX

En dépit de la libération des blogueurs, activistes et journalistes emprisonnés, dont Fahem Boukadous, les menaces à la liberté d’expression et aux autres droits de la personne en Tunisie ne sont pas disparues avec la chute du Président Zine El Abidine Ben Ali, indique une équipe de sept membres du Groupe d’observation de la Tunisie organisé par l’IFEX (TMG de l’IFEX), qui vient tout juste de terminer une mission dans le pays.
Une délégation du TMG de l’IFEX a en effet passé plus d’une semaine à rencontrer des intervenants, tant anciens que nouveaux, et a constaté qu’il faut accorder la priorité à la « garantie et la protection des droits essentiels en cette phase extraordinaire de transition vers la démocratie, surtout à en prévision des élections du 24 juillet ». Les Tunisiens vont élire une nouvelle assemblée nationale, dont la tâche consistera à proposer une nouvelle constitution.
La délégation a pu rencontrer des groupes de la société civile et s’entretenir avec eux, ce qui tranche de manière frappante sur les missions précédentes - quelques-uns de ces groupes peuvent finalement travailler après s’être fait refuser l’enregistrement sous le règne de Ben Ali - ainsi qu’avec des militants des droits de la personne, des journalistes, des blogueurs et des représentants de tout le spectre politique, y compris le Premier ministre par intérim.
Les délégués ne se sont pas sentis suivis ni intimidés comme cela avait été le cas lors des missions précédentes, bien qu’on ait noté un jour la présence d’un policier en civil à l’extérieur des bureaux de l’Observatoire pour la liberté de presse, d’édition et de création (OLPEC), qui est membre de l’IFEX, et du syndicat des journalistes. L’OLPEC rapporte en outre de l’ingérence dans ses communications, et certains journalistes affirment aussi que leurs lignes téléphoniques sont toujours sous écoute.
La délégation a constaté que les menaces concernant la censure et la désinformation sont « toujours très présentes » - même si on remarque une différence importante depuis le 14 janvier : « Les Tunisiens exercent pleinement leurs libertés retrouvées pour dénoncer publiquement ces situations », ont déclaré les sept membres du TMG de l’IFEX.
Après des décennies de répression et de black-out, le TMG de l’IFEX constate la nécessité fondamentale de réforme du secteur des médias et l’état d’esprit « pessi-optimiste » des journalistes à l’approche des élections, surtout étant donné qu’une bonne partie de l’ancienne structure - et de la vieille garde - est toujours en place.

Les médias électroniques et la presse écrite sont toujours en grande partie dirigés par les mêmes personnes mais, par exemple, la soi-disant « presse poubelle » vise la famille de Ben Ali au lieu de ses vieilles cibles d’autrefois, à savoir les militants des droits de la personne et les journalistes indépendants.
Les journalistes et les défenseurs des droits ont lancé un appel à un soutien international continu pendant la période de transition et au-delà, et demandent en particulier de la formation et des ressources.
Le TMG de l’IFEX fait remarquer que les médias sont actuellement « sous-préparés à répondre aux demandes extraordinaires que pose cette période de transition ». Par exemple, l’Instance nationale pour la Réforme de l’Information et de la
communication (INRIC), qui contribuera à l’élaboration d’un nouveau mécanisme chargé de décider de la façon dont seront attribués les permis de radiodiffusion, « n’a pas les ressources nécessaires pour s’acquitter de son rôle d’organe consultatif efficace ». Au début de la mission, l’Association mondiale des radiodiffuseurs communautaires (AMARC) a organisé avec l’INIIC un atelier sur la réforme des médias.
Boukadous accueille favorablement les efforts du TMG de l’IFEX déployés en son nom. « Grâce à vous, Ben Ali n’a pas tué des dizaines de militants. Le TMG de l’IFEX et le soutien international ont contribué à nous protéger. Nous vous sommes vraiment reconnaissants de votre appui et nous espérons pouvoir continuer à développer cette relation. »
Un rapport complet de la mission du 9 au 16 avril, contenant des recommandations exhaustives, sera rendu public à l’Assemblée générale de l’IFEX, le 1er juin à Beyrouth, tandis que des publications subséquentes auront lieu à Tunis et sur la scène internationale.
Source: Communiqué de l'IFEX

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