dimanche 29 mai 2011

Moyen-Orient et Afrique du Nord: Les femmes paient le prix des soulèvements du Printemps arabe

Les membres de l’IFEX ont célébré la semaine dernière la remise en liberté de deux femmes journalistes au Moyen-Orient et en Afrique du Nord. La journaliste d’Al Jazira Dorothy Parvaz, qui était détenue au secret depuis son arrivée le 29 avril en Syrie où elle s’était rendue pour couvrir les manifestations antigouvernementales, a été remise en liberté après avoir été déportée en Iran. Pour sa part, Clare Morgana Gillis, reporter américaine qui couvrait la Libye pour le site web du magazine « The Atlantic », a été libérée après plus d’un mois de détention. Petite victoire pour la libre expression. Mais cela illustre aussi les risques immenses que courent les femmes sorties du rang pour se porter à l’avant-garde des soulèvements du Printemps arabe, disent les membres de l’IFEX. Les femmes journalistes et les militantes qui ne travaillent pas pour les médias internationaux n’ont pas autant de chance.
À son retour, Parvaz a déclaré avoir vécu une « expérience terrifiante » pendant sa détention en Syrie. « J’ai été pendant trois jours dans un centre de détention en Syrie et tout ce que j’entendais, c’étaient des cris des gens qu’on tabassait sauvagement. Je ne sais pas ce que ces hommes ont fait », a-t-elle déclaré à Al Jazira. « J’ai été menottée de manière répétée, on m’a bandé les yeux, j’ai été emmenée dans la cour de la prison où on m’a laissée là pour que j’entende ces hommes se faire battre. »
Selon Human Rights Watch, la ville de Deraa a subi le plus gros de la violente répression des autorités syriennes, mais l’armée a aussi procédé à travers tout le pays à une vague d’arrestations de militants, d’avocats et de manifestants, dont beaucoup de femmes et d’enfants. Les forces de sécurité ont détenu 11 femmes à cause de leur participation le 30 avril à une manifestation de protestation silencieuse, où il n’y avait que des femmes, près du centre de Damas, selon ce que rapporte Human Rights Watch. Un témoin a déclaré que les forces de sécurité ont tabassé les femmes pour les disperser.
Nulle part peut-être les risques pour les militantes ne sont plus grands qu’à Bahreïn, où pour la première fois, une femme a été condamnée à quatre ans de prison pour son rôle dans les manifestations. Fadhila Moubarak Ahmed a été reconnue coupable la semaine dernière d’avoir offensé un fonctionnaire, d’incitation à la haine du système politique au pouvoir et d’avoir participé à des manifestations illégales, indique le Centre des droits de la personne de Bahreïn (Bahrain Center for Human Rights, BCHR).
Les femmes comme Ahmed se sont retrouvées en première ligne depuis les tout premiers jours des manifestations, en février. Elles ont fait partie de la première vague qui est descendue au square de la Perle à Manama, « assumant les rôles de gestion, se portant au secours - et traitant - les personnes blessées par... les forces de sécurité bahreïnies, et documentant les brutalités commises contre les manifestants », dit le BCHR.
Le BCHR dénonce avec vigueur la répression et la détention des femmes de Bahreïn, qu’il décrit comme le moyen par lequel les autorités forcent les femmes à abandonner leur rôle dans le mouvement de protestation. « C’est aussi un moyen d’ajouter de la pression sur l’opposition pour qu’elle retire ses demandes légitimes », dit le BCHR.
*Selon le BCHR, cependant, un nombre sans précédent de femmes ont été arrêtées par les forces de sécurité - plus de 100 depuis la proclamation de la loi martiale le 15 mars - et le tiers d’entre elles au moins sont toujours détenues. Un bon nombre d’entre elles sont médecins, infirmières et enseignantes. Des filles même sont détenues et priées d’identifier les dissidents dans leurs écoles. De plus, dit le BCHR, ce nombre ne comprend que celles qui se sont donné la peine de s’avancer.
Celles qui sortent de détention font état de mauvais traitements et de torture. La poète Ayat Qurmuzi a été torturée pour lui faire « avouer » devant les caméras des gestes qu’elle n’a pas commis. D’autres ont été contraintes de faire du « travail de femmes », comme de nettoyer les latrines et le mobilier du centre de détention, rapporte le BCHR.
Bien que Zainab al-Khawaja ait échappé à la détention, elle a été traînée au bas des escaliers et menacée de mort lorsque les forces de sécurité se sont présentées chez elle et ont arrêté son père, l’ancien président du BCHR Abdulhadi al-Khawaja, de même que son mari et son beau-frère. Dans les cas où les forces de sécurité ne peuvent trouver ceux qu’elles recherchent, les membres de leur famille, surtout l’épouse ou la mère, sont menacées ou même torturées jusqu’à ce qu’elles révèlent les allées et venues de leur mari ou de leur fils.

Pendant qu’il se trouvait en détention, al-Khawaja lui-même a été agressé sexuellement et s’est fait dire que ses filles Zainab et Maryam, une militante du BCHR qui avait été entendue récemment devant le congrès des États-Unis sur la situation à Bahreïn, seraient violées elles aussi, selon ce que rapporte le BCHR.
Et des centaines d’autres ont perdu leur emploi à cause de leurs opinions politiques. « Cela place un grand nombre de femmes dans une situation de crise financière, celles en particulier dont le mari a été arrêté, ce qui fait d’elles les pourvoyeuses de la famille et des enfants », dit le BCHR.
Selon le BCHR, ces attaques sans précédent contre les femmes ont fait de Bahreïn le pire pays de la région pour ce qui est des femmes arrêtées pour avoir exprimé des opinions politiques. Une femme a même été abattue par un tireur embusqué pendant les manifestations, dit le BCHR.
Malheureusement, Bahreïn est emblématique de ce qui se passe dans toute la région. Dans une affaire notoire survenue en Libye, une femme, Iman al-Obeidi, a rapporté avoir été violée par une quinzaine environ de miliciens pro-Kadhafi. On a rapporté un certain nombre de viols en Égypte pendant la révolution au square Tahrir - une journaliste sud-africaine qui travaille pour le réseau américain CBS, Lara Logan, est l’une des rares femmes qui ont révélé publiquement avoir subi une agression sexuelle.
Même en Égypte, après le changement de régime, les attaques se poursuivent. Nehad Abu-al-Qumsan, présidente du Centre égyptien de défense des droits des femmes (Égyptian Center for Women’s Rights) et épouse de Hafez Abou Seada, qui dirige l’Organisation égyptienne de défense des droits de la personne (Egyptian Organization for Human Rights, EOHR), a reçu une lettre la menaçant de mort si elle poursuit sa campagne en faveur des droits des femmes - une lettre écrite apparemment par des salafis, qui adhèrent à une version stricte de la charia. Les femmes qui ont manifesté le 8 mars pour la Journée internationale des Femmes ont été menacées et se sont fait dire de rentrer chez « et de faire la lessive », rapportent des blogueurs égyptiens.
En Arabie saoudite, qui jusqu’à maintenant a évité les manifestations de masse qui ont renversé ou menacé les autocrates des pays voisins, les femmes sont également attaquées parce qu’elles osent passer outre aux règles.
Poussée par les soulèvements, Manal al-Sharif est montée dans sa voiture et s’est rendue participer aux manifestations, défiant l’interdit des femmes au volant, en vigueur dans le royaume. Elle a affiché sur YouTube une séquence vidéo où on la voit au volant et décrivant les inconvénients pour les femmes qu’il y a à ne pas pouvoir conduire. Al-Sharif a été arrêtée le 22 mai et inculpée d’avoir entaché la réputation du royaume à l’étranger et d’ameuter l’opinion publique, indique Human Rights Watch.
D’après le Réseau arabe d’information sur les droits de la personne (Arabic Network for Humain Rights Information, ANHRI), le blogue de la blogueuse et activiste saoudienne Omaima Al Najjar a été bloqué après qu’elle eut affiché en ligne son appui à al-Sharif.
Mais au lieu d’être découragées par la répression de leurs homologues à Bahreïn et ailleurs, les Saoudiennes ont repris le flambeau. Elles ont entrepris une campagne intitulée « les femmes conduisent », pour conquérir le droit de conduire des voitures, et disent préparer pour le 17 juin une balade symbolique de protestation.
Les protestations du Printemps arabe « ont appris aux Saoudiennes à se serrer les coudes et à agir en équipe », a déclaré à Bloomberg News Wajeeha al-Howeider, une militante saoudienne des droits des femmes.
Le « moment est parfait », dit Noura Abdullah, qui a été arrêtée pour avoir défié publiquement en 1990 l’interdit de conduire visant les femmes. « L’élan est maintenant donné en Arabie saoudite et cela devrait aider. »
Source: Communiqué de l'IFEX

mardi 17 mai 2011

Le couple Obama célèbre la poésie à la Maison-Blanche

Washington - On le ressent au travers de ses discours électoraux ou au choix de ses lectures : le président Obama est sensible aux charmes de la poésie.
Le 11 mai, la Maison-Blanche a organisé une série de manifestations en hommage à la poésie américaine. Michelle Obama, l'épouse du président, avait notamment invité des groupes d'élèves à la Maison-Blanche pour qu'ils puissent lire leurs créations et recevoir des conseils de la part de poètes, au nombre desquels figuraient les poètes officiels Rita Dove et Billy Collins, et d'artistes de renom, tels Common et Aimee Mann. Dans la soirée, ces écrivains ont donné lecture de leurs poèmes en présence du président Obama.
« Un bon poème, a dit le président, résonne au plus profond de nous, il nous fait réfléchir et nous apprend quelque chose sur nous-mêmes et sur le monde dans lequel nous vivons. Les poètes ont toujours joué un rôle important dans la narration de l'histoire de notre pays. » Le président Obama a confié à son auditoire qu'il avait lui-même composé des vers pendant sa jeunesse et, non sans humour, il a dit à ses invités qu'il n'en ferait pas lecture ce soir-là.
Le goût du président pour cette forme d'expression fait le bonheur des poètes américains, qui n'ont pas oublié que Barack Obama avait émaillé des discours électoraux de vers tirés du poème de June Jordan « Poem for South African Women » ou que, juste après avoir été élu, il portait sur lui un recueil de Derek Walcott, « The Collected Poems ». La poète Elizabeth Alexander avait elle-même trouvé extraordinaire, comme elle l'avait confié à la Poetry Foundation, qu'à cette période tumultueuse de son existence « il prenait le temps de se recueillir en se tournant vers la poésie ».
« À chaque fois que notre pays s'est trouvé face à une tragédie », a dit le président en donnant le coup d'envoi de la soirée de la poésie à la Maison-Blanche, « que ce soit au moment de la disparition d'un dirigeant du mouvement des droits civiques, de l'équipage d'une navette spatiale ou de milliers d'Américains qui nous ont quittés un beau jour de septembre, nous nous sommes tournés vers la poésie quand les mots nous manquaient pour exprimer ce que nous ressentions ».
Par Mark Trainer
Rédacteur
(Les articles du site «IIP Digital» sont diffusés par le Bureau des programmes d'information internationale du département d'Etat. Site Internet : http://iipdigital.usembassy.gov/iipdigital-fr/index.html)

dimanche 15 mai 2011

Joe Biden : les relations sino-américaines marqueront le XXIe siècle

Washington - Alors que se déroulait à Washington le troisième Dialogue stratégique et économique annuel entre les États-Unis et la Chine, le vice-président Joe Biden a déclaré, le 9 mai, qu'en raison de l'importance extrême que revêtait la coopération entre les deux plus grandes économies mondiales sur les principaux enjeux planétaires - commerce extérieur, changements climatiques et sécurité notamment - leurs relations allaient sans aucun doute marquer l'histoire du XXIe siècle.
Lors d'un entretien avec le vice-premier ministre chinois Wang Qishan, le conseiller d'État chinois Dai Bingguo, la secrétaire d'État Hillary Clinton et le secrétaire au Trésor Timothy Geithner, M. Biden a tout d'abord souligné que les dialogues annuels entamés en 2009 visaient à « construire des relations dans tout l'éventail des activités de nos deux gouvernements » et à aborder « certains des problèmes déterminants de notre époque ».
« La façon dont nous coopérerons définira dans une mesure significative la manière dont nous ferons face aux défis qui se présentent au monde au début du XXIe siècle », a dit le vice-président.
Observant que les États-Unis et la Chine étaient les premiers producteurs et consommateurs mondiaux d'énergie, il a dit que ce fait soulevait des difficultés communes mais présentait également « une occasion extraordinaire de collaborer à la recherche de solutions axées sur l'énergie propre ».
Selon M. Biden, les deux pays ont besoin de s'entendre sur des modes de coopération là où leurs intérêts mutuels convergent, et ils doivent discuter pareillement des sujets où il existe des « désaccords sérieux », par exemple en matière de droits de l'homme.
Le gouvernement Obama est convaincu que la défense des droits fondamentaux et des libertés publiques - tels que les définissent les engagements internationaux pris par la Chine, notamment la Déclaration universelle des droits de l'homme, ainsi que la constitution même de la Chine - constitue « le meilleur moyen de promouvoir la stabilité et la prospérité à long terme de n'importe quelle société », a affirmé M. Biden.

Pour sa part, Mme Clinton a indiqué que les États-Unis continueraient d'aborder la question épineuse des droits de l'homme avec la Chine « de façon honnête et directe », comme il convient de le faire entre pays amis.
La secrétaire d'État s'est inquiétée des informations selon lesquelles des avocats de l'assistance publique judiciaire, des écrivains, des artistes et d'autres personnalités auraient disparu ou auraient été détenus par les autorités chinoises. Le gouvernement Obama, a-t-elle dit, est particulièrement préoccupé par les conséquences que pourraient avoir les pratiques chinoises en matière de droits de l'homme « sur notre politique intérieure et sur la politique et la stabilité de la Chine et de toute la région ».
« Nous savons, par la longue expérience de l'histoire humaine, que les sociétés qui s'efforcent de respecter les droits de la personne sont plus prospères, plus stables et plus dynamiques », a déclaré Mme Clinton.
Les deux pays doivent s'appliquer davantage à mieux se comprendre et à renforcer encore la confiance afin d'éliminer les craintes et les impressions erronées que certains de leurs citoyens ressentent les uns envers les autres.
« Certains, chez nous, voient les progrès de la Chine comme une menace pour les États-Unis. Certains, en Chine, se demandent si les États-Unis ne cherchent pas à restreindre la croissance chinoise. Ces deux points de vue, nous les rejetons. Nous avons beaucoup plus à gagner de la coopération que du conflit », a déclaré la secrétaire d'État.
Et d'ajouter : « Une Amérique prospère est dans l'intérêt de la Chine, et une Chine dynamique est dans l'intérêt de l'Amérique. Cependant, pour travailler ensemble, il nous faut mieux comprendre nos intentions et nos intérêts réciproques. Nous devons également démystifier nos plans et nos aspirations à long terme. »
Par Stephen Kaufman
Rédacteur
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jeudi 12 mai 2011

Michelle Bachelet : médecin, stratège militaire et chef d'État

C'est grâce à son courage et à sa détermination au moins autant qu'aux circonstances qu'une femme médecin reconvertie dans la politique est devenue la première présidente du Chili, avant d'agir aujourd'hui en faveur de l'égalité des sexes dans le monde.
Agnostique déclarée. Divorcée, mère de trois enfants. Chanteuse de musique folk à ses heures : dans un pays aussi religieux et conservateur que le Chili, le docteur Michelle Bachelet n'avait a priori rien du profil du politicien idéal.
Mais la première femme à avoir été élue démocratiquement à la tête d'un pays d'Amérique du Sud n'a jamais eu peur des contradictions. Elle a su au contraire les mettre à profit.
« Nous avons ouvert les portes et les fenêtres pour laisser entrer les citoyens ordinaires, pour les encourager à participer », a-t-elle déclaré au New York Times, à propos des diverses facettes de son passé qui l'ont finalement aidée à se faire élire présidente.
Ancienne prisonnière politique devenue membre du gouvernement, Mme Bachelet s'est employée, en qualité de ministre puis de présidente, à établir une démocratie stable pendant la transition qui a suivi la dictature militaire répressive du général Augusto Pinochet.
Médecin de formation - épidémiologiste et pédiatre - sa propension à soigner se double d'un talent de stratège militaire, peut-être encore plus prononcé. Elle a étudié les sciences militaires à l'Académie nationale d'études stratégiques et politiques du Chili et au Collège interaméricain de défense de Washington. Elle a remporté la course à la présidence dès sa première campagne.
Et à 59 ans, Mme Bachelet n'est pas près d'avoir fini sa carrière. Récemment nommée à la tête du nouvel organisme des Nations unies, ONU-Femmes, elle poursuit inlassablement son chemin - cette fois au premier rang de la lutte mondiale pour l'égalité des sexes.
« J'ai appris, dans ma famille, que tous les individus devraient avoir les mêmes chances et que la justice et la dignité étaient essentielles. C'est donc dans mes gènes de croire que les gens ont des droits et de penser que nous sommes tous différents et que c'est une très bonne chose car c'est ce qui fait que le monde est plus intéressant », a-t-elle expliqué dans un entretien avec Barbara Crossette publié dans la revue The Nation.
Ces idéaux ont été mis à rude épreuve en 1973 lorsque le président de l'époque, Salvador Allende, a été chassé du pouvoir par le militaire Pinochet. Le père de Mme Bachelet, un général de l'armée de l'air haut placé dans le gouvernement d'Allende, a été placé en détention militaire pour trahison. Il est mort d'une crise cardiaque après avoir été torturé.
Cela n'a en rien atténué l'engagement politique de Mme Bachelet. Elle s'est au contraire davantage investie dans le Mouvement de la jeunesse socialiste. Ce n'est que lorsque sa mère et elle ont quitté le pays pour l'Australie en 1975, après avoir été incarcérées dans des centres de torture du régime de Pinochet, qu'elle a réduit ses activités.

Malgré ce qu'elle a subi pendant ces premières années d'engagement politique, Mme Bachelet s'est par la suite délibérément employée à remédier aux inégalités de la société chilienne. Après avoir été nommée ministre de la Santé en 2000, sous la présidence de Richard Lagos, elle a amélioré l'accès de la population au système de santé public. En 2002, elle est devenue la première femme ministre de la Défense d'Amérique latine. Elle a alors activement favorisé la réconciliation de l'armée et de la société civile, en réformant et en modernisant l'armée chilienne.
« Parce que j'ai été victime de la haine, j'ai consacré ma vie à transformer la haine en compréhension, en tolérance et - pourquoi ne pas le dire - en amour », a-t-elle déclaré dans le discours qui a suivi sa victoire à l'élection présidentielle de 2006.
Bien qu'elle ait commencé sa carrière comme médecin, avant de rapidement monter en grade jusqu'à devenir ministre de la santé, Mme Bachelet a toujours été influencé par la carrière militaire de son père.
« J'ai remarqué que l'incompréhension entre le monde militaire et le monde civil était l'un des obstacles à une véritable démocratie. Ils parlaient différentes langues. Je voulais remédier à cette situation. Je pouvais servir d'intermédiaire entre ces deux mondes », a-t-elle déclaré au Guardian à propos des études postsecondaires qu'elle a entreprises dans le domaine des sciences militaires et qui l'ont conduite à devenir la première femme ministre de la Défense du Chili en 2002.
Malgré tous ses succès, Mme Bachelet n'a pas toujours fait l'unanimité. Elle a été abondamment critiquée pour la politique de son gouvernement en matière d'éducation, ainsi que pour l'échec d'un ambitieux projet de transports publics et une série de conflits du travail sans fin. Mais sa cote de popularité, qui dépassait 84 % lorsqu'elle a quitté ses fonctions en mars 2010, est la plus élevée de tous les présidents de l'histoire du Chili.
Ce succès n'a en rien entamé sa détermination à relever le prochain défi qui l'attend. En juillet 2010, le secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon l'a nommée à la tête du nouvel organisme des Nations unies, ONU Femmes.
Peu après sa nomination, Radio ONU a diffusé une interview dans laquelle Mme Bachelet n'hésitait pas à décrire les difficultés auxquelles elle faisait face dans son nouveau rôle. « Dans de nombreuses régions du monde, la situation des femmes est très difficile. Elles n'ont pas les mêmes possibilités que les hommes en ce qui concerne les droits les plus fondamentaux. Elles sont victimes de discrimination, leurs droits sont bafoués. Il existe encore des endroits où les femmes sont mutilées. Je suis convaincu que nous devons travailler sans relâche pour améliorer leur condition et je sais qu'il s'agit ... d'un travail très difficile ».

algré tous les honneurs qu'elle a reçus dans son rôle de femme chef d'État, Mme Bachelet ne s'est jamais départie de la vision d'un avenir meilleur qui l'animait lorsque, jeune et idéaliste, elle combattait le régime oppressif qui avait tué son père.
Comme elle l'a expliqué au New York Times, « Ce qui m'intéresse le plus, ce que je continue de privilégier, c'est moins de se pencher sur le passé que de créer un meilleur avenir ».
Par Karen Calabria
Karen Calabria est une journaliste indépendante basée à New York.
(Diffusé par le Bureau des programmes d'information internationale du département d'Etat. Site Internet : http://iipdigital.usembassy.gov/iipdigital-fr/index.html)

lundi 9 mai 2011

International / Journée mondiale de la liberté de la presse: Journée mondiale de la Liberté de la presse 2011 : Les médias du XXIe siècle - Nouvelles

Le mois dernier, le blogueur et activiste égyptien Maikel Nabil Sanad a été condamné à trois ans de prison pour avoir insulté l'armée et avoir publié de fausses nouvelles à son sujet. Son crime était d'avoir écrit récemment un blogue qui critiquait l'absence de transparence dans l'armée.
Ce mois-ci, plus de 800 participants de partout dans le monde convergent vers Washington afin d'explorer l'idée que, de la même manière que les nouveaux médias servent à promouvoir la liberté, certains régimes créent des moyens de supprimer les voix en ligne. L'occasion, c'est la Journée mondiale de la Liberté de la presse de l'UNESCO, qui se tient chaque année le 3 mai, dont le thème cette année est : Les médias du XXIe siècle : Nouvelles frontières. De nombreux groupes membres de l'IFEX comptent parmi ceux qui assistent à la fête.
« Grâce aux nouvelles technologies et aux nouveaux médias, nous bénéficions de possibilités d'expression sans précédent. De plus en plus de gens peuvent partager les informations et échanger leurs vues, à l'intérieur et au-delà des frontières nationales. C'est là un avantage pour la créativité, pour des sociétés en santé, pour inclure tout le monde dans de nouvelles formes de dialogue », disent le Secrétaire général des Nations Unies Ban Ki-moon, la Haut Commissaire des Nations Unies aux Droits de l'homme Navi Pillay, et Irina Bokova, Directrice générale de l'UNESCO, dans une déclaration commune.
Dans un nouveau rapport publié pour le 3 mai, ARTICLE 19 reprend le thème de l'UNESCO et nous donne des histoires sur la façon dont les obstacles s'écroulent quand il est question de liberté de parole et de circulation de l'information.
Par exemple, l'année 2010 a été l'année de WikiLeaks, qui a « révolutionné le lancement transnational d'alertes », dit ARTICLE 19. Oui, on s'est servi de Twitter pour organiser des manifestations de protestation en Tunisie et en Égypte, mais ARTICLE 19 attire aussi l'attention sur un groupe d'étudiants en journalisme dans une favela de Rio de Janeiro, au Brésil, qui s'est servi de Twitter pour dire au monde que 42 personnes ont perdu la vie récemment dans une descente liée à la drogue. Le site @vozdacomunidade a fourni le seul et unique reportage qui est parvenu de l'intérieur de la favela.

Grâce aux nouveaux médias, « l'outrage et la honte se répandent également, la corruption est amplifiée, le pouvoir populaire est amplifié, et les gouvernements tombent », dit ARTICLE 19.
Mais, en même temps, « de nombreux gouvernements, qui redoutent ce manque de contrôle, s'efforcent de restaurer ou de fortifier les obstacles afin de retracer, de bloquer, de cibler et de censurer ceux qui se font les champions de la vérité », indique ARTICLE 19. Le rapport du groupe met aussi en lumière des cas où des gouvernements répliquent, des autorités qui interdisent YouTube en Turquie jusqu'à la Corée du Nord qui contrôle la propriété des téléphones mobiles.
Dans un document spécial sur la Journée mondiale de la Liberté de la presse, le Comité pour la protection des journalistes (CPJ) a procédé à l'évaluation des 10 stratégies les plus utilisées pour la répression en ligne et désigné les pays qui battent la marche dans ce domaine. Les techniques vont bien au-delà de la censure du web. Il y a par exemple en Chine les courriels soutenus par l'État, conçus pour s'emparer des ordinateurs personnels des journalistes, la fermeture de la technologie de lutte contre la censure en Iran, le contrôle monopoliste de l'Internet en Éthiopie, et les cyber-attaques soigneusement planifiées contre les sites web de nouvelles au Bélarus.
Selon le CPJ, ce qui surprend le plus au sujet des 10 oppresseurs en ligne, ce n'est pas qui ils sont - ce sont tous des pays qui ont des dossiers effarants de répression - mais la rapidité avec laquelle ils ont adapté de vieilles stratégies au monde en ligne, comme la Syrie qui emprisonne les écrivains en ligne, et la violence avec laquelle on s'attaque aux blogueurs en Russie. Au 1er décembre, 69 journalistes dont le travail a paru surtout en ligne étaient en prison, ce qui représente près de la moitié de tous les journalistes en prison, rappelle le CPJ.

D'après Human Rights Watch, la peine de trois ans de prison infligée à Nabil pourrait constituer le pire coup porté à la libre expression en Égypte depuis que le gouvernement Moubarak avait incarcéré son premier blogueur, Kareem Amer, condamné en 2007 à quatre ans de prison. La sentence est non seulement sévère, mais elle a été infligée par un tribunal militaire au terme d'un procès inique.
Une nouvelle coalition de groupes de défense des droits en Égypte, comprenant le Réseau arabe d'information sur les droits de la personne (Arabic Network for Human Rights Information, ANHRI) et l'Institut du Caire pour les études sur les droits de la personne (Cairo Institute for Human Rights Studies, CIHRS), espère que le gouvernement de transition rompra avec ce genre de procès militaires et avec d'autres pratiques répressives du passé. La Coalition nationale de la liberté des médias profite de l'occasion de la Journée mondiale de la Liberté de la presse pour dévoiler une « Déclaration de la liberté des médias » - sa vision de la façon de développer et de libérer les médias égyptiens.
D'après le directeur général de Human Rights Watch, Kenneth Roth, préparer une défense constitue la seule bonne chose à faire, surtout au moment où nous jouissons des progrès réalisés récemment. « Pour le moment, les forces de la liberté ont le dessus. Mais la vigilance reste de mise avant l'inévitable réaction », dit-il.

Roth presse Facebook et Twitter de joindre les rangs de l'Initiative de Réseau mondial (Global Network Initiative), laquelle consiste en un code de conduite volontaire mis au point par Google, Yahoo! et Microsoft, conjointement avec Human Rights Watch et d'autres organisations non gouvernementales, dont le CPJ, Index on Censorship et le Comité mondial pour la liberté de la presse, qui sont membres de l'IFEX. Cette initiative facilite la résistance que les sociétés commerciales peuvent opposer aux exigences des gouvernements qui veulent qu'elles révèlent l'identité des utilisateurs anonymes ou qui veulent bloquer toute discussion de certains sujets.
Les gouvernements sympathiques à la cause de la liberté d'expression ont aussi un rôle à jouer. « Les entreprises de médias sociaux pourraient mieux résister aux exigences répressives si l'acquiescement était interdit par la loi », dit Roth. « Ces gouvernements devraient aussi financer une gamme étendue de technologies et d'initiatives visant à faire échouer la censure. »
« Les gouvernements pourraient en outre rechercher des moyens créatifs de combattre la censure, par exemple en incluant la liberté de l'Internet dans les ententes commerciales, comme c'est le cas actuellement pour les droits du travail », a-t-il ajouté.
À l'occasion de la Journée mondiale de la Liberté de la presse, « la révolution des médias suscite de nouveaux débats sur la liberté d'expression, sur la nature de la réglementation, sur l'équilibre entre l'expression et la responsabilité », dit l'ONU. « Nous ne devons pas hésiter à examiner ces questions sous tous les angles. Nous devons tous nous montrer à la hauteur de la situation et accepter la responsabilité du changement. »
Source: Communiqué de l'IFEX

Obama s'explique sur sa décision ne pas rendre publiques les photos de Ben Laden

La Maison-Blanche
Bureau du secrétaire de presse
Le 4 mai 2011
Conférence de presse du secrétaire de presse Jay Carney
(Extrait)
M. CARNEY : Mesdames et Messieurs, bonjour. Avant de répondre à vos questions, je voudrais vous faire savoir que le président a pris la décision de ne rendre publique aucune photographie de la dépouille mortelle d'Oussama Ben Laden. Et je souhaiterais vous citer les paroles mêmes du président lors de l'interview qu'il a accordée il y a une heure environ pour expliquer sa décision.
Il s'agit d'un entretien avec Steve Kroft pour l'émission « 60 minutes » de CBS. La discussion portait sur le moment où le corps de Ben Laden a été retiré du complexe, et M. Kroft a demandé au président comment on savait que c'était bien lui. Le président a répondu :
« Lorsqu'ils ont atterri, nous avions une confirmation très nette à ce moment-là que c'était lui. Des photographies avaient été prises. Une analyse faciale a indiqué que c'était réellement lui. Nous n'avions pas encore effectué les analyses d'ADN, mais déjà nous étions sûrs à 95 %.

Question - Avez-vous vu ces photographies ?
Le président - Oui.

Question - Quelle a été votre réaction quand vous les avez vues ?
Le président - C'était lui.

Question - Pourquoi ne les avez-vous pas rendues publiques ?
Le président - Nous en avons discuté entre nous. Comprenez bien que nous sommes absolument certains que c'était lui. Nous avons recueilli et analysé des échantillons d'ADN et il ne fait aucun doute que nous avons tué Oussama Ben Laden. Il est important, à notre avis, d'empêcher que des photos brutes d'une personne qui a été atteinte à la tête n'aillent flotter n'importe où, pour inciter à plus de violence ou servir d'outil de propagande. Cela ne cadre pas avec nos valeurs. Nous n'allons pas exhiber ce genre de chose comme trophée.
Le fait est qu'il s'agit de quelqu'un qui méritait la justice qu'il a reçue, et je pense que les Américains et les gens de par le monde sont contents qu'il ne soit plus là. Mais nous n'avons pas besoin d'enfoncer le clou. Et je pense que vu le caractère très cru de ces photos, cela pourrait créer un risque sur le plan de la sécurité nationale. J'en ai parlé à Bob Gates et à Hillary Clinton, qui sont tous deux d'accord.

Question - Il y a des gens au Pakistan, par exemple, qui disent que tout cela n'est qu'un tissu de mensonges, une nouvelle supercherie américaine. Oussama n'est pas mort.
Le président - La vérité est que nous guettions la réaction mondiale. Il ne fait aucun doute que Ben Laden est mort. Cela ne fait certainement aucun doute parmi les membres d'Al-Qaïda. Par conséquent, nous ne pensons pas qu'une photographie puisse, en soi, y changer quoi que ce soit. Il y a des gens qui vont le nier. Mais le fait est que vous ne verrez plus Ben Laden marcher encore sur cette terre. »
Ainsi se conclut cet extrait. Je pense qu'il présente de façon assez complète les raisons pour lesquelles le président a pris la décision qu'il a prise. Je suis prêt à répondre à vos questions.
(Diffusé par le Bureau des programmes d'information internationale du département d'Etat. Site Internet : http://iipdigital.usembassy.gov/iipdigital-fr/index.html)

jeudi 5 mai 2011

Libye: Les membres de l'IFEX rendent hommage aux photojournalistes qui ont perdu la vie la semaine dernière

Les photographes de guerre Chris Hondros et Tim Hetherington ont été tués la semaine dernière tandis qu'ils couvraient les combats entre les forces pro-Kadhafi et les rebelles pour le contrôle de la ville libyenne de Misrata. Deux autres journalistes, Guy Martin, un Anglais qui travaille pour l'agence de photos Panos, et Michael Christopher Brown, photojournaliste chez Corbis, ont été blessés gravement par le même tir de mortier. Les membres de l'IFEX ont rendu hommage aux journalistes et mettent régulièrement à jour les nouvelles sur la situation de la libre expression en Libye.
Hetherington a remporté plusieurs récompenses distinguées, dont le Prix mondial de la Photo en 2007 pour sa couverture des conflits au cours de la dernière décennie. Il a aussi co-réalisé « Restrepo », un documentaire mis en nomination pour un Oscar, qui traite des soldats des États-Unis en guerre en Afghanistan.
Au fil des ans, Human Rights Watch a travaillé avec Hetherington sur un certain nombre d'histoires portant sur les droits de la personne, notamment lors d'assignations au Darfour, au Tchad et au Sri Lanka. « Tim Hetherington était beaucoup plus qu’un correspondant de guerre », a dit Kenneth Roth, directeur général de Human Rights Watch, dans l'hommage qu'il lui a rendu. « Il avait un talent extraordinaire pour documenter, avec un style imagé et plein de compassion, les drames humains qui se cachent derrière les manchettes. »
« C'est une perte dévastatrice pour beaucoup d'entre nous sur le plan personnel », a déclaré Roth. « Mais c'est aussi une perte dévastatrice pour la communauté des droits de la personne. Son travail a rehaussé la visibilité de nombreux conflits oubliés dans le monde. Le legs que constituent ses photographies exceptionnelles saura inspirer ceux qui marcheront dans ses pas. »
Source: Communiqué de l'IFEX