lundi 9 mai 2011

Obama s'explique sur sa décision ne pas rendre publiques les photos de Ben Laden

La Maison-Blanche
Bureau du secrétaire de presse
Le 4 mai 2011
Conférence de presse du secrétaire de presse Jay Carney
(Extrait)
M. CARNEY : Mesdames et Messieurs, bonjour. Avant de répondre à vos questions, je voudrais vous faire savoir que le président a pris la décision de ne rendre publique aucune photographie de la dépouille mortelle d'Oussama Ben Laden. Et je souhaiterais vous citer les paroles mêmes du président lors de l'interview qu'il a accordée il y a une heure environ pour expliquer sa décision.
Il s'agit d'un entretien avec Steve Kroft pour l'émission « 60 minutes » de CBS. La discussion portait sur le moment où le corps de Ben Laden a été retiré du complexe, et M. Kroft a demandé au président comment on savait que c'était bien lui. Le président a répondu :
« Lorsqu'ils ont atterri, nous avions une confirmation très nette à ce moment-là que c'était lui. Des photographies avaient été prises. Une analyse faciale a indiqué que c'était réellement lui. Nous n'avions pas encore effectué les analyses d'ADN, mais déjà nous étions sûrs à 95 %.

Question - Avez-vous vu ces photographies ?
Le président - Oui.

Question - Quelle a été votre réaction quand vous les avez vues ?
Le président - C'était lui.

Question - Pourquoi ne les avez-vous pas rendues publiques ?
Le président - Nous en avons discuté entre nous. Comprenez bien que nous sommes absolument certains que c'était lui. Nous avons recueilli et analysé des échantillons d'ADN et il ne fait aucun doute que nous avons tué Oussama Ben Laden. Il est important, à notre avis, d'empêcher que des photos brutes d'une personne qui a été atteinte à la tête n'aillent flotter n'importe où, pour inciter à plus de violence ou servir d'outil de propagande. Cela ne cadre pas avec nos valeurs. Nous n'allons pas exhiber ce genre de chose comme trophée.
Le fait est qu'il s'agit de quelqu'un qui méritait la justice qu'il a reçue, et je pense que les Américains et les gens de par le monde sont contents qu'il ne soit plus là. Mais nous n'avons pas besoin d'enfoncer le clou. Et je pense que vu le caractère très cru de ces photos, cela pourrait créer un risque sur le plan de la sécurité nationale. J'en ai parlé à Bob Gates et à Hillary Clinton, qui sont tous deux d'accord.

Question - Il y a des gens au Pakistan, par exemple, qui disent que tout cela n'est qu'un tissu de mensonges, une nouvelle supercherie américaine. Oussama n'est pas mort.
Le président - La vérité est que nous guettions la réaction mondiale. Il ne fait aucun doute que Ben Laden est mort. Cela ne fait certainement aucun doute parmi les membres d'Al-Qaïda. Par conséquent, nous ne pensons pas qu'une photographie puisse, en soi, y changer quoi que ce soit. Il y a des gens qui vont le nier. Mais le fait est que vous ne verrez plus Ben Laden marcher encore sur cette terre. »
Ainsi se conclut cet extrait. Je pense qu'il présente de façon assez complète les raisons pour lesquelles le président a pris la décision qu'il a prise. Je suis prêt à répondre à vos questions.
(Diffusé par le Bureau des programmes d'information internationale du département d'Etat. Site Internet : http://iipdigital.usembassy.gov/iipdigital-fr/index.html)

jeudi 5 mai 2011

Libye: Les membres de l'IFEX rendent hommage aux photojournalistes qui ont perdu la vie la semaine dernière

Les photographes de guerre Chris Hondros et Tim Hetherington ont été tués la semaine dernière tandis qu'ils couvraient les combats entre les forces pro-Kadhafi et les rebelles pour le contrôle de la ville libyenne de Misrata. Deux autres journalistes, Guy Martin, un Anglais qui travaille pour l'agence de photos Panos, et Michael Christopher Brown, photojournaliste chez Corbis, ont été blessés gravement par le même tir de mortier. Les membres de l'IFEX ont rendu hommage aux journalistes et mettent régulièrement à jour les nouvelles sur la situation de la libre expression en Libye.
Hetherington a remporté plusieurs récompenses distinguées, dont le Prix mondial de la Photo en 2007 pour sa couverture des conflits au cours de la dernière décennie. Il a aussi co-réalisé « Restrepo », un documentaire mis en nomination pour un Oscar, qui traite des soldats des États-Unis en guerre en Afghanistan.
Au fil des ans, Human Rights Watch a travaillé avec Hetherington sur un certain nombre d'histoires portant sur les droits de la personne, notamment lors d'assignations au Darfour, au Tchad et au Sri Lanka. « Tim Hetherington était beaucoup plus qu’un correspondant de guerre », a dit Kenneth Roth, directeur général de Human Rights Watch, dans l'hommage qu'il lui a rendu. « Il avait un talent extraordinaire pour documenter, avec un style imagé et plein de compassion, les drames humains qui se cachent derrière les manchettes. »
« C'est une perte dévastatrice pour beaucoup d'entre nous sur le plan personnel », a déclaré Roth. « Mais c'est aussi une perte dévastatrice pour la communauté des droits de la personne. Son travail a rehaussé la visibilité de nombreux conflits oubliés dans le monde. Le legs que constituent ses photographies exceptionnelles saura inspirer ceux qui marcheront dans ses pas. »
Source: Communiqué de l'IFEX

mardi 3 mai 2011

Introduction du Rapport sur les droits de l'homme dans le monde en 2010

Département d'État des États-Unis
Bureau de la démocratie, des droits de l'homme et du travail
Rapport sur les droits de l'homme dans le monde en 2010
Le présent rapport fournit des détails très amples sur la situation des droits de l'homme dans plus de 190 pays au cours de l'année 2010. Toutefois, du fait que nous faisons paraître ce rapport trois mois après le début de l'année 2011, nos perspectives sur de nombreuses questions sont maintenant influencées par les changements considérables qui se produisent actuellement dans des pays du Moyen-Orient. À l'heure actuelle, nous ne pouvons pas prévoir le résultat de ces changements et nous n'en connaîtrons pas les effets durables pendant des années. Comme la dynamique interne de chacun de ces pays est différente, il ne convient pas de procéder à une analyse globale pour toute la région. Dans des pays tels que la Tunisie et l'Égypte, on observe que la population réclame une participation importante à la vie politique, des libertés fondamentales et de plus grandes possibilités économiques. Ces exigences sont profondes, de source locale et elles sont exprimées par de nouveaux militants, dont un grand nombre sont des jeunes. Ces citoyens cherchent à mettre en place dans leur pays une démocratie durable où les pouvoirs publics respectent les droits de l'homme universels de la population. S'ils y parviennent, la région du Moyen-Orient, ainsi que le reste du monde, connaîtra une amélioration.

Les États-Unis continuent de suivre de près la situation dans ces pays, tout en sachant que le passage à la démocratie n'est pas automatique, qu'il prendra du temps et qu'il exigera une grande attention. En Égypte, nous attendons que l'état d'urgence soit levé, comme le Conseil suprême des forces armées s'est engagé à le faire avant les élections législatives. En Tunisie, nous sommes encouragés par la création d'une commission chargée d'enquêter sur les violations des droits de l'homme qui ont eu lieu pendant le soulèvement.

Si nous abordons ces faits et d'autres répercussions à court terme, les historiens auront l'avantage de disposer de plus de temps et de perspectives plus longues pour nous aider à comprendre ce qui a déclenché ces mouvements populaires. Néanmoins, on peut dire que trois tendances ont nettement contribué à leur naissance et aux autres changements qui ont eu lieu dans le monde entier en 2010. La première est la croissance immense des organisations non gouvernementales qui défendent une vaste gamme de causes relatives à la démocratie et aux droits de l'homme. Il y a cinquante ans, au moment de la création de l'association Amnesty International, peu de pays en dehors de l'Amérique du Nord et de l'Europe de l'Ouest comptaient des associations locales de défense des droits de l'homme. De nos jours, il existe des organisations non gouvernementales (ONG) locales dans presque tous les pays du monde. La croissance de ces organisations a été considérable, et dans de nombreux pays ces organisations composées de citoyens ont été créées en dépit de grandes difficultés et seulement parce que des militants ont été disposés à assumer de grands risques pour eux-mêmes. La secrétaire d'État, Mme Clinton, a mis en évidence l'importance de ces organisations lors du discours qu'elle a prononcé en juillet 2010 à Cracovie (Pologne) devant des représentants de la Communauté des démocraties. Comme elle l'a dit, « les sociétés progressent lorsque les citoyens qui les composent disposent des moyens de transformer des intérêts communs en des actions prises en commun qui servent le bien commun ».

Dans des sociétés fermées, où les gouvernements répressifs cherchent à contrôler et à étouffer le débat sur des questions politiques et sociales délicates, les pouvoirs publics considèrent ces associations locales indépendantes comme une menace plutôt que comme une ressource, et les défenseurs de la démocratie et des droits de l'homme font l'objet d'un traitement particulièrement dur. Par exemple, en Biélorussie, plus de 700 militants de la cause de la démocratie, y compris 7 candidats à la présidence, ont été arrêtés lors de manifestations populaires après l'élection présidentielle de décembre 2010 qui a été entachée d'irrégularités. Dans les semaines qui ont suivi, les bureaux et les domiciles de représentants de la société civile, de journalistes indépendants et de militants politiques ont fait l'objet de perquisitions dans le cadre de mesures visant à empêcher les activités politiques indépendantes et la liberté d'expression.

Au cours des dernières années, plus de 90 États ont cherché à faire adopter des lois et une réglementation restrictives qui entravent la capacité des associations à se constituer, à fonctionner librement ou à recevoir des fonds de l'étranger. Un projet de loi relatif aux ONG déposé en décembre au Cambodge illustre ces démarches. Il prévoit d'appliquer aux ONG de lourdes formalités, de mettre en place des obstacles à la déclaration des ONG étrangères, d'exiger de ces dernières qu'elles collaborent avec les pouvoirs publics et d'interdire les ONG qui ne sont pas déclarées. En Éthiopie, une nouvelle loi sur les associations de la société civile est entrée en vigueur en février après une période de grâce d'un an. Elle interdit aux œuvres caritatives, aux sociétés et aux associations qui reçoivent plus de 10 % de leur financement de sources étrangères d'avoir des activités visant à promouvoir les droits de l'homme et la démocratie, les droits des enfants et des handicapés, l'égalité entre les États, les nationalités, les peuples, les sexes et les religions, le règlement des conflits ou la réconciliation ainsi que la justice. Pendant la période de grâce, les principaux organismes de défense des droits de l'homme de l'Éthiopie se sont adaptés en se déclarant soit comme œuvres caritatives locales, ce qui veut dire qu'ils ne pouvaient pas obtenir plus de 10 % de leur financement de bailleurs de fonds étrangers, soit en tant qu'œuvres caritatives « résidentes », ce qui les autorisait à recevoir des dons, mais leur interdisait de jouer un rôle actif dans les domaines énumérés ci-dessus. On comptait 3.522 associations déclarées avant l'adoption de la loi et seulement 1.655 après son adoption.

Mme Clinton a fait allusion à ces restrictions inquiétantes qui frappent la société civile dans son discours de Cracovie, lorsqu'elle a fait état d'un « groupe de pays où les murs se ferment sur les associations civiques » et déclaré que « lorsque les pouvoirs publics s'attaquent au droit des citoyens d'œuvrer de concert, comme ils l'ont fait tout au long de l'histoire, les sociétés connaissent la stagnation et la décadence ». Comme on peut l'observer au Moyen-Orient et ailleurs, les pouvoirs publics ne peuvent pas étouffer la société civile indéfiniment et ils ne peuvent jamais le faire légitimement.

La deuxième tendance importante est la croissance considérable de l'usage de l'Internet, des téléphones portables et d'autres technologies qui permettent d'entrer en communication instantanée avec des milliards de personnes à travers le monde. Comme Mme Clinton l'a fait remarquer dans un discours récent sur la liberté de l'Internet, l'Internet est devenu le lieu d'information du XXIe siècle. On a beaucoup dit et écrit au sujet des effets de ces techniques de communication qui ont permis à des Égyptiens et à des Tunisiens de se mobiliser dans les semaines et les mois précédant le début des manifestations. Si c'est le courage des meneurs qui a été la force déterminante, on ne peut pas nier que ces nouvelles technologies alliées au pouvoir des stations de télévision et de l'Internet de diffuser des vidéos obtenues de citoyens à l'aide de téléphones portables en ont amplifié les effets.

À l'heure actuelle, plus de 2 milliards de personnes réparties dans la plupart des pays du monde ont accès à l'Internet, et le nombre d'abonnements à des téléphones portables est d'environ 5 milliards. Ces chiffres devraient augmenter considérablement dans les quinze prochaines années. Par ailleurs, alors que de plus en plus de gens réussissent à avoir accès à ces technologies remarquables et qu'ils les utilisent tant pour recueillir des informations sur les droits de l'homme et les faire connaître que pour communiquer avec d'autres militants, un nombre croissant d'États consacrent plus de temps, d'argent et d'attention aux mesures destinées à réduire l'accès à ces nouveaux moyens de communication. Une quarantaine d'États appliquent maintenant un ensemble de limites réglementaires et de contrôles techniques à l'accès à l'Internet et ont recours à des technologies destinées à limiter la liberté d'expression et à porter atteinte à la vie privée de ceux qui se servent de ces technologies en évolution rapide.

En 2010, l'Arabie saoudite a restreint l'accès à l'Internet et porté atteinte à l'intimité d'internautes. Un organisme officiel, la Commission des technologies de la communication et de l'information, a surveillé de manière abusive le courrier électronique, les conversations sur l'Internet et a bloqué des sites dont certaines pages portaient sur l'hindouisme, le judaïsme, le christianisme et certaines formes de l'islam jugés incompatibles avec la charia et avec la réglementation nationale. Au Soudan, le gouvernement a surveillé les communications par Internet et bloqué, lors des élections, l'accès au site Sudan Vote Monitor. La Chine a contrôlé étroitement le contenu de l'Internet et son accès et a arrêté ceux qui exprimaient des opinions critiques du gouvernement ou de sa politique. Au Vietnam, le gouvernement a orchestré des attaques contre des sites Internet émettant des critiques et espionné les blogueurs dissidents. Vingt-cinq dissidents ont été arrêtés au cours de l'année, et la police est entrée de force dans le domicile d'un certain nombre d'autres pour s'emparer d'ordinateurs, de téléphones portables et d'autres appareils.

La troisième tendance, et c'est celle qui s'oriente dans une direction négative, est la montée incessante de la violence, des persécutions et de la discrimination officielle et sociétale envers les membres de groupes vulnérables, notamment de minorités raciales, religieuses ou ethniques ou de majorités sans moyens d'action. Dans de nombreux pays, ce genre de discrimination a touché les femmes, les enfants, les handicapés, les autochtones, les homosexuels, les lesbiennes, les bisexuels et les transsexuels et les membres d'autres groupes vulnérables qui n'ont pas le pouvoir politique nécessaire pour défendre leurs intérêts. Souvent des membres de ces groupes ont été privés de possibilités économiques ou de la capacité de suivre leurs traditions ou pratiques sociales ou culturelles ou encore ils ont fait l'objet de restrictions en ce qui concerne la liberté d'expression ou de réunion à des fins pacifiques ou le droit de constituer des associations ou des organisations.

Au Pakistan, les violations de la liberté religieuse ainsi que la violence et la discrimination envers les minorités religieuses se sont poursuivies. Les lois sur le blasphème ont servi à harceler des minorités religieuses ainsi que des musulmans vulnérables ou des musulmans dont les vues n'étaient pas conformes à celles de la majorité de leurs coreligionnaires. (Pendant les deux premiers mois de 2011, deux hauts responsables du gouvernement qui avaient critiqué publiquement ces lois ont été assassinés.) En Arabie saoudite, des restrictions ont sévèrement entravé la liberté religieuse, et la discrimination fondée sur la religion y était courante. En Chine, le gouvernement a continué de diaboliser le dalaï lama et a réprimé sévèrement les Ouighours musulmans au Xinjiang et les bouddhistes tibétains. On a signalé un accroissement des actes antisémites à travers le monde, dont la profanation de cimetières, des graffiti et des libelles sanguinaires, ainsi que la négation de l'holocauste, le révisionnisme et la glorification. Il y a également eu des épisodes marqués par l'expression de l'antisémitisme lors des manifestations au Moyen-Orient.

Des personnes à travers le monde continuent de faire l'objet de discrimination et d'intimidation à cause de leur orientation sexuelle ou de leur identité sexuelle. Le Honduras a observé un brusque accroissement de l'assassinat par des inconnus de membres de la communauté des homosexuels, des lesbiennes, des bisexuels et des transsexuels. Par ailleurs, dans un grand nombre de pays d'Afrique, du Moyen-Orient et des Caraïbes, les rapports sexuels entre personnes du même sexe demeurent un acte criminel, et, en appliquant de telles lois et d'autres mesures de ce genre, l'État renforce et encourage la discrimination et l'intolérance de la part de l'ensemble de la population. En Ouganda, par exemple, l'intimidation et le harcèlement de membres de cette communauté s'est aggravée au cours de l'année, et des responsables politiques et religieux ont proféré des menaces à leur égard.

L'exploitation des travailleurs a aussi constitué dans de nombreux pays un problème que les menaces dirigées contre les travailleurs désireux de se syndicaliser ont aggravé. De nouveau en 2010, l'État ouzbek a forcé des milliers d'adultes et d'enfants à travailler lors de la récolte annuelle du coton. Au Bangladesh, les mauvaises conditions de travail ont causé la mort de travailleurs qui aurait pu être évitée, notamment dans le secteur de l'habillement. Ce pays a aussi connu des manifestations fréquentes de mécontentement de travailleurs, qui ont parfois fait des victimes, en particulier dans le secteur du prêt-à-porter et dans les zones franches industrielles.

Ces tendances sont davantage illustrées ci-dessous par les brefs aperçus portant sur 27 pays (rangés alphabétiquement par zone géographique). La section sur les faits saillants dans divers pays offre des exemples qui illustrent les tendances de la situation des droits de l'homme en 2010. Dans certains de ces pays, il y a eu des faits négatifs ou le bilan des droits de l'homme a constitué un ensemble de faits positifs et négatifs. Dans d'autres pays cités ci-dessous, nous faisons état des tendances positives constatées en 2010. Les autres sections du rapport offrent un examen beaucoup plus détaillé de ces tendances dans 167 autres pays.

Le rapport de 2010 constitue la trente-cinquième édition annuelle de ce document du département d'État sur la situation des droits de l'homme dans le monde. Cette année, le rapport porte sur 194 pays. De simple réponse à la demande du Congrès, au milieu des années 1970, de dresser un rapport sur la situation des droits de l'homme dans les pays qui recevaient une aide des États-Unis, il est devenu une analyse détaillée du respect des droits de l'homme dans tous les États qui sont membres de l'Organisation des Nations unies. Le rapport donne un aperçu de la situation des droits de l'homme dans le monde entier en tant que moyen de sensibiliser l'opinion à cette situation, en particulier aux conditions qui ont des effets sur le bien-être des femmes, des enfants, des minorités raciales et religieuses, des victimes de la traite, des membres des groupes indigènes et des communautés ethniques, des handicapés, des minorités sexuelles, des réfugiés et des membres d'autres groupes vulnérables.

Tout comme l'ampleur du rapport du département d'État s'est accrue, l'usage des rapports par pays s'est étendu à travers le monde. Outre le fait qu'ils fournissent des données utiles au Congrès pour prendre des décisions en matière de financement et de politique, ils sont utilisés par tous les rouages de l'État fédéral et par de nombreux gouvernements étrangers. Fait aussi important, ils servent de plus en plus à des particuliers et à des organisations non gouvernementales de sources essentielles d'information sur ce qui se passe dans le monde. Ils sont traduits dans une cinquantaine de langues et diffusés sur l'Internet afin de faciliter la dissémination de ces informations.

Le gouvernement des États-Unis dresse le rapport sur les droits de l'homme parce qu'il estime indispensable que les pays, y compris les États-Unis, veillent à ce que le respect des droits de l'homme fasse partie intégrante de la politique étrangère. Il fournit ce rapport en tant que forme d'étude et d'analyse générales.

Le rapport ne porte pas sur la situation des droits de l'homme aux États-Unis, même si le gouvernement actuel s'est engagé à examiner de près et d'un œil critique les résultats du pays dans ce domaine alors même qu'il met en évidence les pratiques des autres pays. En novembre, les États-Unis ont soumis leur premier rapport sur les droits de l'homme dans leur territoire au Conseil des droits de l'homme de l'ONU à Genève, dans le cadre de l'examen périodique universel. Pour préparer ce rapport, nous avons eu des consultations approfondies avec divers organismes de la société civile américaine et avec des responsables amérindiens. Le mois dernier, nous avons assisté de nouveau à la réunion du Conseil des droits de l'homme à Genève pour présenter notre réponse aux recommandations que d'autres États nous avaient faites.

De même, nous fournissons sans cesse des renseignements sur notre situation des droits de l'homme conformément à nos obligations découlant de traités. En janvier 2010, nous avons soumis des rapports périodiques sur notre application des protocoles optionnels de la Convention sur les droits de l'enfant. En 2011, nous allons soumettre des rapports périodiques au sujet de l'application de la Convention internationale sur les droits civiques et politiques, de la Convention contre la torture et de la Convention sur l'élimination de la discrimination raciale. En 2010, le Rapport du département d'État sur la traite des personnes comportait, pour la première fois, une section sur les États-Unis, qui ont été classés en fonction des mêmes critères que ceux qu'ils appliquent aux autres pays.

Un dernier mot au sujet de la production de ces rapports. Les rapports portant sur 194 pays sont détaillés si ce n'est exhaustifs. Leur préparation constitue une tâche herculéenne qui exige des efforts extraordinaires de la part d'une équipe de responsables résolus dans les ambassades des États-Unis à travers le monde et de leurs homologues à Washington, notamment le personnel dévoué du Bureau de la démocratie, des droits de l'homme et du travail. Chaque équipe affectée à un pays recueille, analyse et synthétise les renseignements provenant de toute une variété de sources, dont des organismes nationaux et internationaux de défense des droits de l'homme, d'autres États, des organisations multilatérales et des membres de la société civile. Une fois les rapports élaborés, ils sont rigoureusement examinés, corrigés, et les faits cités sont vérifiés aux fins d'exactitude et d'objectivité.

Faits saillants dans quelques pays

En 2010, des gouvernements à travers le monde ont continué de commettre de graves violations des droits de l'homme. Les paragraphes ci-dessous décrivent la situation des droits de l'homme et les tendances principales dans des pays où ces violations ont été particulièrement graves. Nous faisons aussi état de l'Ukraine, où il y a eu en 2010 un retour en arrière après l'évolution positive de ces dernières années. La présente section commence par la mention de 3 pays, la Colombie, la Guinée, l'Indonésie, où des faits marquants positifs ont eu lieu en matière de droits de l'homme en 2010.

La Colombie est un pays qui a connu une amélioration notable de la situation des droits de l'homme en 2010. Peu de temps après être entré en fonction en août, le président Santos et son gouvernement ont renforcé les relations des pouvoirs publics avec la société civile et les défenseurs des droits de l'homme, en organisant des consultations de haut niveau, en exprimant publiquement leur soutien à ces défenseurs, en entamant un dialogue avec eux et en appuyant les efforts visant à accroître les sanctions contre ceux qui profèrent des menaces et qui commettent des actes de violence à l'encontre de militants des droits de l'homme. Le gouvernement a fait progresser l'adoption d'une loi destinée à restituer les terres confisquées et à offrir une indemnisation aux victimes. Les exécutions sommaires ont fortement diminué par rapport à 2008 et à 2009, et plusieurs hauts officiers des forces armées ont été condamnés pour avoir commis des violations des droits de l'homme. Certains abus ont cependant continué, comme les menaces dont ont fait l'objet des défenseurs des droits de l'homme et des syndicalistes. Le ministère de la défense a commencé de mettre en œuvre un accord avec les services du Haut-Commissariat des Nations unies pour les droits de l'homme visant à suivre les mesures prises par ce ministère pour améliorer le respect des droits de l'homme.

En décembre 2010, le premier président élu démocratiquement en Guinée depuis l'accession de ce pays à son indépendance en 1958 est entré en fonction. Le peuple a choisi M. Alpha Condé, qui était depuis longtemps à la tête de l'opposition et qui était le candidat du Rassemblement du peuple de Guinée, comme son président à l'issue de deux tours de scrutin. Même si l'on a observé des actes de violence à la suite du second tour de scrutin, on considère en général que l'élection a été libre et honnête.

En Indonésie, le respect des droits de l'homme a continué de s'accroître en 2010, douze ans après le passage de ce pays à la démocratie. Si les faiblesses de l'appareil judiciaire persistent, le président Susilo Bambang Yudhoyono, qui a été réélu d'une manière démocratique en juillet 2009, est resté un grand partisan de l'État de droit et de la responsabilisation, et la société civile et les médias figurent toujours parmi les plus dynamiques en Asie. La professionnalisation des forces armées s'est poursuivie, mais de graves violations des droits de l'homme ont été commises par des militaires, en particulier en Papouasie, et les peines, quand elles ont été appliquées, n'ont souvent pas été assorties aux crimes commis.

Afrique

La Côte d'Ivoire a terminé l'année 2010 dans une impasse pour ce qui est de la présidence, à la suite de l'élection d'octobre au cours de laquelle le président sortant, M. Laurent Gbagbo, qui était le candidat du Front populaire ivoirien (FPI), et le chef de l'opposition, M. Alassane Ouattara, qui était le candidat du Rassemblement des républicains de Côte d'Ivoire (RDR), s'opposaient lors du second tour de scrutin le 28 novembre. Le 2 décembre, la Commission électorale indépendante (CEI) a déclaré que M. Ouattara avait remporté l'élection avec 54,1 % des suffrages contre 45,9 % pour M. Gbagbo. L'élection a été déclarée libre et honnête par l'ONU et par des missions d'observateurs étrangers et ivoiriens. M. Gbagbo a refusé d'accepter les résultats de l'élection en faisant état de fraude et d'intimidation d'électeurs dans plusieurs régions. Aussi bien M. Ouattara que M. Gbagbo ont prêté le serment d'entrée en fonction le 3 décembre. À la fin de l'année, le président Ouattara dirigeait à Abidjan son gouvernement du Golf Hôtel qui faisait l'objet d'un blocus par les forces favorables à M. Gbagbo. Ce dernier retenait le contrôle des ressources de l'État, dont la station de télévision nationale, les forces de sécurité et le ministère des finances. Le 16 décembre, les forces de sécurité ont tiré sur des partisans du président Ouattara lors d'une manifestation. Au moins 20 personnes ont été tuées, de nombreuses autres blessées et des centaines arrêtées. Pendant la semaine du 15 au 22 décembre, la division des droits de l'homme de l'Opération des Nations unies en Côte d'Ivoire a signalé que 173 personnes avaient été tuées, 90 soumises à la torture et à des sévices, 471 arrêtées et détenues arbitrairement et que 24 personnes avaient disparu. La majorité écrasante de ces cas d'exécution sommaire, de torture, de détention et de disparition étaient dus aux forces de sécurité fidèles à M. Gbagbo. Le rapport de 2010 ne fait pas état des violations des droits de l'homme qui ont eu lieu après le 31 décembre.

En République démocratique du Congo (RDC), de graves violations des droits de l'homme se sont produites dans tout le pays, notamment dans les riches régions minières de l'Est et du Nord-Est en proie à un conflit, où l'autorité de l'État est demeurée inexistante ou extrêmement faible. Des défenseurs des droits de l'homme ont été intimidés, battus et, dans le cas d'un militant éminent, Floribert Chebeya, même assassinés. Des entités armées, dont des éléments des forces de sécurité de l'État, ont commis des violations des droits de l'homme en toute impunité et se sont adonnés à l'exploitation et au commerce illicites de richesses naturelles, notamment de minerais. Les recettes tirées du commerce illicite de minerais, dont certaines ont servi à financer le conflit armé, ont causé le maintien de l'insécurité dans l'est de la RDC et aggravé une situation des droits de l'homme qui était déjà précaire. Les groupes de rebelles et de miliciens dans l'est de la RDC ont continué à participer à des campagnes de viol et de pillage en vue d'exercer leur contrôle sur les populations habitant près des zones minières lucratives et à engranger les profits de l'exploitation minière qui contribuent à maintenir le conflit et les violations connexes. Des sources dignes de foi telles que le Groupe d'experts de l'ONU sur la RDC ont présenté des informations selon lesquelles les chaînes d'approvisionnement de certaines entreprises congolaises et étrangères provenaient de fournisseurs qui commerçaient avec des entités armées comprenant des éléments des forces de sécurité de l'État ayant commis de graves violations des droits de l'homme.

Le Nigeria a continué de connaître de graves violations des droits de l'homme tout au long de l'année. Le personnel des services de sécurité, dont des policiers, des militaires et des officiers du service de sécurité de l'État, ont exécuté, torturé, tabassé et maltraité des manifestants, des personnes soupçonnées d'avoir commis un crime, des détenus et des prisonniers condamnés. La Force opérationnelle interarmées, constituée en 2003 pour faire face à l'instabilité dans le delta du Niger et composée de militaires, de policiers et de membres des services de sécurité, a lancé des raids contre des groupes de militants et de personnes soupçonnées d'avoir commis un crime, faisant de nombreux morts et blessés parmi ces groupes. La corruption était généralisée à tous les niveaux du gouvernement et dans toutes les forces de sécurité. La violence d'origine ethno-religieuse a aussi fait des morts et causé le déplacement de populations pendant l'année. La ville de Jos et les terres agricoles environnantes ont été le site de deux grands affrontements en janvier et en mars. Près d'un millier de personnes, principalement des femmes, des enfants et des personnes âgées, ont été tuées, certaines à coups de machette ou de couteau et d'autres brûlées vives.

La violence s'est poursuivie au Soudan tout au long de l'année 2010. Les élections nationales qui ont eu lieu en avril n'ont pas été jugées libres et honnêtes par la communauté internationale, et les observateurs ont constaté de nombreux problèmes au cours ces élections. Au Darfour, les affrontements entre les forces gouvernementales, les milices alliées à ces forces, les groupes de rebelles et les groupes ethniques ont continué de tuer des civils, d'en blesser et de causer leur déplacement. Selon l'ONU, ils ont causé la mort de 2.321 personnes pendant l'année, ce qui constitue une augmentation par rapport aux 875 personnes qui avaient été tuées en 2009. Le gouvernement a continué de lancer des raids aériens. La violence d'ordre sexuel, le recours à des enfants soldats et l'obstruction d'organisations humanitaires et de la mission mixte Nations unies-Union africaine au Darfour ont continué d'être des problèmes. Les forces gouvernementales ont harcelé, arrêté et maltraité des membres de la société civile dans le Nord. Dans le Sud-Soudan, les affrontements entre ethnies et les attaques de l'Armée de résistance du seigneur ont continué de tuer des civils et de causer leur déplacement. Selon des estimations de l'ONU, la violence dans le Sud aurait causé la mort de 986 personnes et le déplacement de 223.708 personnes pendant l'année. L'inscription des électeurs pour le référendum sur l'autodétermination du Sud-Soudan en 2011 a eu lieu en novembre et en décembre. L'absence de progrès relatif à la préparation d'un référendum distinct sur la question de savoir si la région frontalière d'Abyei devrait faire partie du Nord ou du Sud a entraîné des actes sporadiques de violence et une montée des tensions dans la région.

Au Zimbabwé, les forces de sécurité, la police et des éléments du gouvernement dominés par la ZANU-PF (Union nationale africaine du Zimbabwe-Front patriotique) ont continué de commettre un grand nombre de graves violations des droits de l'homme en toute impunité, dont la torture, à l'encontre de militants politiques et de membres de partis politiques autres que la ZANU-PF, de responsables d'associations d'étudiants et de militants de la société civile. Le contrôle dominant de la ZANU-PF et sa manipulation de la vie politique au moyen de fausses accusations, d'arrestations arbitraires, d'actes d'intimidation et de la corruption ont privé en fait les citoyens de leur droit à changer de gouvernement. Bien qu'il y ait eu moins d'incidents que pendant la première moitié de 2010, les attentes relatives à l'organisation d'élections en 2011 ont entraîné un accroissement du nombre de cas de harcèlement et d'intimidation d'associations de la société civile et de membres des médias vers la fin de l'année. Le gouvernement a continué d'avoir recours à des lois répressives pour supprimer la liberté d'expression, notamment de membres de la presse, la liberté de réunion, la liberté d'association et la liberté de circulation. Les forces armées et d'autres agents du gouvernement ont aussi continué de commettre des violations des droits de l'homme dans les zones de gisements diamantifères de Marange.

Asie de l'Est et Pacifique

Malgré la libération de Mme Aung San Suu Kyi, la Birmanie comptait encore plus de 2.100 détenus politiques à la fin de 2010. De nombreux militants de la société civile étaient détenus pour une durée indéfinie et sans être inculpés. Des organismes financés par le gouvernement ont harcelé des militants de la cause de la démocratie et violé les droits de l'homme. Le gouvernement a porté fréquemment atteinte à la vie privée et limité les libertés d'expression, de la presse, de réunion, d'association, de religion et de circulation. Le gouvernement n'a pas permis aux associations locales de défense des droits de l'homme de fonctionner de façon indépendante, et les organisations non gouvernementales étrangères se sont heurtées à des conditions difficiles. Les élections qui ont eu lieu à l'automne 2010 n'ont été ni libres ni honnêtes. Le gouvernement a continué d'exercer un contrôle strict sur l'activité du clergé bouddhiste. Les forces armées birmanes ont continué de commettre des violations flagrantes des droits de l'homme à l'encontre de la population civile des régions où vivent des minorités ethniques. Ces violations comprennent le viol, la torture, le déplacement forcé et le travail forcé. La violence et la discrimination sociétale envers les femmes et les minorités religieuses se sont poursuivies tout comme le recrutement illicite d'enfants soldats et la traite de personnes, notamment de femmes et de jeunes filles. Les droits des travailleurs sont demeurés limités et le travail forcé, notamment celui des enfants, a également persisté.

Au Cambodge, des membres des forces de sécurité ont commis en toute impunité des exécutions sommaires. Les observateurs des droits de l'homme ont signalé des arrestations arbitraires accompagnées d'une détention prolongée avant tout procès, ce qui souligne la faiblesse de l'appareil judiciaire et l'absence du droit à un procès dans les règles. Des restrictions ont continué de peser sur la liberté de réunion et d'expression, notamment pour les membres de la presse, et le nombre de procès pour diffamation et désinformation visant des voix de l'opposition a augmenté de manière abusive. La société civile a exprimé une grande inquiétude au sujet du projet de loi sur les associations et les organisations non gouvernementales qui est susceptible, s'il est adopté, de limiter le fonctionnement des ONG. Diffusé en décembre, le projet de loi comprend des dispositions qui imposent aux ONG de lourdes formalités en matière de déclaration, qui empêchent les associations comptant moins de 21 membres (ce chiffre a été ensuite ramené à 11, ce qui est encore exagéré) d'avoir un statut légal, qui prévoient des conditions fortement restrictives en ce qui concerne la déclaration des ONG étrangères, qui exigent que ces dernières collaborent avec les pouvoirs publics et qui interdisent les ONG non déclarées. L'antisyndicalisme des employeurs et la faible application du droit du travail se sont poursuivis, et l'exploitation des enfants dans le secteur non structuré a continué d'être un problème.

En Chine, la tendance négative dans les principaux domaines des droits de l'homme s'est maintenue. Les pouvoirs publics ont accru en 2010 les restrictions pesant sur les avocats, les militants, les blogueurs et les journalistes, renforcé les mesures de contrôle sur la société civile et tenté de plus en plus de limiter la liberté d'expression et de contrôler la presse, l'Internet et l'accès à ce dernier. Ils ont aussi eu davantage recours aux mesures extralégales, dont les disparitions forcées, la mise en résidence surveillée, la détention arbitraire dans des prisons secrètes et d'autres formes de détention pour réduire au silence les voix indépendantes et pour punir les militants et les membres de leur famille. Le militant légal Chen Guangcheng, avec sa femme et son enfant, est demeuré en résidence surveillée, tout comme d'autres détenus politiques qui avaient été libérés. Des avocats défendant l'intérêt public, qui exerçaient leurs fonctions dans le cadre juridique de la Chine, ont été radiés de l'ordre des avocats ou tabassés ou ont « disparu » pour avoir assuré la défense de clients et de causes jugés constituer un domaine délicat par les autorités. Des blogueurs et des administrateurs de site ont été arrêtés et accusés de porter atteinte au pouvoir de l'État parce qu'ils avaient rediffusé une information sur le site de Twitter ou qu'ils avaient administré un site Internet où d'autres personnes avaient affiché des observations. Les pouvoirs publics ont également poursuivi leur forte répression culturelle et religieuse de minorités ethniques dans la région autonome des Ouïghours au Xinjiang et dans des régions du Tibet.

En Corée du Nord, la situation des droits de l'homme est demeurée sinistre. Pendant l'année, les pouvoirs publics ont maintenu un contrôle strict sur la circulation de l'information en provenance et à destination de l'étranger. Ils ont privé les habitants du droit à l'application régulière de la loi et arrêté et détenu arbitrairement des personnes accusées notamment d'avoir commis des crimes politiques. Des transfuges et des ONG ont indiqué que des violations des droits de l'homme graves et systématiques avaient lieu dans le grand ensemble de prisons et de centres de détention du pays. En outre, les pouvoirs publics ont continué d'exercer un contrôle strict sur les libertés d'expression, de la presse, de réunion, d'association, de religion, de circulation ainsi que sur les droits des travailleurs. Le pays ne compte aucune association indépendante locale de défense des droits de l'homme et il a refusé tout accès à son territoire à des organisations internationales et à des ONG étrangères, ce qui rend impossible d'évaluer correctement la véritable ampleur des violations des droits de l'homme qui y ont lieu ou de savoir si les informations obtenues sont dignes de foi.

Au Vietnam, les pouvoirs publics ont continué d'empêcher tout dissentiment, exercé un contrôle plus strict sur la presse et limité les libertés d'expression, de réunion, de circulation et d'association. Des personnes ont été détenues arbitrairement pour avoir eu des activités politiques et privées du droit d'avoir un procès équitable et rapide. Les autorités ont arrêté au moins 25 militants politiques, condamné 14 dissidents arrêtés en 2008, en 2009 et en 2010 et rejeté l'appel de 10 autres dissidents condamnés à la fin de 2009. Le fonctionnement de l'appareil judiciaire est fortement entravé par les influences politiques, par une corruption endémique et est inefficace. La liberté de religion a continué de faire l'objet d'une interprétation et d'une protection inégales, en particulier au niveau des provinces et des villages. La liberté d'Internet a été encore plus limitée du fait que les pouvoirs publics ont orchestré des attaques contre des sites émettant des critiques et espionné des dissidents blogueurs. Les autorités ont limité le droit des travailleurs de former des syndicats indépendants et d'y adhérer.

Europe

En Biélorussie, les autorités ont arbitrairement arrêté, détenu et incarcéré des militants de la cause de la démocratie, des journalistes et des représentants de la société civile. À la suite de l'élection présidentielle de décembre 2010 qui a été entachée d'irrégularités, les autorités ont pris des mesures énergiques contre les manifestants ; elles ont détenu près de 700 personnes et perquisitionné des bureaux et des appartements appartenant à des membres des médias indépendants, à des ONG et à l'opposition politique. Plus de 40 personnes, dont plusieurs candidats à la présidence, risquent maintenant d'être condamnées à quinze ans de prison. Du fait des arrestations et des procès, les autorités biélorusses augmentent sans cesse le nombre de détenus politiques. L'autorité judiciaire n'a pas fait preuve d'indépendance et a souffert de la corruption, de l'inefficacité et de l'ingérence à caractère politique ; l'issue des procès était prédéterminée, et de nombreux procès ont eu lieu à huis clos. La corruption officielle dans les rouages du gouvernement a continué d'être un problème.

En Russie, les pouvoirs publics ont empiété sur les libertés d'expression, de réunion et d'association ; elles ont détenu des manifestants et continué d'exercer des pressions sur certaines ONG, sur des médias indépendants, sur certaines minorités religieuses, sur des syndicats indépendants et sur l'opposition politique. Les attaques dirigées contre des journalistes et des militants ainsi que l'assassinat de certains d'entre eux ont persisté. On a signalé des sévices commis par la police, des décès dus au bizutage de recrues dans l'armée et les conditions dures dans les prisons. Les violations de l'État de droit et du respect de la légalité sont demeurées un problème, et la corruption des pouvoirs publics a été généralisée. Les attaques d'ordre xénophobe, racial et ethnique ainsi que les crimes motivés par la haine ont continué de constituer un problème important. Le conflit entre les forces gouvernementales et les insurgés, les militants islamistes et les forces criminelles dans le Caucase du Nord a entraîné de nombreuses violations des droits de l'homme par tous les intéressés, dont assassinat, torture, sévices, violence et enlèvements pour des raisons politiques.

En Ukraine, malgré une élection présidentielle libre et honnête en début d'année, la tendance globale pour 2010 a été négative du fait d'élections locales entachées d'irrégularités, de l'intimidation des médias et des poursuites contre certaines personnalités de l'opposition. Des observateurs étrangers et ukrainiens ont trouvé que les élections locales qui ont eu lieu en octobre n'avaient pas été conformes aux mêmes normes que l'élection présidentielle ; ils ont fait état de listes frauduleuses de candidats de l'opposition, des pressions exercées par les pouvoirs publics sur les observateurs des élections et sur les candidats et du fait que des responsables des bureaux de vote avaient rayé ou enlevé des bulletins de vote le nom de candidats, ce qui a créé des inquiétudes au sujet des prochaines mesures que le gouvernement envisage de prendre au titre de la réforme électorale. En outre, on a signalé à de multiples reprises que les autorités avaient tenté d'orienter le contenu des médias et d'intimider des journalistes. Bien que les pouvoirs publics aient pris des mesures en 2009 pour mieux combattre la corruption, la communauté internationale a déclaré craindre que ce soit la politique qui ait motivé l'enquête ouverte par le nouveau gouvernement en 2010 et portant sur 30 membres du gouvernement précédent qui seraient accusés de corruption ; plusieurs de ces personnes ont été détenues, puis inculpées.

Proche-Orient

Les tensions politiques se sont exacerbées au cours des semaines qui ont précédé les élections du mois d'octobre à Bahreïn. Les autorités ont arrêté plus de 200 chiites qu'elles ont accusés d'avoir incité à la violence dans les rues ou d'y avoir participé. Parmi les personnes arrêtées figuraient des dirigeants des mouvements Haq et Wafa, qui rejettent la monarchie et qui avaient prôné le boycott des élections. Le gouvernement a inculpé 23 de ces personnes de participation à un « réseau de la terreur » en vertu de la loi de répression du terrorisme adoptée en 2006. En outre, la décision des pouvoirs publics d'interdire le site Internet et les bulletins d'information des deux principaux partis d'opposition a jeté une ombre sur le processus électoral. Le gouvernement n'a pas permis à des observateurs étrangers de surveiller le déroulement des élections. Il a en outre maintenu ses restrictions sur la liberté de réunion et d'association. Les forces de sécurité sont intervenues dans des manifestations et elles ont limité et contrôlé les rassemblements politiques au cours de l'année écoulée. Les ONG et les groupes de la société civile ont été tenus de s'inscrire auprès des autorités et de fournir la liste de leurs adhérents. En septembre, le ministère du développement social a ordonné la dissolution du conseil d'administration de la ligue nationale des droits de l'homme, la BHRS (Bahrein Human Rights Society), et nommé à titre intérimaire un fonctionnaire du ministère à la tête de cette association, ce qui a eu pour effet en pratique de la mettre hors d'état de fonctionner.

Selon de multiples sources, le gouvernement iranien a procédé à l'exécution sommaire d'environ 312 personnes au cours de l'année écoulée, notamment à l'issue de procès tenus en secret ou en l'absence d'une procédure régulière. Dans de nombreux cas, les personnes qui auraient été exécutées pour des actes criminels tels que le trafic de stupéfiants étaient en fait des dissidents politiques. Les autorités ont détenu des prisonniers politiques et continué de prendre des mesures répressives contre les partisans des droits de la femme, les militants des droits des minorités ethniques, des militants étudiants et des minorités religieuses. L'autorité judiciaire a fait preuve de peu d'indépendance, et les procès publics et équitables ont été peu nombreux. Les pouvoirs publics ont fortement restreint le droit à l'intimité et aux libertés publiques, notamment les libertés d'expression, y compris pour les membres de la presse, de réunion, d'association et de circulation ainsi que la liberté de religion. Des justiciers ont continué d'attaquer des jeunes dont ils considéraient les vêtements ou les activités comme contraires à l'islam, d'envahir des domiciles, de maltraiter les couples non mariés et de perturber les concerts. La violence et la discrimination légale et sociétale envers les femmes, les enfants, les minorités ethniques et religieuses ainsi que les homosexuels, les lesbiennes, les bisexuels et les transsexuels ont persisté.

En Irak, si les élections législatives crédibles et légitimes qui ont eu lieu le 7 mars dans toutes les 18 provinces ont représenté une réalisation importante sur le plan des droits de l'homme, la violence des extrémistes, alliée aux faibles résultats des pouvoirs publics pour ce qui est de l'application de la loi, ont entraîné des violations multiples et graves des droits de l'homme dans le pays. Selon certaines informations, le gouvernement ou ses agents ont effectué de nombreuses exécutions sommaires ou illicites, des détentions arbitraires et des actes de torture liés à ses opérations de sécurité, souvent en toute impunité. Al-Qaïda en Irak et d'autres extrémistes ont continué leurs attaques contre les forces irakiennes de sécurité, des responsables du gouvernement, des civils, visant souvent des zones urbaines, des églises chrétiennes, des marchés et des mosquées chiites. Le 10 mai, l'explosion de bombes et des tirs coordonnés à travers l'Irak ont causé la mort d'au moins 119 personnes, dont des membres des forces irakiennes de sécurité et des policiers. Le 17 août, un kamikaze s'est fait sauter à Bagdad dans une foule de recrues de l'armée, causant la mort de 61 personnes. Au cours de l'année, 962 membres du personnel du ministère de l'intérieur ont été tués et 1.347 blessés. Des officiers de police étaient tout particulièrement visés.

En Libye, le colonel Kadhafi et ses proches collaborateurs ont monopolisé tous les aspects de la prise de décisions au sein du gouvernement. Les problèmes en matière de droits de l'homme ont continué d'être la torture, les arrestations arbitraires, l'impunité des agents publics et les mauvaises conditions dans les prisons. Un nombre important mais imprécis de personnes sont demeurées en détention ou en prison pour avoir participé à des activités politiques pacifiques ou pour avoir adhéré à une association politique illégale. Les pouvoirs publics ont considérablement restreint la liberté des médias et continué de restreindre la liberté d'expression et ils ont surveillé couramment les appels téléphoniques et l'usage de l'Internet, dont le courrier électronique avec des pays étrangers. Des militants politiques et des organisations étrangères ont fait l'objet d'une surveillance physique. L'État possède et contrôle pratiquement toute la presse écrite et l'audiovisuel, et ces médias n'ont publié ni diffusé des opinions qui n'étaient pas conformes à la politique officielle. L'Organisation de la sûreté intérieure a régulièrement harcelé les journalistes, et des dispositions beaucoup trop larges du code pénal ont servi de base à de fréquentes accusations de diffamation. Les pouvoirs publics ont restreint fortement la liberté de réunion et n'ont autorisé les rassemblements publics qu'après avoir donné leur consentement préalable. Ils ont restreint la liberté d'association et en général n'ont permis qu'aux institutions affiliées au gouvernement de fonctionner. Aucune organisation non gouvernementale n'a pu fonctionner dans le pays. Au début de 2011, des manifestations ont eu lieu en Libye. Comme elles se sont produites en dehors de la période couverte par le rapport, ce dernier n'en fait pas état.

En Syrie, les forces de sécurité ont commis des exécutions sommaires, détenu des militants politiques et des droits de l'homme, torturé et maltraité des prisonniers et des détenus en toute impunité. Les pouvoirs publics ont également incarcéré plusieurs membres éminents de la communauté des droits de l'homme et de la société civile, qui sont venus s'ajouter au nombre estimé de 2.500 à 3.000 détenus politiques. La longue période précédant les procès et la détention secrète continuent de constituer un grave problème, et les tribunaux ont utilisé systématiquement les « confessions » extraites sous la contrainte comme preuve. Les accusations de torture des défenseurs n'ont presque jamais fait l'objet d'une enquête. Les pouvoirs publics ont fortement restreint les libertés universelles d'expression, de réunion, d'association, de religion et de circulation.

Asie du Sud et Asie centrale

Une situation de plus en plus difficile sur le plan de la sécurité en Afghanistan a entraîné de nombreuses violations graves des droits de l'homme. La population civile a continué de souffrir de l'intensification du conflit armé : le nombre de morts causées par ce conflit a augmenté de 15 % par rapport à 2009. Les forces gouvernementales et les forces internationales alliées du gouvernement ont causé la mort de civils, plus précisément de 16 % de l'ensemble des civils qui ont péri. Selon l'association Human Rights Watch, on a constaté souvent l'absence d'enquêtes opportunes et transparentes ou de responsabilité des forces en cas d'actes répréhensibles lorsque des civils étaient blessés ou tués. Les attaques des talibans et des insurgés, notamment les tueries d'ordre politique, se sont accrues tant en nombre qu'en intensité. Au moins 30 personnes ont été tuées le 18 septembre, le jour des élections législatives, et les talibans ont revendiqué la responsabilité de l'assassinat de 3 candidats pendant la campagne électorale en juillet et en août. En août, 5 personnes participant à la campagne électorale de Fawzia Gilani à Hérat ont été enlevées puis tuées. Il y a également eu des attaques dirigées contre des responsables des élections. Les élections elles-mêmes ont été entachées de fraude et d'irrégularités généralisées, entre autres la mise en place d'un tribunal spécial chargé d'examiner les résultats des élections et des plaintes, la faible participation des électeurs et des conditions insatisfaisantes pour la participation des femmes. L'impunité et la corruption des agents publics ont sévi au sein des pouvoirs publics qui souvent ne mènent pas des enquêtes efficaces sur les violations des droits de l'homme commises par les forces locales de sécurité. Les arrestations et les détentions arbitraires sont demeurées un problème, et l'appareil judiciaire manque d'indépendance. La liberté de religion, dont le droit de changer de religion, était fortement limitée. Les femmes ont continué de faire l'objet de violations fréquentes des droits de la personne, ce qui comprend la violence, les attaques des insurgés contre l'enseignement réservée aux filles, l'accès limité à la justice et d'autres limitations de leurs droits.

Au Pakistan, plusieurs médias et ONG ont signalé des accusations portant sur des exécutions sommaires et sur la détention de civils par les forces de sécurité. Pendant l'année, il y a eu une augmentation importante du nombre total de cas signalés de torture et de viol de personnes en détention que l'on a signalés, soit près du double de 2009. La Société des droits de l'homme et de l'aide aux prisonniers (SHARP) a signalé la mort de 72 civils qui a suivi leur rencontre avec la police et de 168 prisonniers, ce qui constitue une augmentation par rapport à l'année précédente. L'explosion de bombes par des militants et des terroristes dans toutes les 4 provinces et dans les zones tribales administrées par l'État fédéral ont continué de faire des morts et des blessés. Selon le rapport, les attaques d'extrémistes et de terroristes et les opérations visant à lutter contre le terrorisme et l'extrémisme ont causé la mort de 7.400 personnes, dont près de 800 étaient des civils, plus de 450 des membres des forces de sécurité et plus de 5.100 des terroristes ou des insurgés. De nombreuses informations ont fait état de personnes qui ont été tuées pour des raisons politiques à Karachi et au Balouchistan. Selon une information parue sur le site Dawn, la violence politique a causé la mort de 1.981 personnes à Karachi, dont 748 avaient été visées tout particulièrement. D'après l'association Human Rights Watch, les assassinats et la disparition de responsables, de militants et de civils du Balouchistan ont augmenté en 2010. Les violations de la liberté de religion, la violence et la discrimination envers les minorités religieuses se sont poursuivies. Certaines personnes accusées de blasphème contre l'islam ont été condamnées à la réclusion à perpétuité ou à la peine de mort. L'une d'elle est Aasia Bibi, une chrétienne, qui a été condamnée à la peine de mort en novembre ; c'est la première Pakistanaise à faire l'objet d'une peine aussi dure pour cause de blasphème.

L'Ouzbékistan a continué d'incarcérer des personnes pour des raisons politiques. Si l'un des détenus politiques, le militant de la cause des droits de l'homme Farhad Mukhtarov, a été libéré au cours de l'année, on comptait encore 13 à 25 détenus politiques, et des membres de leur famille ont signalé qu'un grand nombre d'entre eux avaient été torturés. Des militants des droits de l'homme, des membres de leur famille et des membres de certains groupes religieux ont signalé des cas de harcèlement et des arrestations par la police et par d'autres membres des forces de sécurité. La liberté d'expression a été fortement limitée, et le harcèlement de journalistes s'est accru au cours de l'année écoulée. La police et des services de sécurité ont arrêté des journalistes de la presse écrite et de l'audiovisuel ; ils en ont intimidé d'autres, ont également usé de la violence et imposé des restrictions d'ordre bureaucratique à l'exercice de leur profession. Les codes pénal et administratif prévoient des amendes importantes en cas de diffamation, et les pouvoirs publics se sont servis d'accusations de diffamation verbale ou écrite pour punir des journalistes, des militants des droits de l'homme et d'autres personnes qui avaient critiqué le président ou les pouvoirs publics. La liberté d'association était aussi limitée. Les pouvoirs publics ont exercé un contrôle étroit sur les activités des ONG et sur les groupes religieux islamiques et minoritaires non réglementés et imposé des conditions juridiques strictes pour ce qui est de la création et de la déclaration de cette catégorie de groupes. Des adultes et des enfants ont été forcés de travailler pendant la récolte du coton.

Continent américain

Cuba a libéré en 2010 plus de 40 prisonniers politiques, dont de nombreux militants éminents des droits de l'homme arrêtés en 2003, mais la plupart ont été remis en liberté à condition qu'ils quittent le pays. Ce pays a continué de compter des dizaines de détenus politiques. Les pouvoirs publics ont restreint les droits de l'homme et les libertés fondamentales, dont les libertés d'expression, de la presse, de réunion, d'association, de circulation et de religion. Les groupes de défense des droits de l'homme ont observé une nette augmentation du recours aux détentions à court terme destinées à entraver le fonctionnement de la société civile et à harceler les militants. En outre, les pouvoirs publics ont continué d'organiser des rassemblements publics de manière à harceler et à maltraiter les militants et leur famille, en particulier les Damas de blanco (les dames en blanc). Bien qu'ils aient qualifié ces rassemblements de spontanés, les participants sont souvent arrivés dans des véhicules appartenant à l'État ou ont été recrutés par des responsables locaux du parti communiste dans des lieux de travail et des écoles proches. Dans des cas extrêmes, les manifestants organisés par les autorités se sont attaqués à ces personnes ou ont endommagé leur domicile ou leurs biens. Des membres des forces de sécurité ont surveillé, harcelé et parfois attaqué des militants en faveur des droits de l'homme et de la démocratie, des dissidents, des journalistes indépendants, des détenus et des prisonniers, et cela en toute impunité. Les pouvoirs publics n'admettent pas le journalisme indépendant et ils ont soumis des journalistes indépendants à diverses mesures dont interdiction de déplacement, détention, harcèlement, confiscation de matériel et menace d'incarcération. La réunion de plus de 3 personnes peut être sanctionnée d'une peine de prison de trois mois au maximum et d'une amende, bien qu'en général ces réunions aient été plus souvent interrompues que les participants poursuivis.

Au Nicaragua, le respect des droits de l'homme et des institutions démocratiques s'est amoindri au cours de l'année passée. Des membres de partis de l'opposition ont été privés de la liberté de réunion. Les élections régionales de mars 2010 le long de la côte caraïbe ont été entachées d'irrégularités généralisées, et des ONG nicaraguayennes dignes de confiance n'ont pas obtenu l'autorisation d'observer les élections. Parmi les autres problèmes figurent la politisation de l'appareil judiciaire et le fait que des groupes favorables au gouvernement peuvent s'adonner à des activités violentes. Les pouvoirs publics ont continué de critiquer les dignitaires religieux qui exprimaient leurs inquiétudes au sujet de l'action et de la politique du gouvernement entravant la participation de la population et les libertés démocratiques. Des responsables du gouvernement ont publiquement critiqué avec force des dignitaires de l'Église catholique qui avaient dénoncé les manipulations électorales.

Au Venezuela, les pouvoirs publics se sont servis de l'appareil judiciaire pour intimider et persécuter des personnes et des organismes qui critiquaient la politique ou l'action du gouvernement, notamment des manifestants pacifiques, des journalistes, un juge, des membres des partis de l'opposition, des ONG, des syndicalistes, des chefs d'entreprise et de simples particuliers. De hauts responsables du gouvernement ont aussi limité la liberté d'expression en harcelant et en intimidant des stations de télévision privées, des organes d'information et des journalistes au moyen de menaces, de confiscation de biens, d'une réglementation spécifique, d'enquêtes pénales et de poursuites en justice. À la fin de décembre, l'Assemblée nationale a adopté un ensemble de lois qui ont encore plus porté atteinte aux principes démocratiques et à leur application. C'est ainsi qu'une loi délègue l'autorité du pouvoir législatif à l'exécutif pour une période supérieure à celle du mandat des députés sortants, en violation des valeurs communes de la Charte démocratique interaméricaine et que d'autres lois imposent de nouvelles restrictions sur les médias indépendants, sur l'Internet, sur les partis politiques et sur les ONG.
(Diffusé par le Bureau des programmes d'information internationale du département d'Etat. Site Internet : http://iipdigital.usembassy.gov/iipdigital-fr/index.html)

jeudi 28 avril 2011

L'Internet à bon ou à mauvais escient : choix et défis dans un monde connecté

Département d'État
Bureau du porte-parole
Le 15 février 2011

Allocution de la secrétaire d'État Hillary Rodham Clinto
Université George Washington

Washington
Je vous remercie tous vivement. Bonjour. Je suis ravie de me trouver de nouveau sur le campus de l'université George Washington, un endroit où j'ai passé pas mal de temps en des qualités diverses au cours de presque deux décennies maintenant. Je voudrais en particulier remercier le président Knapp et le doyen Lerman de cette occasion de parler d'un sujet très important et qui mérite l'attention des citoyens, des gouvernements, et qui, je le sais, est déjà la cible d'attention. Et peut-être qu'avec mes propos aujourd'hui, nous pourrons entamer un débat beaucoup plus vigoureux qui répondra aux besoins tels que nous les suivons en temps réel sur l'écran de nos télévisions.
Quelques minutes avant minuit, le 28 janvier, l'Internet s'est éteint dans toute l'Égypte. Au cours des quatre jours précédents, des centaines de milliers d'Égyptiens étaient descendus dans la rue pour demander un nouveau gouvernement. Et le monde, à la télévision, sur les ordinateurs portables, sur les téléphones mobiles ou intelligents, les a suivis pas à pas. Les images et les vidéos en provenance d'Égypte ont inondé la Toile. Sur Facebook et Twitter, les journalistes diffusaient des reportages instantanés. Les manifestants coordonnaient leurs activités en ligne. Et des citoyens de toutes tendances partageaient leurs espérances et leurs craintes quant à ce moment crucial de l'histoire de leur pays.
Des millions de personnes de par le monde leur ont répondu en temps réel : « Vous n'êtes pas seuls et nous sommes à vos côtés ». Puis le gouvernement a actionné l'interrupteur. Il a coupé le service de téléphonie mobile, brouillé les transmissions de télévision par satellite et bloqué l'accès à l'Internet pour presque toute la population. Le gouvernement ne voulait pas que les gens communiquent entre eux et il ne voulait pas que la presse communique avec le public. Il ne voulait certainement pas que le monde voie ce qui se passe.
Les événements en Égypte rappellent un autre mouvement de protestation qui s'était produit 18 mois auparavant en Iran et au cours duquel des milliers de personnes avaient manifesté à l'issue d'élections contestées. Les protestataires s'étaient aussi servi de sites Internet pour coordonner leurs activités. Une vidéo filmée au moyen d'un téléphone portable montrait une jeune femme dénommée Neda, tuée par un membre des forces paramilitaires, et en quelques heures, la vidéo était visionnée dans le monde entier.
Les autorités iraniennes, elles aussi, ont eu recours à la technologie. Les Gardiens de la révolution ont donné la chasse à des membres du Mouvement vert en surveillant leurs profils en ligne. Et comme en Égypte, pendant un moment, le gouvernement a entièrement coupé l'Internet et les réseaux de communications mobiles. Après que les autorités eurent effectué des descentes dans les maisons, mené des attaques contre des dortoirs d'universités, procédé à des arrestations en masse et tiré dans la foule, les manifestations prirent fin.
En Égypte, par contre, l'histoire s'est terminée différemment. Les manifestations se sont poursuivies malgré la coupure de l'Internet. Les citoyens ont organisé des rassemblements en distribuant des pamphlets, ou en se passant le mot, ou encore en utilisant des modems commutés et des télécopieurs pour communiquer avec le reste du monde. Après cinq jours, le gouvernement a cédé et l'Égypte était de nouveau en ligne. Les autorités ont ensuite tenté de se servir de l'Internet pour maîtriser les manifestations en donnant l'ordre aux fournisseurs de service mobile de transmettre des messages textos pro-gouvernementaux, et en arrêtant des blogueurs et ceux qui organisaient les rassemblements en ligne. Mais 18 jours après le début de l'agitation, le gouvernement avait échoué et le président devait démissionner.
Ce qui s'est passé en Égypte et ce qui s'est passé en Iran, où les autorités ont de nouveau recours à la violence contre les manifestants qui revendiquent leurs libertés fondamentales, se rapportent à beaucoup plus qu'à l'Internet. Dans chacun de ces cas, les citoyens ont organisé des manifestations en raison de leurs profondes frustrations quant à leurs conditions de vie politiques et économiques. Ils se sont dressés, ils ont marché et scandé et les autorités les ont poursuivis, leur ont bloqué le chemin et les ont arrêtés. L'Internet n'a rien fait de tout cela ; les gens l'ont fait. Dans les deux pays, l'usage de l'Internet, que ce soit par les citoyens ou par les autorités, reflète l'aspect puissant des technologies de connexion, d'un côté en tant qu'accélérateur du changement politique, social et économique, et de l'autre, comme moyen de répression ou de suppression du changement.

Un débat est en cours dans certains milieux pour savoir si l'Internet est une force de libération ou de répression. Mais je pense que ce débat est en grande partie hors de propos. L'Égypte n'inspire pas les gens parce qu'ils ont communiqué entre eux par le biais de Twitter. Elle les inspire parce que ses citoyens se sont serré les coudes et ont persisté avec leurs revendications pour un avenir meilleur. L'Iran n'est pas un mauvais pays parce que les autorités ont utilisé Facebook pour surveiller et capturer des membres de l'opposition. Il l'est parce que son gouvernement bafoue régulièrement les droits de la population.
Ce sont donc nos valeurs qui font que ces actes soit nous inspirent soit nous révoltent : notre sens de la dignité humaine, les droits qui en découlent, et les principes sur lequel il se fonde. Et ce sont ces valeurs qui doivent nous pousser à réfléchir à la voie devant nous. Deux milliards de personnes ont aujourd'hui accès à l'Internet, près d'un tiers de l'humanité. Nous venons de toutes les régions du monde, vivons sous toutes formes de gouvernement, et souscrivons à tous systèmes de croyances. Et de plus en plus souvent, nous nous tournons vers l'Internet pour les aspects importants de notre vie.
L'Internet est devenu l'espace public du XXIe siècle, la place publique du monde, sa salle de classe, son marché, son café et sa boîte de nuit. Ce qui se passe sur l'Internet nous façonne autant que nous le façonnons, les deux milliards d'entre nous et ceux qui viennent s'y ajouter. Et cela présente un défi. Pour maintenir un Internet qui offre le plus d'avantages possibles au monde, nous devons avoir un dialogue sérieux sur les principes qui nous guideront, quelles règles doivent exister ou non, et pourquoi, quels comportements nous devrons encourager ou décourager, et comment.
Le but ne saurait être de dire aux gens comment utiliser l'Internet comme on ne saurait leur dire à quelles fins utiliser la place publique, qu'il s'agisse de la Place Tahrir ou Times Square. La valeur de ces espaces découle de la variété d'activités que les citoyens peuvent y mener, qu'il s'agisse d'organiser un rassemblement, de vendre des légumes ou encore d'avoir un entretien personnel. Ces espaces fournissent un forum ouvert, et c'est ce qu'est l'Internet. Il n'est au service d'aucun ordre du jour particulier et ne doit jamais l'être. Mais si les gens du monde entier vont se retrouver tous les jours en ligne, nous devons alors avoir une vision commune pour nous guider afin qu'ils aient une expérience productive en sécurité.

Il y a un an, j'ai offert un point de départ pour cette vision en appelant à un engagement mondial en faveur de la liberté d'Internet, afin de protéger les droits de l'homme en ligne comme nous le faisons ailleurs. Les droits des individus à exprimer leurs points de vue, de pétitionner auprès de leurs dirigeants, de pratiquer la religion de leur choix - ces droits sont universels, qu'ils s'exercent sur la place publique ou dans un blogue individuel. Les libertés de réunion et d'association s'appliquent aussi au cyberespace. De nos jours, les gens sont tout aussi enclins à se réunir en ligne pour partager des intérêts communs qu'à le faire dans une église ou une salle de syndicat.
Prises toutes ensemble, les libertés d'expression, de réunion et d'association en ligne forment ce que j'ai baptisé la liberté de connexion. Les États-Unis appuient cette liberté pour les peuples du monde entier, et nous avons exhorté les autres pays à en faire autant. Et ce, parce que nous voulons qu'ils aient tous la possibilité d'exercer cette liberté. Nous appuyons aussi les mesures visant à accroître le nombre de personnes qui ont accès à l'Internet. Et du fait que l'Internet doit fonctionner de manière régulière et fiable pour avoir de la valeur, nous soutenons le système qui le gouverne actuellement et qui donne un rôle aux multiples parties prenantes, un système qui a réussi à le maintenir en opération malgré toutes sortes d'interruptions à travers les réseaux, les frontières et les régions.
Dans l'année écoulée depuis mon discours, les gens dans le monde entier ont continué à utiliser l'Internet pour trouver des solutions à leurs problèmes communs et pour mettre au jour la corruption dans le secteur public - des populations en Russie qui ont suivi la multiplication des incendies de forêts et ont créé une équipe de sapeurs-pompiers bénévoles, aux enfants en Syrie qui ont utilisé Facebook pour révéler les abus infligés par leurs enseignants, ou encore à la campagne en ligne menée en Chine pour aider des parents à retrouver leurs enfants portés disparus.
En même temps, l'Internet continue de faire l'objet de toutes sortes de restrictions. En Chine, le gouvernement censure le contenu et redirige les recherches en ligne vers des pages vides. En Birmanie, des sites d'actualités indépendants ont été paralysés par des attaques de déni de service. À Cuba, le gouvernement cherche à créer un intranet national qui empêcherait ses citoyens d'avoir accès à l'Internet mondial. Au Vietnam, les blogueurs qui critiquent le gouvernement sont arrêtés et soumis à des sévices. En Iran, les autorités bloquent les sites de l'opposition et des médias, ciblent ceux de réseautage social, et volent les informations qui leur permettent d'identifier leurs citoyens pour les traquer.
Ces actes reflètent un environnement complexe et combustible, et qui le deviendra certainement plus dans les années à venir alors que des milliards d'autres personnes se connectent à l'Internet. Les choix que nous faisons aujourd'hui détermineront l'allure qu'aura l'Internet dans l'avenir. Les entreprises auront à décider si elles veulent entrer sur des marchés où la liberté d'Internet est limitée, et comment le faire. Les particuliers devront décider comment agir en ligne, quelles informations partager et avec qui, quelles idées exprimer et comment. Les gouvernements devront choisir de respecter leur engagement de protéger les droits de libre expression, de réunion et d'association.

Pour les États-Unis, le choix est clair. À l'égard de la liberté d'Internet dans son ensemble, nous sommes du côté de l'ouverture. Nous reconnaissons toutefois qu'un Internet ouvert s'accompagne de défis. Il nécessite des règles de base pour protéger l'usager contre les comportements nocifs et les dangers. Et la liberté d'Internet crée des tensions comme le font toutes les libertés. Mais nous sommes convaincus que les avantages l'emportent sur les inconvénients.
Et aujourd'hui, j'aimerais discuter de plusieurs défis auxquels nous nous heurtons alors que nous cherchons à protéger et à défendre un Internet libre et ouvert. Mais je serai la première à dire que ni moi ni le gouvernement des États-Unis n'avons la réponse. Nous ne sommes pas sûrs d'avoir toutes les questions. Mais nous sommes déterminés à poser des questions, à contribuer à mener un dialogue, et à défendre non seulement les principes universels mais aussi les intérêts de nos citoyens et de nos partenaires.
Le premier défi consiste à assurer à la fois la liberté et la sécurité. La liberté et la sécurité sont souvent présentées comme étant égales et opposées ; plus on a de l'une, moins on a de l'autre. En fait, je pense qu'elles sont mutuellement dépendantes. Sans sécurité, la liberté est fragile. Sans liberté, la sécurité est oppressive. Le défi consiste à trouver la juste mesure : assez de sécurité pour soutenir nos libertés, mais ni trop ni trop peu pour les mettre en danger.
Or, réaliser cette juste mesure pour l'Internet est un impératif crucial, car les qualités qui font de l'Internet un instrument puissant de progrès sans précédent - son ouverture, son effet d'égalisation, sa portée et sa rapidité - permettent également des méfaits à une échelle sans précédent. Des terroristes et des groupes extrémistes emploient l'Internet pour recruter des membres et pour ourdir et exécuter des attaques. Des trafiquants de personnes s'en servent pour trouver et attirer de nouvelles victimes de l'esclavage moderne. Les producteurs de pornographie enfantine l'utilisent pour exploiter des enfants. Des cyberpirates s'introduisent dans des institutions financières, dans des réseaux de téléphonie mobile et dans des courriers électroniques personnels.
Il nous faut donc des stratégies judicieuses pour combattre ces menaces et d'autres sans restreindre l'ouverture qui est le premier attribut de l'Internet. Les États-Unis s'emploient vigoureusement à dépister et à dissuader les criminels et les terroristes en ligne. Ils investissent dans la cybersécurité, tant pour prévenir les incidents que pour en atténuer l'effet. Ils coopèrent avec d'autres pays au combat contre la criminalité transnationale en ligne. Le gouvernement des États-Unis consacre des ressources à aider d'autres pays à renforcer leur capacité à appliquer leurs lois. Il a également ratifié la Convention de Budapest sur la cybercriminalité, qui énonce les mesures à prendre afin d'assurer que l'Internet n'est pas utilisé à mauvais escient par des criminels et des terroristes, tout en protégeant les libertés citoyennes.
Dans ces efforts énergiques que nous déployons en vue de prévenir des attaques ou d'appréhender des criminels, nous maintenons notre attachement aux droits de l'homme et aux libertés fondamentales. Les États-Unis n'auront pas de cesse qu'ils n'aient mis fin au terrorisme et aux activités criminelles en ligne et hors ligne et, dans ces deux sphères, ils sont résolus à poursuivre ces objectifs dans le respect de leurs lois et de leurs valeurs.
D'autres pays ont adopté une approche différente. On invoquera souvent la sécurité pour justifier la répression sévère des libertés. Sans être particulière à l'ère numérique, cette tactique a des implications nouvelles en ce que l'Internet fournit aux pouvoirs publics de nouveaux moyens de traquer et de punir les défenseurs des droits de l'homme et les opposants politiques. Les gouvernements qui arrêtent des blogueurs, qui surveillent les activités non violentes de leurs citoyens et qui limitent leur accès à l'Internet peuvent prétendre vouloir garantir la sécurité. En fait, ils pourraient même le croire sérieusement, d'après la façon dont ils la définissent. Mais ils font fausse route. Ceux qui répriment la liberté de l'Internet pourront peut-être refouler la pleine expression des aspirations populaires pendant quelque temps, mais pas pour toujours.

Le deuxième défi a trait à la protection à la fois de la transparence et de la confidentialité. La vigoureuse culture de transparence de l'Internet puise sa force dans l'instantanéité d'accès à toutes sortes d'information. Mais outre le fait d'être un espace public, l'Internet est aussi un canal de communications privées. Pour que cela reste ainsi, il est nécessaire de protéger les communications confidentielles en ligne. Pensez à toutes les façons dont les individus et les organismes comptent sur la confidentialité des communications pour faire leur travail. Les entreprises entretiennent des conversations confidentielles lorsqu'elles développent de nouveaux produits pour conserver leur avantage concurrentiel. Les journalistes maintiennent la confidentialité de certaines sources afin de protéger ces dernières de toute divulgation d'identité ou de représailles. Et les gouvernements comptent, eux aussi, sur la confidentialité de leurs communications en ligne et hors ligne. L'existence des techniques de connexion peut compliquer le maintien de la confidentialité, mais elle n'en diminue nullement le besoin.
Je le sais, depuis quelque mois le débat fait rage au sujet de la confidentialité des communications officielles, à cause de Wikileaks, mais c'est, à nombre d'égards, un faux débat. À la base, l'incident de Wikileaks a commencé par un vol. Des documents du gouvernement ont été volés, comme si on les avait fait passer en fraude dans une serviette. D'aucuns ont estimé que ce vol se justifiait puisque les pouvoirs publics ont le devoir d'exercer leurs fonctions ouvertement et en pleine vue de leurs citoyens. Permettez-moi d'exprimer mon désaccord. Les États-Unis seraient incapables d'assurer la sécurité de leurs citoyens et de promouvoir la cause des droits de l'homme et de la démocratie dans le monde s'ils devaient rendre publique chaque étape de leurs travaux. La confidentialité des communications permet à notre gouvernement de faire des choses qu'il ne pourrait pas faire autrement.
Considérez notre collaboration avec les anciens États soviétiques en vue de mettre en lieu sûr des matières nucléaires mal sécurisées. En maintenant la confidentialité des détails y afférents, nous réduisons le risque que des terroristes ou des criminels trouvent ces matières nucléaires et les volent pour leurs propres fins. Considérez encore le contenu des documents que Wikileaks a rendus publics. Sans commenter sur l'authenticité de l'un quelconque de ces écrits, nous pouvons constater que nombre des communications révélées par Wikileaks se rapportent à des travaux réalisés de par le monde en matière de droits de l'homme. Nos diplomates collaborent étroitement avec des militants, des journalistes et des particuliers en vue de dénoncer les méfaits de gouvernements oppressifs. C'est un travail dangereux. En publiant des messages diplomatiques, Wikileaks a exposé des gens à des risques encore plus graves.
S'agissant d'opérations de ce genre, la confidentialité est essentielle, surtout à l'ère de l'Internet où des renseignements dangereux peuvent circuler dans le monde entier en un clic de clavier. Mais c'est évident, les gouvernements ont aussi un devoir de transparence. Nous gouvernons avec le consentement du peuple et ce consentement doit être informé et significatif. Aussi devons-nous bien réfléchir avant de poursuivre telle activité à l'insu du public, et réexaminer fréquemment nos principes afin d'en assurer la rigueur. Aux États-Unis, nous avons des lois conçues pour garantir que le gouvernement divulgue ses activités au public, et le gouvernement Obama a en outre lancé une initiative sans précédent visant à placer des informations officielles en ligne, à encourager la participation citoyenne et à accroître d'une façon générale l'ouverture du gouvernement.
L'aptitude du gouvernement américain à protéger la nation, à assurer les libertés du peuple et à promouvoir les droits et les libertés des autres peuples du monde dépend du maintien d'un équilibre entre ce qui doit appartenir au domaine public et ce qui doit rester en dehors. La balance doit toujours pencher en faveur de l'ouverture, mais la déséquilibrer complètement ne sert les intérêts de personne. Je voudrais m'expliquer clairement : j'ai dit qu'à la base, l'incident de Wikileaks a commencé par un vol, exactement comme si on avait fait passer des documents en fraude dans une serviette. Le fait que Wikileaks se soit servi de l'Internet n'est pas la raison pour laquelle nous critiquons ses actions. Wikileaks ne remet nullement en cause notre attachement à la liberté de l'Internet.
Un dernier mot à ce sujet : des informations ont circulé, dans les jours qui ont suivi ces fuites, que le gouvernement des États-Unis est intervenu pour contraindre des entreprises privées à priver Wikileaks de leurs services. Il n'en est rien. Il est vrai que certains politiciens et politologues ont publiquement demandé à ces entreprises de se dissocier de Wikileaks, tandis que d'autres les ont critiquées pour l'avoir fait. Nos responsables de la fonction publique participent, comme il se doit, aux débats publics de notre pays, mais il y a une distinction à marquer entre l'expression d'une opinion et un comportement coercitif. Les décisions commerciales qu'ont pu prendre des sociétés privées en application de leurs propres règles ou valeurs à l'égard de Wikileaks n'ont pas été prises sur les ordres du gouvernement Obama.

Un troisième défi consiste à protéger la liberté d'expression tout en encourageant la tolérance et la civilité. Je n'ai pas besoin d'expliquer à cet auditoire que l'Internet renferme toutes les variétés de discours : mensonger, offensant, incendiaire, inventif, véridique, magnifique.
La multitude d'opinions et d'idées qui s'amassent dans l'Internet est à la fois le résultat de son ouverture et le reflet de notre diversité humaine. En ligne, chacun a une voix. Et la Déclaration universelle des droits de l'homme défend la liberté d'expression de tous. Mais ce que nous disons a des conséquences. Des paroles haineuses ou diffamatoires peuvent enflammer des hostilités, approfondir des divisions et provoquer la violence. Dans l'Internet, ce pouvoir est surmultiplié. Un discours intolérant est souvent amplifié et impossible à rétracter. Naturellement, l'Internet fournit également un lieu idéal permettant aux gens de surmonter leurs divergences et de renforcer la confiance et la compréhension.
Certains jugent que, pour encourager la tolérance, certaines idées haineuses devraient être étouffées par les gouvernements. À notre avis, les tentatives visant à restreindre le contenu du discours ont rarement réussi et sont souvent devenues des prétextes pour violer la liberté d'expression. Au contraire, comme l'histoire l'a montré maintes et maintes fois, la meilleure réponse à un discours hargneux, c'est davantage de discours. On peut et on doit s'élever contre l'intolérance et la haine. Quand les idées sont exposées à la critique, celles qui ont du mérite ont tendance à s'en trouver renforcées, tandis que les idées faibles ou erronées ont tendance à disparaître ; sinon tout de suite, du moins à la longue.
Maintenant, cette approche ne discréditera pas immédiatement toute idée haineuse ni ne persuadera tout fanatique de changer d'avis. Mais nous avons conclu, en tant que société, qu'elle est bien plus efficace que n'importe quelle autre. Supprimer de l'écrit, bloquer du contenu, arrêter des gens qui s'expriment : toutes ces actions suppriment des mots, mais ne touchent pas aux idées sous-jacentes. Elles ne font que pousser les gens animés de ces idées vers les extrêmes, où leurs convictions peuvent s'approfondir, à l'abri de toute contestation.
L'été dernier, Hannah Rosenthal, l'envoyée spéciale des États-Unis chargée d'observer et de combattre l'antisémitisme, s'est rendue à Dachau et à Auschwitz accompagnée d'une délégation d'imams et autres personnalités musulmanes des États-Unis. Nombre d'entre eux avaient nié l'Holocauste et aucun n'en avait jamais dénoncé la négation. Mais après avoir vu ces camps de concentration, ils se sont dits disposés à considérer un point de vue différent. Ce voyage a eu un effet réel. Ils ont prié ensemble, ils ont signé des messages de paix, et beaucoup de ces messages inscrits dans les livres des visiteurs étaient rédigés en arabe. À la fin de leur tournée, ils ont lu une déclaration qu'ils avaient écrite et signée ensemble condamnant sans réserve le négationnisme et toute autre forme d'antisémitisme.
La confrontation des idées a eu des résultats. Notez que personne n'avait arrêté ces personnalités en raison de leur position antérieure et personne ne leur avait imposé le silence. Leurs mosquées n'avaient pas été fermées. L'État ne les a pas contraints par la force. Ce sont d'autres voix qui les ont interpellés avec des faits. Et leur discours s'est vu confronté à ceux de ces autres personnes.

Les États-Unis, il est vrai, interdisent certains types d'expression conformément à leur droit et à leurs obligations internationales. Nous avons des règles gouvernant la calomnie, la médisance et la diffamation, les discours qui incitent à une violence imminente. Mais nous appliquons ces règles ouvertement et les citoyens ont le droit de faire appel de la manière dont elles ont été appliquées. Nous ne restreignons pas l'expression, même si la majorité des gens la trouvent répugnante. L'histoire, n'est-ce pas, est pleine d'exemples d'idées qui ont été interdites pour des raisons que nous voyons à présent comme erronées. On a puni des gens pour avoir nié le droit divin des rois, ou pour avoir suggéré qu'on traite toutes les personnes également, sans égard à leur race, à leur sexe ou à leur religion. Ces restrictions reflétaient peut-être l'opinion dominante de l'époque et on en voit encore des variations en vigueur dans le monde d'aujourd'hui.
Mais lorsqu'il s'agit de l'expression en ligne, les États-Unis ont décidé de ne pas s'éloigner de leurs principes éprouvés par le temps. Nous demandons à nos citoyens de s'exprimer avec civilité, de reconnaître le pouvoir et la portée que leurs paroles peuvent avoir en ligne. Nous avons vu dans notre propre pays des exemples tragiques des conséquences terribles que peut avoir l'intimidation en ligne. Ceux d'entre nous qui occupent une fonction publique doivent mener par l'exemple, par le ton qu'ils adoptent et par les idées qu'ils défendent. Mais diriger, cela signifie aussi assurer au public la possibilité de faire ses propres choix, plutôt que d'intervenir en vue de les lui supprimer. Nous protégeons la liberté d'expression par la primauté du droit et nous faisons appel à la primauté de la raison pour l'emporter sur la haine.
Certes, il n'est pas aisé de promouvoir ces trois grands principes en même temps. Ils suscitent des tensions et posent des défis. Mais nous n'avons pas à choisir parmi eux. La liberté et la sécurité, la transparence et la confidentialité, la liberté d'expression et la tolérance, voilà les fondements d'une société libre, ouverte et sûre, ainsi que d'un Internet libre, ouvert et sûr, où les droits universels de l'homme sont respectés et qui offre un lieu prometteur de progrès et de prospérité accrus dans le long terme.
Maintenant, certains pays tentent une approche différente, consistant à limiter les droits en ligne et à ériger des cloisons permanentes entre des activités diverses : échanges économiques, discussions politiques, expressions religieuses et interactions sociales. Ils veulent garder ce qu'ils aiment et supprimer ce qu'ils n'aiment pas. Mais ce n'est pas facile. Les moteurs de recherche relient les entreprises à de nouveaux clients ; de même, ils attirent les usagers parce qu'ils livrent et organisent des actualités et des informations. Les sites de réseautage social ne sont pas que des lieux où des amis échangent des photos ; ils permettent aussi d'échanger des points de vue politiques et de mobiliser l'appui à des causes sociales, ou encore d'établir des contacts professionnels pour collaborer à de nouvelles initiatives commerciales.
Les murs qui divisent l'Internet, qui bloquent un contenu politique ou qui interdisent de vastes catégories d'expression, ou qui autorisent certaines formes de rassemblement pacifique mais qui en prohibent d'autres, ou qui intimident les gens pour les empêcher d'exprimer leurs idées sont beaucoup plus faciles à ériger qu'à conserver. Non seulement parce que l'ingéniosité humaine permet de les contourner ou d'y ouvrir une brèche, mais aussi parce qu'il n'y a pas d'Internet économique, d'Internet social et d'Internet politique ; il y a Internet, un point c'est tout. Le maintien de barrières qui tentent de changer cette réalité s'accompagne de toutes sortes de coûts - d'ordre moral, politique et économique. Les pays peuvent éventuellement les absorber à court terme, mais nous ne croyons pas qu'ils puissent le faire à long terme. Il y a des coûts d'opportunité à vouloir l'ouverture quand il est question de commerce, mais la fermeture quand il est question de liberté d'expression : ils se ressentent au niveau du système éducatif, de la stabilité politique, de la mobilité sociale et du potentiel économique.
Les pays qui tronquent la liberté d'Internet placent des limites sur leur avenir économique. Leurs jeunes citoyens n'ont pas pleinement accès aux conversations et aux débats qui ont lieu à travers le monde, ils ne sont pas exposés au type de libre examen qui invite à mettre en question les méthodes d'antan et à en inventer de nouvelles. L'interdiction de critiquer les responsables gouvernementaux prête le flanc à la corruption, laquelle crée des distorsions économiques dont les effets se mesurent au long terme. La liberté de pensée et des règles du jeu équitables que l'État de droit rend possibles font partie de ce qui nourrit l'innovation dans les économies.

L'on ne s'étonnera donc pas que l'European-American Business Council, qui regroupe plus de 70 sociétés, se soit résolument et publiquement prononcé la semaine dernière en faveur de la liberté d'Internet. Une entreprise qui investirait dans un pays où la censure et la surveillance s'exercent de manière musclée courrait le risque que son site Internet soit fermé sans avertissement, que le gouvernement fasse intrusion dans ses serveurs, que ses plans industriels lui soient subtilisés ou ses employés menacés d'être arrêtés ou expulsés pour n'avoir pas suivi une consigne motivée par des considérations politiques. Au vu des risques pour son chiffre d'affaires et son intégrité, il arrivera un moment où le jeu n'en vaudra plus la chandelle, en particulier si le marché offre des possibilités ailleurs.
On a fait remarquer qu'un petit nombre de pays, en particulier la Chine, semblaient faire figure d'exception, en ce sens que le degré de censure d'Internet y est élevé et la croissance économique forte. De toute évidence, beaucoup d'entreprises acceptent les mesures de restriction de l'Internet pour avoir accès à ces marchés, et à court terme, et qui sait à moyen terme, ces gouvernements peuvent effectivement réussir à maintenir le cloisonnement de l'Internet. Mais ces restrictions auront des coûts à long terme qui, tel un nœud coulant, risquent un jour d'étrangler la croissance et le développement.
Il y a aussi des coûts politiques. Prenez le cas de la Tunisie, où l'activité économique en ligne représentait une part importante de ses relations avec l'Europe alors que la censure était comparable à celle qui est pratiquée en Chine et en Iran : il n'a pas été possible d'y maintenir la séparation du volet « économie » de l'Internet de tous les autres volets. Les gens, en particulier les jeunes, ont trouvé des moyens de recourir aux techniques de connexion pour s'organiser et se communiquer leurs doléances, ce qui a alimenté un mouvement qui a tourné au changement révolutionnaire, comme vous le savez. De même en Syrie, le gouvernement s'efforce de négocier une contradiction non négociable. Pas plus tard que la semaine dernière, pour la première fois en trois ans, elle a levé l'interdiction qui frappait Facebook et YouTube, mais hier elle a condamné à cinq ans de prison une adolescente qu'elle avait reconnue coupable d'espionnage en raison des opinions politiques qu'elle avait exprimées sur son blog.
Cela aussi est insoutenable. La demande d'accès aux plateformes d'expression ne peut pas être satisfaite quand on finit en prison parce qu'on les utilise. Nous sommes convaincus que les gouvernements qui ont érigé des barrières à la liberté d'Internet, que celles-ci revêtent la forme de filtres techniques, de régimes de censure ou d'attaques contre ceux qui exercent leur droit de s'exprimer et de se rassembler en ligne, finiront par se trouver pris à leur propre piège. Ils se heurteront au dilemme du dictateur et, de deux choses l'une, ils devront laisser les murs s'écrouler ou alors y mettre le prix pour les empêcher de s'effondrer, ce qui revient à doubler sa mise avec de mauvaises cartes en mains, autrement dit à exercer une oppression plus forte et à subir l'escalade des coûts d'opportunité parce qu'on ne pourra pas profiter des idées qui auront été bloquées ni tirer parti des personnes qui auront été retirées de la circulation.
Je demande au contraire à tous les pays de parier avec nous qu'un Internet ouvert débouchera sur des pays plus robustes et plus prospères. Fondamentalement, ce pari s'inscrit dans le prolongement de celui que les États-Unis tiennent depuis plus de 200 ans, à savoir que les sociétés ouvertes font naître les progrès les plus durables, que l'État de droit forme la base la plus solide pour la justice et la paix et que l'innovation triomphe quand on peut présenter et explorer toutes sortes d'idées. Ce n'est pas un pari sur les ordinateurs ou les téléphones portables. C'est un pari sur les individus. Nous sommes convaincus que, en agissant de concert avec des partenaires au sein des gouvernements et avec les gens du monde entier qui misent avec nous sur le respect des droits universels à la base des sociétés ouvertes, nous préserverons l'Internet en tant qu'espace ouvert à tous ; et que nous en retirerons des avantages à long terme sous la forme de progrès et d'une prospérité partagés. Les États-Unis ne cesseront de promouvoir un Internet où les droits individuels sont protégés, un Internet ouvert à l'innovation, interopérable dans le monde entier, suffisamment sécurisé pour mériter la confiance de ses utilisateurs et suffisamment fiable pour être un outil de travail.

Au cours de l'année écoulée, nous avons eu le plaisir de voir se dessiner une coalition mondiale de pays, d'entreprises, de groupes de la société civile et de militants du numérique qui s'emploient à promouvoir ces objectifs. Nous avons trouvé de solides partenaires parmi plusieurs gouvernements à travers le monde et nous sommes encouragés par l'action de l'Initiative mondiale des réseaux TIC, laquelle réunit des entreprises, des universitaires et des ONG qui travaillent ensemble pour venir à bout des défis auxquels nous nous heurtons, par exemple le comportement à adopter face aux demandes de censure émanant d'un gouvernement, ou la manière de gérer les questions liées à la protection des renseignements personnels dans le contexte de l'informatique en nuage. Nous avons besoin de partenaires solides qui ont pris des engagements fondés sur des principes élevés, des engagements concrets vis-à-vis de la liberté d'Internet tandis que nous nous efforçons ensemble de faire avancer cette cause commune.
Nous nous rendons bien compte que, pour qu'elles aient du sens, les libertés dans l'espace virtuel doivent avoir des prolongements en matière d'activisme dans le monde réel. C'est pourquoi nous œuvrons dans le cadre de notre initiative 2.0 en faveur de la société civile pour mettre à la disposition des ONG et des militants la technologie et la formation qui leur permettront d'accroître leur efficacité d'exécution. De même, nous sommes déterminés à converser avec les gens du monde entier. La semaine dernière, peut-être l'avez-vous entendu dire, nous avons lancé des comptes Twitter en arabe et en farsi, qui viennent s'ajouter à ceux que nous avions déjà en français et en espagnol. Nous allons faire la même chose en chinois, en russe et en hindi. Ceci nous permet d'avoir un dialogue en temps réel avec les gens là où il existe une connexion qui n'est pas bloquée par un gouvernement.
Notre attachement à la liberté d'Internet est un attachement aux droits des peuples, et nous joignons le geste à la parole. Surveiller la liberté de l'Internet, réagir aux menaces qui lui sont faites, tout cela fait désormais partie du travail quotidien de nos diplomates et de nos spécialistes du développement, qui essaient de faire progresser la liberté de l'Internet sur le terrain, dans nos ambassades et missions de par le monde. Là où l'Internet est assujetti à un environnement répressif, les États-Unis aident sans relâche les gens à contourner les filtres, à devancer les censeurs, les pirates de l'informatique et les brutes qui les tabassent ou qui les emprisonnent pour les propos qu'ils ont tenus en ligne.
Si les droits que nous cherchons à protéger et à défendre sont clairs, les diverses manières par lesquelles ils sont enfreints deviennent de plus en plus complexes. On nous a reproché, je le sais, de ne pas investir à fond dans une technologie unique. La vérité, c'est qu'il n'y a pas de solution miracle dans la lutte contre la répression de l'Internet. Il n'existe pas d'« apps » pour cela. (Rires.) Allez, mettez-vous au travail, vous qui vous y connaissez ! (Rires.) Aussi avons-nous adopté une stratégie globale et novatrice, qui associe notre diplomatie à la technologie, à des réseaux sûrs de distribution de nos outils et à un appui direct aux personnes se trouvant sur les lignes de front.
Au cours des trois dernières années, nous avons alloué des subventions de l'ordre de plus de 20 millions de dollars à l'issue d'une procédure de sélection concurrentielle et transparente, fondée notamment sur une évaluation interorganismes par des experts techniques et des spécialistes des politiques, en vue de soutenir un groupe en plein essor de technologues et d'activistes qui sont à la pointe de la recherche sur la lutte contre la répression de l'Internet. Cette année, nous allons octroyer à ce titre un financement supplémentaire de plus de 25 millions de dollars. Nous adoptons une stratégie calquée sur le modèle du secteur capital-risque pour appuyer un portefeuille de technologies, d'outils et de séances de formation, procédant aux adaptations nécessaires à mesure que les usagers se tournent en plus grand nombre vers les dispositifs mobiles. Nous sommes à l'écoute du terrain, nous demandons aux militants du numérique de quoi ils ont besoin, et parce que notre approche est diversifiée elle nous permet de nous adapter à l'éventail des menaces auxquelles ils font face. Nous appuyons une multiplicité d'outils de telle sorte que si des gouvernements répressifs parviennent à en cibler un, nous en utilisons d'autres. Et nous investissons dans la recherche de pointe parce que nous savons que les gouvernements répressifs trouvent constamment de nouvelles méthodes d'oppression et nous comptons bien avoir un temps d'avance sur eux.

De même, nous sommes le fer de lance des démarches visant à renforcer la sécurité dans le cyberespace et l'innovation en temps réel, qu'il s'agisse de construire la capacité dans les pays en développement, de défendre le principe des normes d'ouverture et d'interopérabilité ou de rehausser la coopération internationale face aux cybermenaces. Le ministre adjoint de la défense, William Lynn, a justement prononcé un discours sur ce thème hier. Toutes ces actions s'appuient sur dix années de travail passées à préserver un Internet ouvert, sécurisé et fiable. Au cours de l'année à venir, le gouvernement mènera à bien une stratégie d'envergure internationale concernant le cyberespace, traçant ainsi la voie à suivre pour continuer sur cette lancée.
Il s'agit pour nous d'un dossier prioritaire de politique étrangère et dont l'importance ne cessera de croître au fil des ans. C'est pourquoi j'ai créé l'Office du coordonnateur sur les cyberquestions, qui aura notamment pour mission de travailler sur les questions de cybersécurité et de faciliter la coopération au sein du département d'État et avec d'autres organismes publics. J'en ai confié la direction à Christopher Painter, antérieurement directeur principal chargé de la cybersécurité au Conseil national de la sécurité et un spécialiste de ces questions depuis une vingtaine d'années.
L'augmentation spectaculaire du nombre des internautes ces dix dernières années a été un phénomène remarquable. Mais ce n'était qu'un avant-goût des choses à venir. Durant les vingt prochaines années, près de cinq milliards de personnes vont se joindre au réseau. Ce sont elles qui détermineront l'avenir.
Nous nous livrons donc à un travail de longue haleine. Contrairement à ce qui se passe en ligne, les progrès sur ce front se mesureront en années, et non en secondes. La voie que nous traçons aujourd'hui déterminera si ceux qui viendront après nous pourront connaître la liberté, la sécurité et la prospérité nées d'un Internet ouvert.

Tandis que nous tournons nos regards vers l'avenir, n'oublions pas que la liberté d'Internet ne s'applique pas à une activité particulière en ligne. La liberté d'Internet, c'est garantir que l'Internet demeure un espace où toutes sortes d'activités peuvent avoir lieu, depuis les audacieuses campagnes qui feront date dans l'histoire aux actes banals et modestes de la vie quotidienne.
Nous voulons un Internet ouvert pour que le manifestant habitué aux médias sociaux puisse organiser une marche en Égypte ; pour que l'étudiante suivant des cours à l'étranger puisse envoyer des photos à sa famille ; pour que l'avocat au Vietnam puisse dénoncer la corruption dans son blog ; pour que l'adolescent victime de brimades aux États-Unis puisse trouver une entraide en ligne ; pour que la propriétaire d'une petite entreprise au Kenya puisse gérer ses bénéfices en ayant recours aux services bancaires mobiles ; pour que le philosophe en Chine puisse lire des revues spécialisées avant de rédiger sa dissertation ; pour que la scientifique au Brésil puisse échanger des données en temps réel avec ses collègues à l'étranger ; et pour les milliards de milliards d'interactions qui ont lieu chaque jour sur Internet quand on communique avec des êtres chers, qu'on suit l'actualité, qu'on fait son travail et qu'on participe aux débats qui façonnent le monde.
La liberté d'Internet, c'est défendre l'espace dans lequel toutes ces activités se produisent afin que l'Internet ne soit pas seulement réservé à vous qui êtes ici présents, mais qu'il le soit aussi à ceux, à tous ceux, qui viendront après vous. C'est l'un des grands défis de notre époque. Nous sommes engagés dans une action énergique contre ceux auxquels nous nous sommes de tout temps opposés, ceux qui veulent étouffer et réprimer, ceux qui avancent leur propre version de la réalité et n'acceptent que celle-là. Nous faisons appel à votre aide dans ce combat. C'est un combat pour les droits de l'homme, c'est un combat pour la liberté humaine, c'est un combat pour la dignité humaine.
(Diffusé par le Bureau des programmes d'information internationale du département d'Etat. Site Internet : http://iipdigital.usembassy.gov/iipdigital-fr/index.html)